Elise Erbs (Electra) : “Il fallait être entrepreneuse"
Décideurs. Pouvez-vous revenir sur votre parcours ?
Elise Erbs. Mon parcours commence il y a quinze ans avec un master en finance à l’Edhec. Sans idée précise de ce que je voulais faire, j’ai rejoint la banque d’affaires américaine Morgan Stanley, six mois avant le début de la crise de 2008. Un peu par hasard, mon expérience démarre dans l’immobilier, dans l’équipe gestion d’actifs. J’y ai vécu le contexte de plein fouet : des équipes réduites à peau de chagrin, un quotidien marqué par la gestion de crise. Mon périmètre comprenait beaucoup de gestion financière puis d’actifs pour les fonds immobiliers de la banque. Au bout de 4 ans, j’ai souhaité être plus exposée et avoir accès aux décisions stratégiques. J’ai alors enchaîné avec une société française dédiée à l’immobilier, Mercialys en gestion d’actifs commerciaux. Après un an, la directrice financière de l’époque m’a proposé de devenir son adjointe pour l’aider à structurer les process de la foncière cotée. En 2014, pour réaliser plus de deals en immobilier, j’ai dévié du parcours "corporate" et intégré le cabinet de conseil PwC en Transaction Services pour assister les sociétés dans l’achat de portefeuilles immobiliers. Puis après trois ans chez eux, j’ai retrouvé un de mes anciens clients, le family office BMF, pour les accompagner dans la création de la branche immobilière du groupe. En un an et demi, j’avais constitué la base de la structure pour passer en phase de croissance, j’ai alors rallié le fonds WCP. L’équipe immobilière avait mené un "spin-off ", il y avait tout à reprendre. C’est aussi ce qui en fait d’ailleurs une constante dans mon parcours. Trois ans plus tard, j’ai eu envie de sortir de l’immobilier, et de me lancer dans une aventure différente, plus digitale et travailler sur des sujets structurants de souveraineté comme l’énergie et la mobilité. C’est ainsi que j’ai rejoint Electra en tant que DAF, où je m’occupe notamment des partenariats financiers, dont les levées de fonds, comme celle de 160 millions d’euros en juin 2022, et des co- investissements, mais également de la structuration des départements juridique, finance, comptable et RH.
Banque, fonds, cabinet de conseil, corporate, vous avez une carrière riche et atypique, quel point commun trouvez- vous entre toutes ces structures ?
Il fallait être entrepreneuse. De Morgan Stanley à Electra, je suis toujours arrivée à un moment où tout était à construire ou reconstruire, et créer une activité en partant de zéro. Évoluer dans un environnement complexe, savoir lever des fonds, coordonner les parties juridiques, fiscales et tous les métiers transverses, il fallait toujours être un bon business partner.
"Un directeur financier doit faire preuve de créativité."
Le moment phare de votre parcours ?
La labellisation French Tech Next40, un projet porté à bout de bras, que je considère comme une belle victoire. Il fallait réaliser un bilan carbone, avec peu de gens disponibles pour m’aider, des sujets très techniques, et surtout, nous ne l’avions jamais fait. Nous visions le label French Tech 120 et finalement nous avons été sélectionnés pour le Next40. Au-delà de ce que j’espérais!
C’est quoi un bon DAF ?
Le bon DAF est celui dont la société a besoin en fonction de sa maturité et de son secteur d’activité. Pour Electra, il fallait de bonnes compétences en levée de fonds, je n’aurais peut-être pas joué le même rôle dans une grande structure, qui a déjà de nombreux accès au capital. Comprendre son business et la curiosité sont indispensables pour devenir un bon DAF. Il doit être un bon problem solver, avoir cette vision transverse, déterminante dans la réussite d’une entreprise. Un directeur financier doit faire preuve de créativité. Mon approche, peut-être moins conventionnelle, me permet d’asseoir la confiance d’une équipe en créant de nouvelles solutions et de tout anticiper. Ce que nous avons accompli aujourd’hui en moins de deux ans est, je pense, très rare. Plein de belles choses restent à venir.
Parcours
- 2008 : sort diplômée de l’Edhec
- 2008 : intègre le département gestion d’actifs immobiliers de Morgan Stanley
- 2012 : arrive chez Mercialys et évolue rapidement en tant que Deputy CFO
- 2014 : rejoint le cabinet PwC en Transaction Services Immobilier
- 2017 : prend en main la création du pôle Immobilier du family office BMF
- 2018 : structure deux fonds AMF pour Weinberg Capital Partner en tant que COO
- 2021: DAF chez Electra
- 2023 : Electra intègre le Next40
Propos recueillis par Céline Toni