Priorité 2019 du directeur financier : Le pilotage de la performance (3/6)
Afin de définir les enjeux actuels de la profession, 300 directeurs financiers venant de tous les secteurs et travaillant pour des PME, des ETI ou de grandes entreprises ont répondu au questionnaire en ligne proposé par PwC. L’étude du cabinet d’audit et de conseil comprend aussi l’interview de plus de 80 DAF et deux tables rondes organisées en collaboration avec la DFCG. Six grandes priorités ressortent de l’enquête : le pilotage de la performance, la contribution à la stratégie de croissance, la gestion du cash, l’optimisation des processus, la maîtrise des risques et la gestion des talents.
Le pilotage de la performance en tête
Déjà classé premier en 2018, le pilotage de la performance demeure aujourd’hui la principale priorité des DAF. Au sein des grandes entreprises, les directeurs financiers considèrent que cette tendance se vérifiera encore en 2021. Le pilotage de la performance constitue en effet un enjeu de taille pour les directions financières. Il requiert en amont (dans la phase d’analyse) toujours plus d’anticipation, d’agilité et d’instantanéité afin d’adopter la meilleure stratégie pour son entreprise. En aval, dans la phase décisionnelle, il est attendu du DAF qu’il ait la capacité de communiquer et d’instaurer un dialogue de gestion pour que les métiers adhèrent aux différents projets de l’entreprise.
Vision aiguisée
Au centre des préoccupations des directions financières le terme de « pilotage » sous-entend une amplification du champs de vision des DAF qui s’est amorcée depuis maintenant quelques années. Lors du Sommet des leaders de la finance qui s’est tenu le 11 avril 2019, Patrick Vizet, directeur général de PerfectSight résume cette tendance : « Avant, les directeurs financiers ne voyaient que le rétroviseur, aujourd’hui avec la digitalisation et les avancées technologiques, ils peuvent commencer à se tourner vers la route. » Plus de 80% des financiers interrogés par PwC estiment par ailleurs que la visibilité élargie de l’horizon financier et extra-financier de l’entreprise passe par l’amélioration de la qualité des informations et des analyses. Dans cette quête de précison, les avancées technologiques jouent un rôle ambivalent en décuplant d’une part la vitesse de traitement des données tout en multipliant d’autre part le volume de ces mêmes données et ce de manière considérable.
Ajuster, calibrer, adapter
Une fois absorbée et analysée, la data revêt le caractère d’une information à valeur ajoutée nécessaire pour les décisions stratégiques de l’entreprise et utile aux différents métiers. Dès lors, la créativité des DAF entre en jeu pour d’une part faire ressortir les informations les plus pertinentes et pour d’autre part s’adapter à un environnement réglementaire qui ne cesse de changer. La mise à jour des indicateurs clés de la performance démontre par exemple cette nécessité d’adaptation continue des DAF. Philippe Garin, directeur financier de Korian, précise : « Avec les évolutions réglementaires, certains de nos KPI vont très vite devenir obsolètes. Leur redéfinition à court terme est un enjeu pour la direction financière et les métiers. » Nathalie Pivet qui exerce chez EDF ajoute : « Les règles groupe peuvent être parfois trop contraignantes et imposer des indicateurs financiers uniques à des métiers très différents. Si l'on souhaite optimiser la pertinence des analyses et le pilotage financier, il est nécessaire d'avoir des KPI spécifiques par métier et de partager l'information rapidement en la dé-silotant. » La créativité se retrouve aussi dans le pilotage budgétaire, outil de gestion incontournable des directeurs financiers. Ainsi, 43 % des DAF affirment appliquer le rolling forecast, méthode où le processus budgétaire s’effectue sur une période glissante et non plus fixé pour le 31 décembre.
L’art de communiquer
Dès lors que les leviers de croissance ont été identifiés, la communication et le dialogue de gestion apparaissent comme nécessaires afin d’éclairer et conseiller les métiers pour améliorer la performance de l’entreprise. Les DAF doivent en effet avoir la capacité d’embarquer les équipes dans les projets de l’entreprise. « Nous mobilisons nos efforts sur l’avenir. Nous voulons faire vite et faire simple : les nouveaux outils que nous mettons en place ont pour but de rendre l’information plus disponible et plus précise pour les opérationnels », affirme Philippe Leclercq directeur financier de Sagemcom. Face à cet élargissement du domaine de compétence des directeurs financiers, les écueils sont nombreux. Les moitié directeurs financiers interrogés placent la résistance aux évolutions en première ligne des obstacles. Luc Peligry, directeur financier d’Europcar Mobility France ajoute : « Un des challenges majeurs que l’on rencontre pour aller vers la finance du futur est de parvenir à motiver les équipes tout en les faisant évoluer dans leur propre poste. La réticence au changement est un paramètre important à prendre en compte. » Ainsi, quelles que soient les qualités intrinsèques du DAF, si celui-ci ne sait pas communiquer, il sera automatiquement désavantagé.
Sandy Andrianabiby