La locomotive chinoise en perte de vitesse
La crise sanitaire et ses conséquences permettent à la Chine de mettre en avant son industrie. Avec la nécessité croissante de produits pharmaceutiques, textiles et autres équipements informatiques, les exportations chinoises ont permis à ce pays d’être l’un des rares à avoir eu une croissance économique en 2020. L'année 2021 a cependant été marquée par un fort ralentissement de l’activité, avec des variations du PIB réel trimestriel évaluées à +0,5% en moyenne, contre 1,6% par trimestre entre 2014 et 2019.
Comprendre le ralentissement économique chinois
Plusieurs facteurs expliquent cette situation. Le vieillissement de la population est l'un des principaux. Comme en Occident, la Chine connaît un "papy-boom". La part des 15-64 ans, dans la population est en recul depuis 2010. Ensuite joue l’épuisement des effets de rattrapage. Le modèle de Solow explique qu’un pays en voie de développement a un stock de capital bien inférieur à sa force de travail. Puis, grâce à l’investissement et au progrès technique, le taux de croissance du capital rattrape le taux de croissance du travail.
Un tiers des promoteurs immobiliers chinois seraient au bord de la faillite
Cependant, les investissements extérieurs ou intérieurs croissent de moins en moins. Le Service économique régional de Pékin explique en partie cet affaissement de l’investissement par les restrictions pesant sur le secteur de l’immobilier, où un tiers des promoteurs immobiliers chinois seraient au bord de la faillite. La dette a principalement financé ce secteur, maintenant menacé de crise, ce qui oblige le gouvernement de Xi Jinping à intervenir. L’interventionnisme du régime avec les tours de vis réglementaires envers les entreprises privées se répercute nécessairement sur les investissements, et donc sur la croissance. Plus concrètement, cela se traduit par la baisse des indices pmi manufacturier et non manufacturier en 2021.
Les répercussions chez les partenaires chinois
Ce ralentissement de l’activité conduit nécessairement à un affaiblissement du commerce extérieur, particulièrement avec les pays asiatiques car leurs chaînes d’approvisionnement sont étroitement imbriquées. Des pays comme la Malaisie ou le Vietnam ont une part des exportations vers la Chine dans leur PIB de 20 % et sont donc les plus sensibles aux évolutions économiques de la deuxième économie mondiale. De même, des pays d’Afrique comme l’Angola ou du Golfe, exportateurs de matières premières, se voient pénalisés. Natixis a étudié l’élasticité des exportations vers la Chine en fonction de sa croissance et explique que les pays les plus impactés seraient les économies émergentes exportatrices de matière première, pétrole compris.
L'UE a été le principal bénéficiaire des investissements chinois entre 2005 et 2019
Concernant l’Occident, l’Union européenne a été le principal bénéficiaire des investissements chinois entre 2005 et 2019, avec 15 % des flux financiers chinois cumulés. Les pays les plus industrialisés, comme l’Allemagne ou la Suède, souffriraient donc le plus d’un ralentissement de l’activité chinoise. Cependant, la Chine étant financièrement peu connectée avec le reste du monde, une éventuelle crise n’aurait un impact que modéré sur la finance mondiale. Cela étant dit, et à l’instar de l’Europe des années 1970 ou du Japon des années 1990, l’histoire a montré que la transition d’une économie en rattrapage vers une économie mature ne s’est jamais faite sans crise réelle.
Clément Redon