Frédéric Poux (Alain Afflelou) : « En 2018, 25 % du marché de l’optique sera détenu par les chaînes discount »
Décideurs. Pourquoi avoir choisi d’acquérir Optical Discount ?
Frédéric Poux. Depuis 2015 nous sommes sous LBO et nous n’avions pas encore réalisé d’opération de croissance externe. L’acquisition d’Optical Discount nous permet d’accroître nos parts de marché en France, mais également de clarifier le positionnement marketing de la marque Alain Afflelou qui concentre désormais son action sur le segment dit « premium » et non discount. Avec l’enseigne Claro nous avons tenté d’être bicéphale, les mêmes équipes se consacraient à la fois au premium et au low cost. C’est intenable. Nous ne sommes pas les seuls à avoir eu ce problème : de nombreux opticiens promettent la fin des lunettes chères alors que leur panier moyen est supérieur à 300 euros. Cet état de fait a créé une certaine défiance vis-à-vis des opticiens, très critiqués dans les médias. Nous voulions spécialiser nos enseignes afin de clarifier notre stratégie marketing avec, d’un côté, Alain Afflelou et son offre « Win-Win » et, de l’autre, le low cost avec une marque distincte. Acquérir Optical Discount nous a permis de créer cette différenciation. De plus, la croissance organique est faible : il y a déjà 12 000 opticiens en France, ouvrir toujours plus de magasins n’aurait pas de sens. Nous disposons déjà de 750 points de vente Alain Afflelou, à 800, on s’arrêtera.
Décideurs. Ce rachat vous a donc permis de vous renforcer dans le low cost. Quels sont vos objectifs sur ce segment ?
F. P. Optical Discount est un réseau d’à peine cent magasins. Avec la fusion d’Optical Discount et Claro, nous disposons à présent d’environ 150 franchises discount, le sixième pôle optique français. Avant la fin 2016, nous aurons plus de 200 magasins et donc une couverture nationale. Au 1er janvier 2016, la moitié des Claro sera transformée en Optical Discount et l’autre moitié le sera au 31 mars 2016. Optical Discount gardera son indépendance, ses fondateurs et sa stratégie, afin de ne pas perdre son identité. Ces deux enseignes concurrentes vont également créer une émulation au sein du groupe. Nous avons de grandes ambitions sur ce segment. De fait, depuis quatre ans, le marché de l’optique a crû de plus de 5 % et 2 000 magasins ont été ouverts. La moitié d’entre eux étaient des discounters. J’estime qu’en 2018, 25 % du marché de l’optique sera détenu par les chaînes de discount.
Décideurs. Quelles difficultés majeures avez-vous rencontrées pour fusionner vos deux enseignes ?
F. P. Les normes françaises nous ont beaucoup freinés de par les règlements et la lenteur du traitement des dossiers en mairie. Certains de mes franchisés ne peuvent pas devenir des Optical Discount car la municipalité bloque les chantiers. Nous sommes présents dans onze autres pays et à l’exception de l’Algérie, il faut généralement un mois pour ouvrir un magasin. En France, il faut compter entre trois et quatre mois.
Décideurs. Vous misez sur l'international pour poursuivre le développement de votre offre premium Afflelou, notamment l'Espagne. Avez-vous d'autres pays en ligne de mire ?
F. P. Nous allons continuer à innover et à renforcer la griffe Afflelou. Mi-octobre, nous enregistrions une croissance de 3,5 % quand celle du marché est donnée à 0 %. La France représente à ce jour 76 % de notre chiffre d’affaires, nous souhaitons ramener cette part à 50 % dans les années à venir. Nous allons accélérer notre développement dans les pays limitrophes comme la Suisse, l’Espagne ou la Belgique. Nous comptons ensuite déployer la marque en Afrique, en Amérique latine et en Chine. Aujourd’hui, il n’y a par exemple que 55 000 opticiens chinois alors qu’il en faudrait 250 000. Enfin, avec « Win-Win » permettant de payer ses lunettes mensuellement, nous avons créé une rupture commerciale. Porté par l’international, le groupe a réalisé 757 millions de chiffre d’affaires au 31 juillet 2015.
Propos recueillis par Sophia Sanni Soulé