HY24, la joint-venture du futur
Philippe Boucly, président de France Hydrogène, l’affirmait récemment haut et fort dans un entretien accordé à Décideurs : "Sans l’hydrogène, on ne réussira pas la transition énergétique." Un avis qui semble partagé aussi bien par les pouvoirs publics, qui rivalisent de plans ambitieux, que par les industriels, qui se ruent ces derniers mois sur ce qui ressemble chaque jour un peu plus à un nouvel eldorado énergétique. Hy24 en est la dernière illustration.
Un pour tous, tous pour l’hydrogène
Le fonds est le résultat d’initiatives distinctes menées par deux groupes d’investisseurs, Air Liquide, TotalEnergies et Vinci d’une part, chacun engagé à hauteur de 100 millions d’euros, et Plug Power, Chart Industries et Baker Hughes d’autre part. Lotte Chemical, grand groupe industriel coréen, a également confirmé son intention de rejoindre la nouvelle structure en tant qu’investisseur de référence, tout comme AXA. Des acteurs tels que Groupe ADP, Ballard, EDF ou Schaeffler se joindront bientôt à l’initiative, et d’autres devraient suivre.
L’intérêt est grand et la tâche immense : selon l’étude New Energy Outlook de BloombergNEF, les investissements dans l’hydrogène nécessaires pour atteindre les objectifs nets zéro d’ici à 2050 s’élèvent jusqu’à 100 000 milliards de dollars. C’est pourquoi, selon Patrick Pouyanné, PDG de TotalEnergies, "un effort collectif s’impose pour donner l’impulsion à la filière". Un état d’esprit partagé par Benoît Potier, PDG d’Air Liquide : "Le temps est aujourd’hui à l’action, non seulement à l’échelle de chaque entreprise, mais aussi en unissant nos forces, avec les États, d’autres acteurs industriels et la communauté financière. Avec la création de ce fonds, nous démontrons notre capacité à mettre en œuvre une dynamique collective."
Les investissements dans l’hydrogène nécessaires pour atteindre les objectifs nets zéro d’ici à 2050 s’élèvent jusqu’à 100 000 milliards de dollars
Impact
Conçu comme un fonds à impact, Hy24 vise à faire passer à l’échelle des projets et technologies en construisant les infrastructures énergétiques de demain. Son portefeuille se veut diversifié, aussi bien sur le plan géographique qu’au niveau de la chaîne de valeur : de la production de l’hydrogène décarboné aux stations de distribution et de recharge. Pour Mathias Burghardt, responsable de l’activité infrastructure d’Ardian et membre du comité exécutif, "la création et la gestion d’une telle plateforme est une immense responsabilité et une belle ambition. Nous sommes persuadés que Hy24 saura jouer un rôle déterminant dans l’accélération du déploiement de l’hydrogène, nécessaire à la décarbonation de nos économies." Un enthousiasme partagé par Pierre-Étienne Franc, cofondateur et CEO de Five T Hydrogen : "Nous anticipons que le fonds devrait mobiliser des investissements de l’ordre de 15 milliards d’euros, une somme qui serait un réel catalyseur pour la croissance de l’industrie." Tant par l’ampleur des sommes levées que par l’importance et la diversité des acteurs qui la soutiennent, cette joint-venture pourrait bien constituer un tournant historique pour les technologies hydrogènes dont le déficit d’infrastructures constitue encore un frein majeur.
Antoine Morlighem