Nouveau rebondissement dans l’affaire Veolia-Suez après l’offre d’Ardian et GIP
Un nouveau scénario dans l’affaire Veolia-Suez se dessine. Après un semblant d’apaisement entre les deux groupes, parvenant à négocier la préservation de Suez France qui aurait été racheté par Meridiam, un nouveau rebondissement rend le tableau final plus trouble encore. Les deux fonds d’investissement Ardian et GIP ont déposé samedi une offre "ferme et engageante" pour le rachat d’une partie de Suez. Une proposition "reçue et acceptée à l'unanimité par le conseil d'administration", précise le groupe, premier fournisseur privé d’eau dans le monde.
Une offre sous condition
Les activités comprises dans cet éventuel rachat regroupent les activités françaises d’eau ainsi que le recyclage et la valorisation mais aussi d’autres activités internationales d’eau et technologie. D’un montant de 11,9 milliards d’euros, l’offre valorise le groupe à vingt euros par action, soit un peu plus que celle émise par Veolia. Le consortium, s’il concluait cette opération, s’attribuerait une part du groupe Suez avec un Ebitda de 1,7 milliard d’euros et générerait 9,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an, soit près de la moitié de celui de l’ensemble du groupe.
L’opération reste soumise à conditions. Veolia devra notamment donner son aval concernant le périmètre de Suez à même d’être racheté par les deux fonds. Un cadre "susceptible de bouger pendant les négociations avec Veolia. Mais [qui] a été défini pour être viable sur le long terme et compatible avec le projet de Veolia", précise Bertrand Camus, directeur général de Suez. Son président, Philippe Varin affirme être prêt à "engager une négociation dès aujourd'hui pour sortir de l'impasse actuelle et souhaite que Veolia réponde favorablement à cette proposition constructive", qu’il estime "respectueuse des parties prenantes". Une affirmation qui n’est pas du goût de Veolia qui se voit contraint de négocier une offre avec un périmètre réduit et un montant revu à la hausse.
En cas de retrait de Veolia dans les six prochains mois, les deux fonds pourraient déposer une offre de rachat à 100 % du groupe Suez, toujours au prix de vingt euros par action.
Suez accentue la pression sur Veolia
Afin de ne pas simplifier la tâche à Veolia et tenter de le convaincre d’accepter ses termes, le groupe Suez a par ailleurs menacé d’accélérer son plan stratégique pour 2030 dès le 20 avril prochain si les négociations n’aboutissent pas d’ici-là. Une telle accélération pourrait impliquer un nombre grandissant de cession d’activités, réduisant de fait le les actifs que Veolia espérait reprendre.
En outre, le conseil d’administration de Suez a décidé de "rendre définitif jusqu'en septembre 2024 le dispositif de préservation de l'activité Eau France au sein du groupe" par le biais de la fondation néerlandaise qui rend Suez Eau France inaliénable. Cette manœuvre empêcherait Veolia de vendre cette partie du groupe en cas de succès de son OPA. Une situation paradoxale alors que la vente de ces activités par Veolia vise notamment à éviter les sujets d’anti-trust au moment de la fusion.
Veolia ne change pas de cap
De son côté, Veolia, qui avait annoncé ses conditions de négociation dix jours plus tôt, martèle que le groupe "ne vendra pas ni n'échangera sa participation de 29,9 % au capital de Suez ; l'offre publique d'achat déposée par Veolia demeure irrévocable même après l'activation de l'entité néerlandaise et c'est la seule à porter sur l'ensemble du capital de Suez". Il exige notamment que son partenaire Meridiam demeure à même de racheter les activités de Suez en France et demande à ce que la fondation néerlandaise soit levée. Antoine Frérot, PDG de Veolia, a déclaré "demander en justice la suspension des effets de l'activation de la fondation jusqu'à la prochaine assemblée générale de Suez, où les actionnaires trancheront".
La conclusion de cette affaire continue donc de se faire attendre et les deux acteurs semblent plus que jamais dans l’impasse. Suez veut se soustraire à l’OPA de Veolia qui ne semble pas prêt à plus de concessions qu’il n’en a accepté aux dernières négociations.
David Glaser