Fondée en 1982, Dutscher s’est spécialisée dans la distribution de consommables et de matériels de laboratoire destinés à la recherche, aux biotechnologies et à la santé. En 2020, LBO France acquiert la majorité du capital du distributeur strasbourgeois. Depuis, le fonds accompagne le développement paneuropéen du groupe à travers les axes industriels et géographiques. Le point avec Dominique Wencker, président du groupe Dutscher et Eva Hoël, managing director, LBO mid-cap de LBO France.
Eva Hoël (LBO France) : "Depuis mi-2020, le management a racheté 9 sociétés"
Décideurs. Pourquoi LBO France a-t-il fait le choix d’investir dans Dutscher ?
Eva Hoël. Nous avons d’abord été séduits par la capacité démontrée du groupe à croître en organique comme en externe au niveau européen. Nous nous sommes ensuite forgé la conviction que ces tendances allaient se poursuivre et que l’équipe de management était taillée pour ce projet.
Pour ce qui est de la croissance organique, la société bénéficie de marchés sous-jacents (santé et biotechnologies) porteurs et d’une taille lui permettant de proposer tous les produits que ses clients recherchent avec une qualité de services inégalée.
Concernant la croissance externe, lors de notre investissement, Dutscher était déjà familiarisé avec le développement par le M&A, en particulier pour les besoins de leur expansion internationale. Plus de 55 % du chiffre d’affaires étaient réalisés hors de France avec une présence significative au Royaume-Uni et au sud de l’Europe. Une piste toute tracée sur laquelle nous voulions aussi les accompagner.
Enfin, nous avons eu la chance de pouvoir nous forger une conviction sur la qualité du management en amont de l’investissement. Ce n’est pas toujours chose aisée car nous intervenons souvent dans des transactions encadrées où les échanges sont très balisés. C’était le cas ici aussi mais la particularité est que Dutscher, pour accompagner sa croissance, avait eu à faire face à un projet opérationnel plus difficile qu’anticipé et s’apprêtait à s’engager dans un autre tout aussi important. Ces situations opérationnelles ne sont pas sans risque. Notre avantage chez LBO France est de pouvoir les évaluer. Nous avons une équipe composée de profils opérationnels pointus qui participent à l’analyse des opportunités et s’engagent dans la durée puisqu’ils sont aussi là après l’investissement pour les accompagner. C’est la qualité des échanges que nous avons eus sur ces sujets avec le management qui nous a confortés dans sa solidité.
"Les équipes de LBO France sont à la fois peu interventionnistes dans l’opérationnel et à la fois supportrices" Dominique Wencker
Comment se répartissent les rôles dans le cadre de ce partenariat ?
Dominique Wencker. La collaboration se déroule parfaitement, en confiance, et les équipes de LBO France sont à la fois peu interventionnistes dans l’opérationnel et à la fois supportrices. Des experts LBO viennent nous accompagner pour mettre sur pied certains projets et nous bénéficions de leur conseils grâce à leur expérience dans d’autres sociétés de leur portefeuille. Cela a notamment été le cas sur le digital qui avait été initié par nos équipes internes, mais où l’aide du fonds a permis de passer un cap supplémentaire. De même, sur des problématiques d’approvisionnement, de stocks ou de seuils d’alerte, qui sont des sujets très techniques et qui prouvent que les équipes de LBO France ont de multiples compétences et expertises. Pour l’ESG, elles ont apporté un soutien précieux dans la formalisation des outils de pilotage et de suivi.
E. H. Au sein de LBO France, pour la stratégie d’investissement Midcap BuyOut, l’équipe s’est élargie il y a 10 ans avec des profils opérationnels complémentaires aux profils classiques d’investisseurs. Au début de l’aventure, certains managers s’interrogeaient sur ce dispositif. Depuis, les retours sont très positifs. Quand on dit qu’on accompagne les managers, cela signifie bien sûr qu’on oriente sur le plan stratégique, qu’on aide sur le financement mais aussi qu’on partage les soucis opérationnels dans une recherche constante de solutions. Nos interventions se font au cas par cas, selon des modalités toujours convenues avec le management. En moyenne notre équipe passe plus de la moitié du temps avec les managers sur des sujets variés comme ceux mentionnés par Dominique.
"Nos interventions se font au cas par cas, selon des modalités toujours convenues avec le management" Eva Hoël
Quels ont été les biais de développement ?
E. H. Notre ambition, aux côtés du management, a été de faire du groupe la première plateforme européenne de distribution de matériels de laboratoire. Le projet était déjà sur les rails lors de notre prise de participation et nous nous sommes alliés pour aller encore plus loin. Depuis mi-2020, le management a racheté 9 sociétés sur une zone géographique allant des pays baltes à l’Irlande. Pas de biais donc par rapport au plan d’origine si ce n’est qu’entretemps la société a bénéficié d’un surcroît d’activité lié à la crise sanitaire et que cet effet conjoncturel – aujourd’hui résorbé – a permis de financer de nombreuses initiatives de croissance.
D. W. Dans notre stratégie de build-up, nous avons été agréablement surpris par la capacité de LBO France à savoir dire "oui" ou "non" très rapidement. Et pour l’instant, cela a toujours été « oui ». Dans des process d’acquisition, qui peuvent parfois aller très vite, une telle réactivité est vraiment appréciable.
"Notre ambition, aux côtés du management, a été de faire du groupe la première plateforme européenne de distribution de matériels de laboratoire" Eva Hoël
Pourquoi avez-vous choisi d’être accompagnés par ce fonds ?
D. W. Tout d’abord, le choix d’un fonds de private equity pour nous accompagner dans notre croissance externe avait beaucoup de sens compte tenu de nos objectifs ambitieux en la matière. Nous souhaitions partager avec notre partenaire notre vision du build-up qui n’est pas forcément celle de tout investisseur.
De plus, il était important et intéressant pour le management de conserver sa liberté d’action et d’éviter des ingérences dans ses tâches opérationnelles quotidiennes. Nous avons trouvé cette même vision chez les équipes de LBO France, qui ont aussi le mérite de cumuler compétences techniques et un capital sympathie. C’est toujours mieux pour travailler ensemble.y
"Nous souhaitions partager avec notre partenaire notre vision du build-up qui n’est pas forcément celle de tout investisseur" Dominique Wencker
Quelles sont vos ambitions ?
D. W. Aujourd’hui, le client va davantage nous juger sur la qualité de notre service que sur le produit lui-même. Nous sommes un distributeur multi-marque, et le client peut donc acquérir les mêmes équipements chez un concurrent. En revanche, le service Dutscher, il ne le trouvera que chez Dutscher Nous continuons donc de travailler à l’amélioration continue, à offrir des prestations uniques, originales et appréciées, pour faire la différence. Cela passe aussi par une communication active et un peu décalée, instantanément reconnaissable, souvent teintée d’humour. Je vous invite à jeter un œil à nos catalogues au visuel de bandes dessinées ! Nous essayons de ne pas nous prendre au sérieux tout en restant professionnels, et cela nous distingue dans le milieu de la Recherche où nous bénéficions d’une forte et excellente image.
Enfin, nous maintenons notre stratégie axée sur la croissance organique et la croissance externe en nous positionnant sur de nouveaux marchés, de nouveaux projets et de nouveaux pays. Les opportunités sont très nombreuses, il faut savoir les saisir.
🔎 À la loupe
- Entrée de LBO France : 2020
- Chiffre d’affaires du groupe : environ 400 millions d’euros
- Ebitda : a doublé en organique depuis l’acquisition
- Effectif : 1 000 personnes
- Implantations : France, Espagne, Royaume-Uni, Irlande, Suisse, Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Italie, Slovaquie, République tchèque, Lituanie, Danemark
Propos recueillis par Béatrice Constans