Sandra Hazelart (Monoprix) : "Changer de regard sur l’évolution des métiers et des compétences"
Décideurs. La crise que nous venons de traverser a accéléré les mutations professionnelles. Vous avez choisi de mettre en place un dispositif Transco. Pourquoi ce choix ?
Sandra Hazelart. Depuis maintenant quelques années nous avons vu une accélération de la transformation de notre modèle commercial et de nos métiers avec un essor de la digitalisation, du e-commerce et de l’évolution de certaines missions. Cela implique d’appréhender différemment les évolutions des métiers et des fonctions et de changer de regard. Ce sujet s’est accru ces deux dernières années et nous prenons dorénavant en compte l’ensemble des compétences, savoir-faire et savoir être, d’un collaborateur et non son seul métier. Dans le cadre des entretiens annuels, l’accent est mis pour que les collaborateurs parlent d’eux, en dehors de leur métier. L’objectif étant de voir comment les projeter dans une autre fonction qui soit en accord avec ce qu’ils aiment dans leur vie professionnelle mais aussi personnelle
En janvier 2021, le Gouvernement a annoncé dans le cadre de son plan de relance le dispositif Transco qui permet de basculer des collaborateurs évoluant sur des métiers en décroissance vers des métiers en plein essor. Monoprix s’est alors rapproché du groupe Korian pour mettre en place un partenariat afin d’accompagner les collaborateurs qui exercent les métiers de l’encaissement vers le métier d’aide-soignant lorsqu’ils nous avaient indiqué dans leur entretien annuel, aimer être au contact des personnes âgées.
"La mise en place de ce dispositif n’a été possible que grâce à un dialogue social engagé, responsable et très constructif"
Concrètement comment fonctionne ce dispositif ?
Transco est un dispositif sécurisé qui permet à un collaborateur d’évoluer d’un secteur d’activité à un autre en conservant son CDI. Nous avons donc sélectionné tous ceux qui avaient fait part de leur volonté de travailler au contact des personnes âgées pour lancer un test avec Korian sur trois départements d’Ile-de-France. Nous avons organisé des réunions d’information ouvertes à tous les collaborateurs des départements concernés. Le dispositif propose une formation permettant aux collaborateurs d’obtenir un diplôme d’état dans un secteur porteur et en forte croissance avec un contrat à temps complet. La mise en place de ce dispositif n’a été possible que grâce à un dialogue social engagé et très constructif.
A date, près d’une quarantaine de collaborateurs ont démarré leur formation de 18 mois chez Korian. Pendant ce laps de temps ils restent salariés de Monoprix, sont rémunérés par Monoprix et peuvent revenir à tout moment. Dès le premier jour de leur formation, Korian leur propose une promesse d’embauche en CDI, sans période d’essai, valable dès l’obtention de leur diplôme au terme de leur formation. Ce dispositif a entrainé un réel engouement et nous avons une liste d’attente de collaborateurs désireux d’évoluer vers le métier d’aide-soignant. Pour 2022 nous ouvrons toute l’Ile-de-France, Marseille et Lyon. En parallèle nous sommes en discussion avec un acteur majeur de la petite enfance, un du bricolage et un de l’aménagement paysagé pour étendre ce dispositif.
"La mise en adéquation des métiers et des appétences des collaborateurs est indispensable"
Face à la pénurie de candidats, comment l'entreprise peut-elle attirer les talents ?
Tout l’enjeu est de rendre attractif nos métiers. Nos magasins sont ouverts tous les jours de la semaine (sauf le dimanche après-midi) et sur des plages horaires très larges. Comment alors être innovants ? Nous avons ouvert un chantier pour faire évoluer l’organisation avec des journées de repos entières et deux jours de repos consécutifs. La mise en adéquation des métiers et des appétences des collaborateurs est indispensable. Par ailleurs, la promotion interne fait partie de l’ADN de Monoprix, et des parcours évolutifs ont été mis en place.
Enfin, le point important chez Monoprix est d’aborder le collaborateur comme un individu à part entière et plus seulement un salarié. Cela passe par la mise en place de dispositifs d’aide au quotidien en proposant des services qui vont venir alléger la charge mentale : partenariat avec des entreprises proposant des gardes d’enfant, de l’aide aux devoirs etc..
Propos recueillis par Anne-Laure Blouet Patin