Les 20 % des parts du groupe Le Monde libre, holding majoritaire du quotidien français, mises en vente par le groupe espagnol Prisa, cristallisent l’attention depuis quelques semaines. Matthieu Pigasse et Daniel Kretinsky, qui détiennent déjà des parts de LML, sont entrés en phase de négociations exclusives.

Démarche « hostile » pour certains, volonté de lutter contre les Gafa pour le magnat tchèque Daniel Kretinsky, une chose est sûre, la tension est montée d’un cran entre les actionnaires de LML. La holding, qui détient 75 % des parts du groupe Le Monde, pourrait en effet voir sa structure chamboulée par la montée en puissance de Daniel Kretinsky à son capital. Loin d’être étranger à cette ascension progressive, Matthieu Pigasse, co-actionnaire du groupe Le Monde, avait en effet cédé 49 % des parts du Nouveau Monde, holding minoritaire de LML, à l’homme d’affaires tchèque. Cet épisode, considéré à l’époque comme un passage en force par le pôle d’indépendance du « Monde », fait écho alors que Matthieu Pigasse et Daniel Kretinsky entrent en négociations exclusives avec Prisa pour racheter sa part (20 %) au capital de LML. En cas d’accomplissement, cette opération permettra au duo Pigasse-Kretinsky de voir sa participation passer d’environ 26 % à 46 %. De quoi susciter l’inquiétude de Xavier Niel, l’autre co-actionnaire du Monde, qui ne serait plus le premier actionnaire de référence.

Droit d’agrément : une attente vaine ?

À la suite de son entrée surprise au capital du groupe Le Monde Nouveau, le milliardaire tchèque a provoqué une levée de boucliers menant à une demande d’obtention de droit d’agrément de la part de la Société des rédacteurs du Monde et plus généralement de l’ensemble du pôle d’indépendance. Ce droit de veto leur permettrait de statuer sur l’arrivée de tout actionnaire souhaitant diriger le groupe de presse aux côtés de Xavier Niel et de Matthieu Pigasse. Or comme nous l’avons précisé, c’est de manière indirecte, via la holding détenue par Matthieu Pigasse « Le Nouveau Monde », que Daniel Kretinsky a entamé sa montée au capital de LML l’année dernière. C’est également via cette société qu’il compte racheter les parts de Prisa. Bien que la structure commandite du groupe « Le Monde libre » ne permette pas aux actions détenues par la société espagnole d’être contrôlante, cette opération est considérée comme « hostile » par la Société des rédacteurs et Xavier Niel qui reprochent à l’homme d’affaires tchèque de tenir un double discours. Selon ces derniers, Daniel Kretinsky affirme attendre l’obtention du droit d’agrément tout en grimpant petit à petit au capital de LML. De son côté le Tchèque assure préserver l’indépendance du journal et explique, dans Les Echos, qu’il a choisi la France et les médias tricolores afin d’avoir un poids pour contrer la non-régulation des Gafa. Xavier Niel et Matthieu Pigasse restent encore aujourd’hui les deux actionnaires co-contrôlant du Monde. Si le banquier d’affaires français se décidait à vendre la totalité des parts de sa holding à Daniel Kretinsky, ce dernier deviendrait alors, de fait, un actionnaire de co-contrôle du Monde.

Sandy Andrianabiby

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