Éric Rochereau, directeur administratif et financier, a réussi à opérer un véritable retournement chez Mecachrome.
Éric Rochereau (Mecachrome) : « La démystification de la finance a contribué à la sortie de crise »
Décideurs. Quelle est l’histoire de Mecachrome ?
Éric Rochereau. La société est née en 1937 dans la région parisienne. Son développement s’est fait dans l’aéronautique, plus précisément dans les structures et les moteurs. Ses principaux clients étaient et sont toujours Airbus, Safran ou encore Rolls-Royce. Dans les années 2000, l’entreprise s’est lancée dans l’automobile avec la production d’éléments moteurs de 800 à 1 000 véhicules par jour. Les difficultés du groupe ont commencé en 2008. Cette année-là, la réglementation de la compétition de Formule 1 a totalement changé. Les participants n’avaient plus le droit qu’à un nombre de moteurs limité par Grand Prix, ce qui en a réduit drastiquement la consommation par les écuries. En 2008, nous avons également été confrontés à un gel de développement des programmes A380 et A400M d’Airbus Group, alors que Mecachrome avait investi lourdement pendant plusieurs années. Nous nous étions aussi diversifiés sur beaucoup de produits, tels que des moteurs de moto et autres projets, avec un niveau de réussite plutôt faible. Toutes ces problématiques sont apparues dans un contexte conjoncturel sans précédent : la crise mondiale et le ralentissement des programmes aéronautiques. La trésorerie de Mecachrome s’est alors retrouvée sous fortes tensions, nous avions beaucoup de dettes et vingt-trois millions d’euros de charges financières par an.
Décideurs. Le groupe Mecachrome a connu, en 2009, une procédure de sauvegarde dont elle est sortie par le haut. Quelles ont été les étapes clés du sauvetage de l’entreprise ?
E. R. Toutes les filiales françaises du groupe sont entrées en procédure de sauvegarde en décembre 2008. Ce type de situation s’apparente, en quelque sorte, à un cancer : à l’annonce c’est un choc, puis commence un dur combat pour survivre. Nous avons communiqué avec les salariés, puis des avocats et les administrateurs judiciaires nous ont accompagnés. Un changement de gouvernance s’est opéré avec la nomination d’un président, Julio De Sousa, centré sur les valeurs de l’entreprise. C’était un combat du quotidien, on a arrêté toutes les projections. Un autre axe de travail a consisté à organiser le management, c’est-à- dire à disposer d’une équipe dédiée à la gestion de la procédure : les relations avec nos salariés, clients et fournisseurs ainsi que la communication interne et externe… Nous nous sommes attelés à reposer les fondamentaux de l’entreprise pour réussir. Le cash a été très important durant cette période et nous avons instauré une culture cash dans le groupe. Enfin, nous avons travaillé sur la sortie de la procédure avec trois actionnaires, avec la particularité de devoir la gérer en droits français et américain. Sur le plan administratif, il est plus facile d’entrer en procédure de sauvegarde que d’en sortir. Nous avons réussi un an après, en décembre 2009. 2010 a été une année de stabilisation pour le groupe. Nous sommes ensuite, en 2011, repartis à la conquête du marché, redevenus agressifs avec l’acquisition de Mecahers et en misant sur l’innovation. Nous avons, dans ce cadre, conclu un contrat stratégique avec Safran. Aujourd’hui, le groupe Mecachrome dépose une demi-douzaine de brevets tous les ans.
Décideurs. Quel a été, plus précisément, le rôle de la direction financière dans ce retournement ?
E. R. Je suis devenu directeur administratif et financier lors de l’entrée en procédure de sauvegarde ; j’étais auparavant responsable du contrôle de gestion. Le rôle de la direction financière a été très important dans la communication avec l’extérieur : nous avons rencontré nos fournisseurs pour leur expliquer la situation de l’entreprise et leur dire que nous avions la confiance de nos clients et que nos carnets de commandes étaient remplis. La direction financière s’est retrouvée, en quelque sorte, au four et au moulin. Elle a été leader de la procédure avec le président. La DAF a dû préparer le langage financier, le vulgariser pour le rendre compréhensible par tous. Nous avons par la suite construit un nouveau prévisionnel. Concernant le déploiement d’une culture cash dans l’entreprise, plusieurs actions ont été lancées. Nous avons proposé des formations à tous les salariés pour démystifier la finance et les imprégner de cette culture. Nous leur avons montré qu’ils avaient un rôle à jouer. Cela nous a permis de désendetter le groupe et de procéder à des réinvestissements.
Propos recueillis par Mathieu Marcinkiewicz
Éric Rochereau. La société est née en 1937 dans la région parisienne. Son développement s’est fait dans l’aéronautique, plus précisément dans les structures et les moteurs. Ses principaux clients étaient et sont toujours Airbus, Safran ou encore Rolls-Royce. Dans les années 2000, l’entreprise s’est lancée dans l’automobile avec la production d’éléments moteurs de 800 à 1 000 véhicules par jour. Les difficultés du groupe ont commencé en 2008. Cette année-là, la réglementation de la compétition de Formule 1 a totalement changé. Les participants n’avaient plus le droit qu’à un nombre de moteurs limité par Grand Prix, ce qui en a réduit drastiquement la consommation par les écuries. En 2008, nous avons également été confrontés à un gel de développement des programmes A380 et A400M d’Airbus Group, alors que Mecachrome avait investi lourdement pendant plusieurs années. Nous nous étions aussi diversifiés sur beaucoup de produits, tels que des moteurs de moto et autres projets, avec un niveau de réussite plutôt faible. Toutes ces problématiques sont apparues dans un contexte conjoncturel sans précédent : la crise mondiale et le ralentissement des programmes aéronautiques. La trésorerie de Mecachrome s’est alors retrouvée sous fortes tensions, nous avions beaucoup de dettes et vingt-trois millions d’euros de charges financières par an.
Décideurs. Le groupe Mecachrome a connu, en 2009, une procédure de sauvegarde dont elle est sortie par le haut. Quelles ont été les étapes clés du sauvetage de l’entreprise ?
E. R. Toutes les filiales françaises du groupe sont entrées en procédure de sauvegarde en décembre 2008. Ce type de situation s’apparente, en quelque sorte, à un cancer : à l’annonce c’est un choc, puis commence un dur combat pour survivre. Nous avons communiqué avec les salariés, puis des avocats et les administrateurs judiciaires nous ont accompagnés. Un changement de gouvernance s’est opéré avec la nomination d’un président, Julio De Sousa, centré sur les valeurs de l’entreprise. C’était un combat du quotidien, on a arrêté toutes les projections. Un autre axe de travail a consisté à organiser le management, c’est-à- dire à disposer d’une équipe dédiée à la gestion de la procédure : les relations avec nos salariés, clients et fournisseurs ainsi que la communication interne et externe… Nous nous sommes attelés à reposer les fondamentaux de l’entreprise pour réussir. Le cash a été très important durant cette période et nous avons instauré une culture cash dans le groupe. Enfin, nous avons travaillé sur la sortie de la procédure avec trois actionnaires, avec la particularité de devoir la gérer en droits français et américain. Sur le plan administratif, il est plus facile d’entrer en procédure de sauvegarde que d’en sortir. Nous avons réussi un an après, en décembre 2009. 2010 a été une année de stabilisation pour le groupe. Nous sommes ensuite, en 2011, repartis à la conquête du marché, redevenus agressifs avec l’acquisition de Mecahers et en misant sur l’innovation. Nous avons, dans ce cadre, conclu un contrat stratégique avec Safran. Aujourd’hui, le groupe Mecachrome dépose une demi-douzaine de brevets tous les ans.
Décideurs. Quel a été, plus précisément, le rôle de la direction financière dans ce retournement ?
E. R. Je suis devenu directeur administratif et financier lors de l’entrée en procédure de sauvegarde ; j’étais auparavant responsable du contrôle de gestion. Le rôle de la direction financière a été très important dans la communication avec l’extérieur : nous avons rencontré nos fournisseurs pour leur expliquer la situation de l’entreprise et leur dire que nous avions la confiance de nos clients et que nos carnets de commandes étaient remplis. La direction financière s’est retrouvée, en quelque sorte, au four et au moulin. Elle a été leader de la procédure avec le président. La DAF a dû préparer le langage financier, le vulgariser pour le rendre compréhensible par tous. Nous avons par la suite construit un nouveau prévisionnel. Concernant le déploiement d’une culture cash dans l’entreprise, plusieurs actions ont été lancées. Nous avons proposé des formations à tous les salariés pour démystifier la finance et les imprégner de cette culture. Nous leur avons montré qu’ils avaient un rôle à jouer. Cela nous a permis de désendetter le groupe et de procéder à des réinvestissements.
Propos recueillis par Mathieu Marcinkiewicz