Grégory Pardieu est DRH du groupe Akuo Energy, un producteur indépendant d’énergie renouvelable en plein essor, implanté dans plus d'une vingtaine de pays à travers le monde.  Stéphane Romano est le fondateur du cabinet de chasse de tête Cala Partners. Ils sont témoins de l’évolution des attentes des candidats et de l’émergence de métiers dits à impact. Regard croisé sur un marché de candidats exigeants et en quête de sens.

Décideurs. La notion de métiers à impact est davantage présente, comment la définiriez-vous ?

Stéphane Romano.Ce terme de job à impact recouvre deux dynamiques. Tout d’abord, il s’agit souvent de travailler dans un secteur qui correspond à des valeurs sociétales dans leur ensemble. L’autre point concerne des métiers qui recouvrent des enjeux de durabilité qui ont une influence sur l’intérêt général.

Grégory Pardieu. Par métier à impact, j’entends un métier qui qui contribue activement à améliorer ou résoudre une problématique sociale, sociétale ou écologique. Il s’agit de métiers, ou d’activités porteuses de sens pour celles et ceux qui l’exercent, avec des effets bénéfiques pour la collectivité, la planète.

S. R. L’évolution des attentes des candidats est frappante. Alors qu’auparavant les salariés souhaitaient faire carrière au sein d’une même entreprise, à présent ce qu’ils recherchent avant tout est de participer à un engagement collectif.

G. P. : Tout cela est vrai, et pour autant les questions de la rémunération et des conditions de travail demeurent des préoccupations très importantes, il convient de ne pas le perdre de vue. Je crois que la notion d’impact doit également être considérée par l’impact sur soi-même ! Notre époque encourage chacun à être très attentif à sa propre écologie personnelle : naturellement l’équilibre vie professionnelle et privée, mais également la capacité d’agir avec une réelle autonomie, bénéficier de flexibilité dans l’organisation de ses journées, et être au service d’une mission porteuse de sens et alignée avec ses valeurs.

Au niveau de ma profession de DRH, cela s’est traduit ces dernières années par une importance de plus en plus accrue sur la santé mentale des collaborateurs. Pour les managers cela implique également une posture différente. Ils doivent à la fois être des coachs, des leaders et des personnes inspirantes.

S. R. : Un paradoxe contemporain existe en effet : nous recherchons des métiers qui ont un impact sur l’intérêt collectif mais dans le même temps, nous souhaitons l’exercer dans des conditions de plus en plus individualistes. Pour les employeurs, la difficulté est de pouvoir trouver des candidats qui veulent bien s’inscrire dans la durée. Les managers sont de leur côté davantage sollicités pour leur qualité d’écoute et leur leadership est attendu pour accompagner les équipes. Souvent, ils doivent incarnés le sens porté par la vision qui découle de la stratégie de l’entreprise.

"Alors qu’auparavant les salariés souhaitaient faire carrière au sein d’une même entreprise, à présent ce qu’ils recherchent avant tout est de participer à un engagement collectif."

Cette volonté des candidats d’occuper un poste à impact représente-t-elle une difficulté pour les recruteurs ?

G. P. : Dans une entreprise qui comme Akuo est par essence pourvoyeuse d’emplois à impact, notre mission est de créer des projets exemplaires, alliant pertinence technologique, impact environnemental positif et bénéfices sociaux. Nous sommes pionnier dans des domaines tels que l'agrivoltaïsme, le stockage et les centrales solaires flottantes. Les candidats savent qu’en nous rejoignant, ils contribueront à façonner un avenir énergétique durable et responsable. Donc pour nos recruteurs, la difficulté ne porte pas sur ce point, mais sur le fait de faire face à un secteur pénurique et hautement convoité.

S. R. : En effet, je constate chez de nombreux clients une importante difficulté à pouvoir répondre à ce besoin de recrues spécialisées. Lorsque les entreprises sont d’une taille importante, ils parviennent à développer des écoles de formation sur ces métiers à impact. Pouvoir indiquer et affirmer aux collaborateurs qu’ils participent à la transformation du monde constitue un levier d’engagement important.

Existe-t-il un risque de voir certaines entreprises faire du Greenwashing en marketant des offres comme des "jobs à impact" ?

G. P. : Il faut faire très attention à un point important : un job à impact, s’il l’est réellement n’a pas besoin d’être vendu comme tel. Je pense que les candidats ne sont pas dupes en la matière. Par exemple, chez nous, nous n’avons nullement eu à décrire l’ensemble de nos postes comme des jobs à impact. Naturellement, nous sommes attentifs au fait de décrire concrètement les projets qui sont les nôtres, et les bénéfices qu’ils ont pu apporter aux populations, aux différents territoires. Je préfère démontrer ce que l’on fait que de vendre du rêve

S. R. :  Lorsqu’un candidat a un doute sur ce qui est promis, je l’invite grandement à creuser et vérifier que la promesse corresponde aux faits. Au-delà du green, il existe un risque que les entreprises racontent une histoire et en pratique une autre. Chez Cala, nous avons pris la décision de ne plus travailler avec celles qui ont pû, par le passé, ne pas respecter les engagements pris lors des entretiens avec les candidats. 

Propos recueillis par Elsa Guérin

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