Hip hip hip, IPO
Depuis le succès remarquable de l’introduction en Bourse de la Française des Jeux (FDJ) fin 2019 qui avait été couronnée du titre de la plus grande privatisation française depuis plus de dix ans grâce à une levée de 1,83 milliard d'euros, on s’ennuyait ferme. Ni les 300 millions d’euros levés par 2MX Organic, ni le Spac du trio Niel-Zouari-Pigasse au mois de décembre 2020, n’ont réussi à sauver le millésime. À défaut, ils auront peut-être secoué la torpeur ambiante.
Les introductions en Bourse traditionnelles reprennent du poil de la bête
Au premier semestre 2021, pas moins de 1 070 introductions en Bourse – hors Spacs – ont permis de lever 222 milliards de dollars dans le monde, soit une augmentation respective de 150 % et de 215 % par rapport à l'année précédente, selon une étude du cabinet EY. Un soulagement pour le marché pour lequel l’année 2020 avait fait figure d’annus horribilis. "Si le premier trimestre 2021 a été dominé par les introductions en Bourse des Spacs, celles traditionnelles sont revenues sur le devant de la scène au deuxième trimestre, aidées par un certain nombre de facteurs, notamment l'abondance de liquidités dans les systèmes financiers et la bonne performance des marchés boursiers mondiaux", explique Franck Sebag, associé EY, Fast Growing Companies Leader France.
En France, c’est l’IPO d’Aramis Group qui aura été la plus significative depuis celle de la FDJ. Filiale de Stellanis et leader européen de la vente en ligne de voitures d'occasion, elle a pu lever près de 390 millions d'euros avant l’été. Juste avant elle, la start-up Believe, spécialisée dans la distribution numérique de musique, avait réussi à récolter 300 millions d'euros lors de son entrée sur Euronext Paris. Paris Europlace, qui travaille sur l’amélioration de l’attractivité de la Place de Paris pour les entreprises émettrices, se félicite de cette "très nette progression des introductions en Bourse au cours de la période récente".
Un rythme qui devrait se maintenir pour la seconde moitié de l’année notamment grâce à OVH, leader français et européen du cloud, qui a confirmé avant la période estivale son intention de lancer son entrée en Bourse à l’automne mais aussi avec les cotations attendues de Colis Privé, Ogury ou encore GreenYellow.
"Au premier semestre 2021, 1 070 introductions en Bourse – hors Spacs – ont permis de lever 222 milliards de dollars dans le monde"
Les Spacs toujours florissants
Après avoir fait couler beaucoup d’encre depuis leur arrivée sur les marchés français, les Spacs continuent de dynamiser les introductions en Bourse. Mediawan, tout premier Spac français lancé en 2016 avait inauguré la tendance dans l’Hexagone de ces véhicules d’investissement atypiques, ultrapopulaires outre-Atlantique, qui, depuis, s’est poursuivie.
Le mois de juin 2021 a d’ailleurs été particulièrement intense avec les introductions en Bourse de Transition, premier Spac européen dédié à la transition énergétique, qui a levé 215 millions d'euros mais aussi de DEE Tech, tout premier Spac consacré au secteur technologique en France, lui permettant de récolter 165 millions d'euros. Avant ce doublé gagnant, Accor avait réalisé fin mai l’introduction d’Accor Acquisition Company (AAC), premier Spac sponsorisé par une société en Bourse de Paris, lui permettant de lever 300 millions d'euros. Au mois de juillet, I2PO, le premier Spac européen consacré au divertissement et aux loisirs, créé par la famille Pinault, le banquier d’affaires Matthieu Pigasse et Iris Knobloch, ancienne dirigeante de WarnerMedia, est devenu le sixième véhicule d’acquisition côté sur la place de Paris et ne risque pas de rester le dernier.
Une dynamique à surveiller de près au regard du contrecoup subi aux États-Unis par ces véhicules d’investissements qui commencent à éveiller craintes, suspicions et, surtout, litiges. L’Autorité des marchés financiers (AMF) a d’ailleurs publié début juillet une étude détaillée sur les avantages et les risques de ce dispositif, notamment en matière de conflits d’intérêts. L’engouement qu’ils ont engendré depuis plusieurs mois a beau être justifié, seul un encadrement strict et régulé leur permettra de s’inscrire dans la durée.
Béatrice Constans