Rémi Carnimolla (3i) : « La classe moyenne des pays émergents cherche à consommer occidental »
Dealmakers. Vous venez d'investir 150 M€ dans Ponroy, le spécialiste français des produits de santé naturels. Quelle a été votre approche du dossier ?
Rémi Carnimolla. Ponroy est une entreprise créée dans les années 2000, implantée d'abord à Paris puis en Vendée, où elle a mis sur pied une usine de production extrêmement moderne répondant aux normes pharmaceutiques. Cet outil concourt à l'excellence industrielle de la société. Fabrice Cahierc, dirigeant opérationnel, et Arnaud Ponroy, fils du fondateur Yves Ponroy, ont eu la bonne idée de se positionner sur le créneau de la naturalité. Cette activité comprend deux volets : d'une part les compléments alimentaires et, d'autre part, l'hygiène (shampooings, laits corporels...). En tant qu'investisseur, nous avons été séduits par la force des marques de Ponroy ainsi que par leur distribution omnicanale. Beaucoup d'autres acteurs ne sont présent qu'en pharmacie alors que Ponroy est également disponible en grandes et moyennes surfaces (GMS), parapharmacie, vente par correspondance (VPC) et e-commerce. L'entreprise réalise aujourd'hui une grosse centaine de millions d'euros de CA.
La force d'une marque est en effet un atout considérable en B2C ou B2B2C. Quel est donc ce pool de marques avantageux que vous avez identifié ?
Du côté des compléments alimentaires, une marque comme Vitarmonyl est très forte en GMS. En pharmacie, Manhaé (pour le traitement des conséquences liées à la ménopause) est incontournable et recommandée par les gynécologues. Et Biolane, avec ses crèmes de soin et d'hygiène pour les bébés, fait partie des premiers choix chez les parents.
Ponroy attend certainement beaucoup du réseau, des compétences et des moyens financiers de 3i pour passer à la vitesse supérieure. Quel est l'état d'esprit de la direction ?
Ponroy est une vraie success story dans le sens où l'entreprise a dû surmonter de fortes difficultés pour s'imposer. Son internationalisation est pour beaucoup dans sa réussite et c'est avec cet état d'esprit que le management a fait appel à nous. L'objectif est d'accélérer la croissance de ses différentes activités à l'étranger tout en conservant son assise en France. Nous allons nous renforcer là où nous avons déjà des attaches en offrant toute notre gamme de produits, par le biais de tous les canaux disponibles. Si l'on prend l'exemple de l'Italie, nous n'y opérons qu'à travers les GMS. Il faut donc compléter la matrice. Selon les cas de figure, Ponroy devra signer de nouveaux accords de distribution ou créer des filiales – sinon racheter des concurrents – afin de séduire davantage de clients. En Amérique du Nord, Ponroy est bien installé au Canada mais les États-Unis, où les acteurs sont légion, restent compliqués à appréhender. Nous préférons les pays émergents dotés d'une classe moyenne grandissante cherchant souvent à consommer « occidental ». Rajoutez le « Made in France » et vous obtenez une bonne recette. En revanche, nous ne comptons pas ouvrir de troisième branche d'activité.
Quel est l'état du marché de la naturalité ?
Il est extrêmement fragmenté donc les opportunités d'acquisition sont nombreuses. Bien sûr, nous en avons déjà identifié. Les grands groupes, tant ceux portés sur les Fast moving consumer goods (FMCG), comme Nestlé, J&J ou L'Oréal, que les géants de la pharmacie, convergent vers ce marché prospère de la naturalité. Or, nous savons que la particularité de ces acteurs tient plus à l'accélération de la commercialisation de produits existants qu'à l'innovation. Cela laisse tout loisir aux ETI telles que Ponroy de consolider leur portefeuille avec de plus petits acteurs porteurs d'idées rafraîchissantes...
FS