La crise est-elle derrière nous ? Pas si sûr ! Moi encore si on croit les augures dévoilés par les analystes de la Société générale. Cependant, après une longue descente aux enfe, le marché des fusio-acquisitio frémit à nouveau au rythme des annonces d’opératio. Les industriels sont les principaux artifices des nouvelles opératio. Les investisseu en capital peinent à revenir, soumis à la difficulté du montage des financements.

La crise est-elle derrière nous ? Pas si sûr ! Moins encore si on croit les augures dévoilés par les analystes de la Société générale. Cependant, après une longue descente aux enfers, le marché des fusions-acquisitions frémit à nouveau au rythme des annonces d’opérations. Les industriels sont les principaux artifices des nouvelles opérations. Les investisseurs en capital peinent à revenir, soumis à la difficulté du montage des financements.

L’effondrement du marché des fusions-acquisitions a été une dure réalité pour l’ensemble des professionnels vivant de ces opérations. Selon les chiffres fournis par Thomson Reuters, sur les neuf premiers mois de l'année, les fusions-acquisitions ont totalisé 1 392 Md$ dans le monde, dont un tiers en Europe.
En totalisant un volume de 32 milliards d’euros, les transactions françaises ont ainsi baissé de 71 % durant trois premiers trimestres de l’année. Sur cette même période, la chute n’a été « que » de 55 % au niveau mondial. De l’acquisition de Marvel Entertainment par Disney à la fusion entre Pfizer et Wyeth, le rachat de Sun Microsystems par Oracle, ou encore l’OPA de Cisco sur Tandberg : quelques belles opérations ont pourtant ponctué l’année.

Premier pays touché par la crise financière, les Etats-Unis est également l’un des premiers marchés à bénéficier d’un rebond dans le domaine des rapprochements entre entreprises. L’Europe s’apprête désormais à suivre le mouvement de retour aux affaires déclenché en Asie. Qui sont cependant les animateurs de ce redécollage attendu pendant 18 longs mois par les banquiers d’affaires ?


Après le creux, le rebond n’est pas le même pour tous
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Les fonds de capital investissement ? Certainement pas. Après avoir représenté jusqu’à 25 % du marché global des fusions-acquisitions, les spécialistes du LBO doivent à leur tour manger leur pain noir. Thomson Reuters n’estime plus leur poids qu’à 3,2 % de l’ensemble du marché pour les neuf premiers mois de l’année 2009.
L’absence de financement pèse lourdement sur la mise en place de toute opération supérieure à 300, voire 250, millions d’euros. La moindre dette impose la mise en place d’un syndicat bancaire réunissant au moins une dizaine d’établissement. La réactivité des investisseurs en capital à l’heure d’analyser les cibles, leur capacité à mieux valoriser les entreprises que leurs adversaires industriels : autant d’avantages concurrentiels à passer par pertes et profits en attendant la réouverture des guichets bancaires.

L’heure est davantage au suivi des participations. Dans un contexte économique compliqué, alors que les dettes d’acquisition pèsent de plus en plus sur les bilans, les équipes des fonds de capital investissement retroussent leurs manches pour épauler leurs entreprises. Discussions avec les banques pour redéfinir le financement, discussions avec les équipes dirigeantes des entreprises pour les aider à venir à bout de la crise voir pour mettre en place une nouvelle stratégie de développement. Autant d’actions particulièrement chronophages faisant désormais partie du quotidien des investisseurs en capital.


Le baromètre publié par l’Association française des investisseurs en capital (Afic) tend pourtant à montrer que les entreprises soutenues par des fonds traversent mieux la crise que leurs homologues. Si une quinzaine de LBO ont fait l’objet (depuis le 1er octobre 2008) d’une procédure collective entraînant la cessation de leur activité, 77 % des entreprises sous LBO (près de 800 sociétés) n’auraient au contraire aucun problème particulier.

A l’acquisition, certains investisseurs parviennent cependant à revenir sur le marché. Souvent par le biais d’opérations en minoritaire. C’est ainsi que Clayton, Dubilier & Rice (CD&R) est entré au capital de JohnsonDiversey. L’opération suppose un investissement de 477 millions de dollars pour une participation de 46 % du capital de ce groupe international présent sur le marché mondial des solutions sanitaires, de nettoyage professionnel et d’hygiène. L’entrée de CR&R a par ailleurs permis à JohnsonDiversey de retrouver davantage de souplesse financière en négociant avec ses banques une recapitalisation de 2,6 milliards de dollars. Dans ce cas précis, la volonté du groupe industriel de mener une stratégie active de croissance externe a encouragé la recherche d’un investisseur professionnel ainsi que son entrée au capital.

En France, Astorg Partners semble également avoir bénéficié d’un alignement d’intérêt lui permettant d’entrer récemment au capital du courtier en assurance Gras Savoye. C’est auprès d’un investisseur en capital que le groupe américain Willis et les familles actionnaires historiques sont allés pour les accompagner lors de la réorganisation du capital d’un groupe valorisé autour de 500 millions d’euros. Un industriel aurait-il pu réaliser cette opération ? Certainement pas, à moins de reprendre l’intégralité du capital, ce qui ne semble pas correspondre aux attentes des actionnaires en place.

Les principales opérations à venir devraient tout de même être des transactions entre fonds : les fameux LBO secondaires. Certains acteurs subissent en effet une très forte pression à investir. En l’absence d’opérations dans les prochains mois, voire les prochaines semaines, certaines équipes vivent sous la menace de perdre les commissions qu’elles reçoivent pour la gestion des véhicule d’investissement. De là à penser que les prochains mois pourraient être l’occasion d’une « mini bulle », il n’y a qu’un pas.

Cependant, si le secteur du capital investissement conserve plusieurs cartouches pour rester actif sur le marché des fusions-acquisitions – notamment sa capacité à insuffler une gouvernance efficace à ses participations –, il subit aujourd’hui la très forte concurrence des industriels. Pas un fonds n’a semblé capable de s’aligner correctement dans l’enchère mise en place pour valoriser Areva T&D plus de 4 milliards d’euros.

 

La revanche des industriels.

Car aujourd’hui, les véritables maîtres du marché des fusions-acquisitions sont bel et bien les industriels. Longtemps éclipsés par les investisseurs en capital, ils reviennent désormais aux premières loges du marché.

Il a fallu pour cela attendre que l’économie touche son point bas, que les marchés boursiers se stabilisent. L’argent disponible étant le nerf de la guerre, les groupes industriels abordent le retour des opérations avec les meilleures dispositions.

Après avoir passé les 18 derniers mois à restructurer à tour de bras et à tailler dans les dépenses afin d’optimiser les bilans, les industriels trouvent désormais dans leur trésorerie un trésor de guerre dans lequel puiser quand apparaissent de belles cibles à payer cash. Le marché obligataire est également ouvert. La bourse retrouve ainsi sa fonction d’alternative aux banques à l’heure de financer les acquisitions.

Car la crise n’a pas fait que des malheureux. Leur santé préservée, les industriels s’apprêtent désormais à faire leurs emplettes. Chaque opération fait cependant figure de cas particulier.

Pour certains, les acquisitions auront pour objet de pallier les coupes effectuées ces dernières années dans les dépenses de R&D.

Dans une étude réalisée en partenariat avec Nixon Peabody, Mergermarket rappelle ainsi que le marché de la santé a enregistré quelques unes des plus importantes opérations de l’année. Le rapprochement entre Pfizer et Wyeth émarge à 64 milliards de dollars, suivi par la fusion entre Roche et Genentech (44,3 milliards de dollars) mais aussi le rachat de Schering Plough Corporation par Merck (43,2 milliards de dollars).

Particulièrement actif, Sanofi-aventis mène une stratégie d’acquisition de portefeuille de recherche. Tout en annonçant la mise en place d’un nouvel accord de licence dans le domaine du traitement du cancer avec Micronet, le quatrième groupe pharmaceutique mondial a mis le prix pour obtenir des fonds d’investissements actionnaires de Fovea qu’ils vendent cette biotech hexagonale.
Financée en numéraire mais disposant d’un ample volet d’earn out, l’opération permet au groupe pharmaceutique d’entrer de plain-pied dans le marché prometteur de l’ophtalmologie. Une opération particulièrement stratégique ainsi que le rappelle Christopher A. Viehbacher, Directeur général de Sanofi-aventis : « L’acquisition de Fovea, une des sociétés biotechnologiques pionnières en France en ophtalmologie constitue une étape supplémentaire dans la stratégie de Sanofi-aventis de se concentrer sur de nouvelles approches pour renforcer son portefeuille de R&D ». Le groupe ne s’est pas arrêté là avec la conclusion du rachat d’Oenobiol.
Le marché accueille favorablement ces annonces : Citigroup a ainsi relevé son objectif de cours sur le groupe pharmaceutique en rappelant que le potentiel de hausse de Sanofi-aventis n’était pas épuisé.

A l’instar du secteur pharmaceutique, certains marchés sont plus propices que d’autres aux grandes manœuvres. Dans son « commentaire hebdomadaire » du mois d’octobre, l’équipe d’Axa Investment Managers dresse un portrait de ces secteurs où l’effervescence est attendue.

 

Ces professionnels visent à mettre en place un système permettant d’identifier les secteurs les plus prometteurs pour les fusions-acquisitions. En guise de méthodologie pour identifier les industries les moins consolidées, Axa Investment Managers a adapté dés 2006 « l’indice de Herfindahl (IH), utilisé par le Département de la Justice américain pour estimer le degré de concentration d’un secteur donné, et donc l’intensité de la concurrence qui y règne ».



Première conclusion de cette note, l’ensemble des secteurs étudiés ont connu un mouvement de consolidation ces trois dernières années. Un seul secteur semble échapper à la tendance générale : celui de la métallurgie et des extractions minières. L’IH de ce secteur a connu une forte baisse. La cotation de neuf nouveaux groupes (parmi lesquels Eurasian Natural Resources, Kazakhmys ou encore Antofagasta) a fragmenté un marché pourtant habitué aux annonces de méga-rapprochements au plus haut des cotations des matières premières.

Ainsi que le rappelle Axa IM, l’absence des fonds de capital investissement aura un impact dans la dynamique de certains secteurs industriels à l’heure de se concentrer. La stratégie industrielle prend le pas sur les stratégies financières.

Mis en place en urgence pour contrer la crise, les plans d’aides gouvernementaux faussent également la donne avec un effet, notamment, de distorsion de la concurrence. Epaulées financièrement, les entreprises les plus exposées abordent le redécollage économique en meilleure condition que leurs homologues les plus prudentes.

Pour l’équipe d’Axa IM, « le secteur bancaire restera l’un des plus actifs. Les secteurs de la santé, des services aux collectivités, des médias, de l’énergie et des biens d’équipement promettent aussi d’être intéressants ».

Très animé au plus fort de la crise, le monde de la banque devrait continuer de constater de nouveaux rapprochements entre groupes ou, tout au moins, des cessions de filiales pour permettre aux maisons mères de redresser leur santé financière. Ainsi que le rappelle l’étude, les contraintes réglementaires devraient peser sur les opérations à venir. Les expériences passées encourageront sans doute le régulateur à limiter la taille des intervenants pour « réduire la menace que représente l’émergence d’organisations “too big to fail“ ». Suite aux plans d’aides, les autorités européennes encourageront sans aucun doute prochainement plusieurs établissements bancaires à se défaire de certaines de leurs activités pour rétablir un environnement concurrentiel optimal.

L’agroalimentaire devrait également donner lieu à quelques joutes. Jugée hostile par l’équipe de direction de Cadbury l’offre de Kraft n’arrive toujours pas à bon port. Après une hausse de 12 % du titre de la cible, de nouveaux candidats semblent désormais près à entrer en lice à l’instar de l’américain Hershey.


Habitué des opérations de croissance externe, Pernod Ricard pourrait également s’inviter au bal des acquisitions. Si la priorité du groupe de vins et spiritueux reste son désendettement, Pernod Ricard dispose à  nouveau d’une plus importe marge de manœuvre après avoir cédé pour 700 millions d’actifs et réalisé successivement une augmentation de capital d’un milliard d’euros puis une émission obligataire de 800 millions d’euros. Malgré les annonces conservatrices de l’équipe de direction, il y a fort à parier que le groupe ne resterait pas inactif si une belle cible entrait à portée de tir.

Le secteur des média reste également peu concentré. Axa IM pointe par ailleurs « l’écart de rendement entre le free cash flow (16%) et les obligations du secteur (4%) ». Les télécoms sont sur la même ligne. Candidat à la quatrième licence de téléphonie mobile, Iliad pourrait devenir une cible intéressante. Vivendi a pris le parti de faire ses emplettes à l’international. C’est ainsi que le groupe a réalisé une offre sur le brésilien Gvt.

Si chaque secteur compte avec des sous-secteurs pouvant se révéler actifs en fusions-acquisitions, « les secteurs à forte trésorerie, fragmentés et déjà actifs devraient être les terrains de F&A les plus fertiles ».
Certains acteurs disposant de moins de trésorerie que d’autres font également preuve d’imagination. C’est ainsi qu’Orange a su proposer à T-Mobile une solution astucieuse pour fusionner leurs filiales anglaises. La création d’un acteur de poids sur ce marché concurrentiel compensera certainement l’absence de rentrée immédiate de cash.
Publicis a permis à Microsoft de réaliser une excellente affaire en acquérant en titre Razorfish. Depuis l’opération, le cours de bourse du groupe publicitaire s’est envolé.
Si Microsoft n’a sans doute pas vocation d’être un actionnaire au long cours de Publicis, il en est certainement autrement pour l’avenir de Qatari Diar au capital de Vinci. L’entrée du fonds souverain qatari a ainsi été financée par l’apport du groupe Cegelec. D’une pierre, trois coups : Vinci se voit désormais doté d’un actionnaire de poids et met la main sur un groupe qu’elle convoite ouvertement depuis plusieurs années, le tout sans débourser un cent.
Les opérations en titre ne sont cependant pas encore monnaie courante. La bourse n’est sans doute pas encore suffisamment stabilisée pour le permettre.

Dans une note d’analyse du mois de septembre, Credit Suisse identifiait autour de 80 sociétés comme autant d’éventuelle cible. Parmi elles, les françaises Danone, Hermès, Legrand, Arkema ou Dassault. 2010 s’annonce déjà comme une année plus animée et prometteuse pour les spécialistes des fusions-acquisitions.

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