Amundi lance son quatrième fonds de dette privée pour les ETI européennes. Le gestionnaire d’actifs bénéficie d’ores et déjà de 650 millions d’euros d’engagement pour ce nouveau millésime estampillé « impact ». Thierry Vallière, directeur des activités de dette privée, détaille les objectifs du dernier véhicule.

Décideurs. Le dernier fonds de dette privée n’est pas la première génération à impact dans la galaxie Amundi. En quoi se différencie-t-il ?

Thierry Vallière. En effet, dans le cadre des plans d’initiative Relance durable France, soutenus par la Fédération française de l’assurance (FFA) et la Caisse des dépôts (CDC), nous avions lancé à l’automne 2020 un premier fonds à impact. Destiné aux sociétés françaises réalisant jusqu’à 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires, « Initiative Impact 2020 » a récolté 157 millions d’euros témoignant de l’appétit pour ce type d’investissement.

Le quatrième millésime consacré au financement des entreprises, « Amundi Senior Impact Debt IV », vise les ETI européennes. Si les financements à impact représentaient 15 à 20 % des transactions réalisées par Amundi en 2020, nous n’en faisions pas la promotion. Depuis le début de l’année, ils représentent une opération sur trois et l’an prochain, le taux devrait atteindre 50 %.

Qu’entendez-vous par impact ? Quelles sont la définition et les contours de la notion d’impact ?

Le financement à impact a vocation à accompagner l’entreprise dans l’amélioration de ses pratiques environnementales, sociales et de gouvernance (ESG). Ainsi, nous menons des due diligences en la matière, de la même manière que pour les analyses de crédit ou de risques. Les discussions avec le management aboutissent à la sélection de critères pertinents et suffisamment ambitieux pour que l’entreprise mette en œuvre des plans d’amélioration sur ceux retenus. À titre d’exemple, nous avons investi dans une société du domaine médical qui formait son personnel à l’entrée, mais sans suivi régulier. Un certain nombre de KPI [key performance indicators, NdlR] ont été établis, avec une montée en puissance tout au long du financement. Ceux-ci s’adaptent aux secteurs, et peuvent avoir trait à la réduction de l’empreinte carbone, à la création d’emplois, la formation, notamment.

Comment suivez-vous les différents critères ?

Depuis 2014, l’équipe dette privée dispose d’analystes dédiés aux sujets environnementaux, sociaux et de gouvernance. Ils assurent les due diligences et le suivi des entreprises en portefeuille, grâce aux rencontres avec le management et une présence à nos comités d’investissement. La première étape consistait en l’exclusion de certains secteurs, par exemple en raison de risques sanitaires ou d’empreinte carbone trop élevée. La deuxième portait sur l’atténuation des risques identifiés lors des due diligences à travers un encadrement documentaire. La troisième phase est celle de l’accompagnement des entreprises avec lesquelles nous fixons des objectifs extra-financiers. Ceux-ci fonctionnent comme les covenants financiers et la réduction de marge peut aller jusqu’à 15 points de base si les ratios établis sont atteints. Nous sommes convaincus que d’ici 5 à 10 ans, les risques ESG pesant sur l’entreprise seront intégrés dans les risques financiers et les marchés valoriseront le crédit en conséquence.

"Les objectifs extra-financiers fonctionnent comme les covenants financiers"

Sur quelle tranche de la structure du capital vous positionnez-vous ? Pour quel rendement ?

Le positionnement de nos fonds reste le même sur nos trois précédentes générations. Il s’agit de dette senior avec un objectif de rendement proche de 4,5 %. En outre, nous sommes agnostiques sur la typologie de situation et pouvons accompagner une société, qu’elle soit privée, cotée ou sous LBO. Dans ce dernier cas, les clients sont de plus en plus attentifs aux critères ESG, notamment du fait des évolutions réglementaires. Certaines entreprises sont déjà formatées en ce sens et voient l’intérêt de la réduction du coût du financement. Pour les moins avancées en la matière, la dette à impact contribue à financer une partie du plan, les investisseurs acceptant de perdre une partie de la marge afin d’avoir en portefeuille des entreprises avec les meilleures pratiques ESG.

L’investissement à impact relève d’une véritable demande des institutionnels, sur l’equity comme la dette. L’implication d’Amundi en la matière est-elle un modèle précurseur ?

Lors du lancement du premier fonds de dette privée en 2012, les sujets ESG n’étaient pas encore pris en compte. Mais nous les avons rapidement intégrés et systématisés à partir de 2014 à la demande d’un client. Ce qui était assez précurseur à l’époque. Naturellement, il a alors fallu adapter la méthodologie à la typologie des sociétés rencontrées. Progressivement, et c’est une très bonne chose, la plupart des acteurs se saisissent du sujet. L’impact consiste à pousser les entreprises à mieux faire en matière d’ESG. Et si c’est le cas, elles en ressortent également gagnantes financièrement.

Propos recueillis par Anne-Gabrielle Mangeret

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