Frank Maassen (Groupe But) : « Le groupe But devait gagner en masse critique »
Décideurs. Qu’attendez-vous de ce nouvel actionnariat ?
Frank Maassen. Nous sommes entrés dans une perspective de développement à moyen et long terme. Il est essentiel d’être accompagné par un actionnaire qui ne soit pas inscrit dans un processus de revente d'ici trois-quatre ans. De sorte que le management puisse être en position de poursuivre la stratégie initiée en 2013. Malgré ce changement, les équipes continuent de disposer d'une certaine liberté d'action tout en ayant la possibilité d’échanger à de multiples niveaux avec nos nouveaux actionnaires. Deux actionnaires complémentaires sur lesquels nous allons pouvoir nous appuyer pour accélérer notre croissance et, le cas échéant, faire évoluer notre stratégie.
déployer une stratégie de communication cross-canal à jour avec les attentes de nos clients
Quelles synergies comptez-vous développer avec Lutz ?
Lutz est le numéro trois du secteur en Europe et réalise quatre milliards d'euros de chiffre d'affaires. Trois niveaux de synergies sont visés : l'échange des meilleurs produits et processus (communication, logistique et animation réseau) ainsi que les synergies d’achats.
Qu'en est-il de CD&R ?
Le fonds d'investissement dispose d'une forte compétence opérationnelle dans le secteur de la distribution. Ces équipes vont nous aider à parfaire l'animation de nos magasins et à déployer une stratégie de communication cross-canal à jour avec les attentes de nos clients.
Quel bilan dressez-vous de votre collaboration avec les anciens actionnaires ?
Les anciens actionnaires ont su trouver l'équilibre entre leur implication aux côtés des managers et l'autonomie qui était laissée à ces derniers. Depuis mon arrivée en 2013, ils ont donné la liberté au management de déployer la stratégie préalablement fixée. Cela a porté ses fruits. De manière générale, les fonds d'investissement s’inscrivent cependant dans des cycles différents. Les managers ne dirigent pas la société dans une optique de cession à quatre ou cinq ans. Cela engendre parfois certains dilemmes même si nous avons su prendre les bonnes décisions dans l’intérêt de la société.
Les partenaires sociaux ont été rassurés par les projets présentés par les actionnaires
Le processus de cession d’une entreprise est aussi une source d’inquiétude pour les salariés. Quelle communication avez-vous établie avec eux pour les intégrer à ce nouveau projet ?
Cette cession s'est concrétisée dans la plus grande transparence avec les salariés. Nous leur avons expliqué les trois options qui se présentaient à nous : l'IPO, un nouveau LBO ou un partenariat stratégique. La concertation fut positive. Très rapidement les partenaires sociaux ont été rassurés par les projets présentés par les actionnaires potentiels qui n'avaient aucun impact négatif sur l'emploi. C'était au contraire une vraie opportunité d'accélérer notre croissance. Les salariés avaient par ailleurs conscience que le groupe But était trop petit par rapport à la concurrence, qu'il était devenu nécessaire pour la société de gagner en masse critique.
La bonne dynamique du groupe cache toutefois une certaine timidité de l’activité digitale. Celle-ci ne représentait que 3% du chiffre d'affaires alors que certains autres acteurs du secteur réalisent jusqu’à 8 % de leurs revenus par ce biais. Quelles dispositions comptez-vous prendre pour améliorer la situation ?
Notre retard s'explique par le fait que nous avons commencé le développement de notre site internet marchand seulement en 2010. En 2013, lors de mon arrivée j'ai estimé que cela ne pouvait pas durer. Or, but.fr pouvait être vu par certains salariés comme un concurrent des offres présentes en magasins. Nous avons donc créé au Codir un poste de responsable cross canal. Cette personne a pour mission de s'assurer que notre offre soit cohérente à travers l'ensemble de nos canaux de distribution. Autre priorité, développer les ventes en ligne. Afin d'améliorer l'expérience client, nous avons lancé des produits exclusivement commercialisés en ligne, proposé un service de crédit en ligne et intégré de nouveau modes de livraison. Tant et si bien qu’aujourd’hui les ventes en ligne représentent 4 % à 5 % de notre chiffre d’affaires.
Propos recueillis par Aurélien Florin