Michael "Bambang" Hartono et son frère cadet Robert "Budi" Hartono possèdent une fortune de quelque 23 milliards de dollars chacun. Cela fait d’eux les premières fortunes d’Indonésie, et de loin !

En ce printemps 2024, l’heure est à la fête dans la ville italienne de Côme connue mondialement pour sa beauté. Son modeste club de football accède enfin à la première division italienne la fameuse Série A. Derrière le succès se trouve deux frères indonésiens de 83 et 84 ans Robert Budi Hartono et Michael Bambang Hartono qui ont racheté le club en 2024 et s’attèlent à le structurer sans mettre la charrue avant les bœufs. Qui sont ces milliardaires mystérieux et discrets peu connu en dehors de leur Indonésie natale ?

Merci aux fumeurs !

Vivre dans le quatrième pays le plus peuplé du monde peut porter ses fruits. Avec 275 millions d’habitants, l’Indonésie est une terre où, visiblement, les fumeurs mâles pullulent. Le taux de tabagisme masculin y est de 70 % selon l’Organisation mondiale de la santé. Vous avez bien lu. Près des trois quarts des Indonésiens sont adeptes de la pause cigarette, ce qui leur vaut la première place mondiale ! Les Indonésiennes équilibrent la balance avec un taux de 3 %. Pour les curieux, le taux en France est de 33 %, sans grande différence entre les sexes, "égalité" oblige. Il n’est donc pas surprenant que les propriétaires de Djarum, producteur de cigarettes détenant 15 % du marché local, se portent bien financièrement. Indonésiens d’origine chinoise, les frères Hartono ont bâti leur empire sur des mégots de kreteks, ces cigarettes faites d’un mélange de tabac, de clou de girofle et d’ingrédients aromatiques.

De la cigarette à la banque

Michael et Robert ont hérité de l’entreprise de leur père Oei Wie Gwan qui gérait une petite usine de cigarettes établie en 1951. Après sa mort en 1963, les frères alors âgés de 22 et 23 ans reprennent l’affaire qu’ils n’ont cessé de développer depuis. En 1975, ils fondent Polytron, une marque de produits électroniques, le groupe se diversifiant au fur et à mesure dans d’autres industries telles que l’huile de palme, la papeterie et les tours de communication. Ils s’introduisent ensuite dans le monde bancaire, achetant des banques locales – plus tard revendues à Rabobank –, avant de s’allier en 2002 avec la firme d’investissement américaine Farallon Capital afin de mettre la main sur Bank Central Asia – l’une des plus grandes banques indonésiennes  –, créant pour l’occasion le consortium FarIndo Investments. Un véritable coup de poker. Possédant initialement,10 % des parts, les frères montent progressivement à plus de 90 %. Aujourd’hui, Michael et Robert Hartono détiennent toujours, à travers le véhicule d’investissement Dwimuria Investama Andalan, près de 55 % de Bank Central Asia, première banque privée d’Indonésie, et véritable source de leur fortune.

Les deux frères possèdent 55% de Bank Central Asia, premier établissement d'Indonésie

Industrie numérique

À plus de 80 ans, les frères Hartono ne se reposent pas sur leurs lauriers et surfent sur la vague du numérique. Ils ont élargi leurs activités dans ce domaine à travers la société Global Digital Prima (GDP Ventures) avec comme pilier la plateforme d’e-commerce Blibli.com. Ils ont également acheté Kaskus, le site de médias sociaux le plus populaire d’Indonésie. Jamais rassasiés, les frères Hartono ont de la même manière été très actifs récemment dans le financement de start-up afin d’étendre leur écosystème numérique. Enfin, comme tout milliardaire qui se respecte, Michael et Robert Hartono contrôlent plusieurs centres commerciaux et immeubles à Jakarta.

Troisième génération

Si Robert détient légèrement plus de poids dans les affaires familiales, Michael, lui, est prêt à délaisser quelques millions pour s’adonner à son péché mignon, le bridge. Il a d’ailleurs gagné plusieurs médailles avec l’équipe nationale indonésienne lors de compétitions internationales. En outre, il se soucie moins de la transmission du groupe Djarum que son frère. Victor Hartono, un des trois fils de Robert, actuellement Chief Operating Officer du groupe Djarum et président de la Fondation Djarum, semble ainsi bien placé pour succéder à son père et son oncle. À moins que ce ne soit son autre fils, Armand, haut placé au sein de Bank Central Asia, ou peut-être son troisième fils, Martin, qui gère la société d’investissement Global Digital Prima… Un trio Hartono à la tête de Djarum serait opportun. Un filon pour les héritiers : se lancer dans les bonbons menthol.

Marc Munier

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