L.Pruvost (In'Tech Medical) : "Les fonds ont parfois mauvaise presse mais ont été salutaires"
Décideurs. Comment avez-vous financé votre première phase de croissance ?
Laurent Pruvost. Depuis sa création, le développement d’In’tech était passé par de la croissance organique financée sur fonds propres. En 2012, nous atteignions les limites de l’exercice alors que notre marché était en phase de consolidation. Pour préserver notre indépendance et pour croître, nous devions réaliser des acquisitions structurantes, notamment sur le marché américain. Nous ne pouvions financer seuls cette croissance externe si bien que nous avons fait appel à TCR Capital. En 2014, nous avons ainsi pu réaliser une première acquisition, avec l’américaine Turner Medical –la première étape de notre internationalisation – suivie, en 2016, par une autre, plus modeste en Malaisie, par laquelle nous mettions un pied sur le marché asiatique.
En 2017, Eurazeo PME entre au capital d’In’Tech. Pourquoi ce choix ?
Après ces acquisitions, qui nous avaient permis d’être présents sur les trois marchés qui comptent en orthopédie, nous arrivions aux limites de l’accompagnement proposé par TCR. Or nous avions encore de nombreux projets de croissance, à la fois organiques – avec des investissements dans chacune de nos usines – et externes. Nous sommes partis en quête d’un nouveau fonds en suivant trois critères. Premièrement, qu’il soit français ou européen. Parmi les dix leaders mondiaux fabricants d’implants orthopédiques, In’Tech est la seule société à ne pas être américaine et je souhaitais conserver notre ancrage européen. Ensuite, nous cherchions un fonds qui dispose d’un véritable engagement auprès de l’industrie et des PME françaises. Enfin, il devait pouvoir mettre suffisamment de capital sur la table tout en limitant notre endettement, pour ne pas freiner nos investissements. Eurazeo PME répondait à tous ces critères.
Que vous a permis l’arrivée d’Eurazeo PME ?
En moins d’un an, nous avons réalisé deux acquisitions. En novembre 2017, nous avons acheté Pyxidis, un spécialiste français des boîtes de stérilisation, puis, en mai 2018, la société américaine Bradshaw Medical, qui propose des manches en silicone destinés à la chirurgie orthopédique. Ces opérations nous ont permis de renforcer notre position sur le marché, de gagner en visibilité mais aussi en crédibilité auprès des grands groupes comme Johnson & Johnson que nous pouvons désormais accompagner sur trois continents et sur différents types de services.
"Le private equity est probablement la meilleure réponse à une entreprise comme la nôtre"
Quels sont vos projets pour In’Tech et comment allez-vous les financer ?
Nous allons poursuivre notre croissance organique et externe, en particulier en Asie, un marché à fort potentiel sur lequel nous ne réalisons encore que 3 millions de dollars de chiffre d’affaires. Eurazeo va nous accompagner pendant les trois ou quatre prochaines années. Ensuite, deux grandes options s’offrent à nous. Nous pouvons continuer avec un fonds d’investissement disposant de capacités de financement plus importantes, par exemple pour nous diversifier au-delà de l’orthopédie. Nous pouvons aussi nous rapprocher d’un industriel dont les activités sont complémentaires des nôtres pour bâtir un grand groupe de l’orthopédie. Les deux solutions nous donneront les moyens de nos ambitions mais je dois dire que la première solution a pour l’instant ma préférence. Le private equity est probablement une meilleure réponse à une croissance comme celle d’Intech. Les fonds d’investissement ont parfois mauvaise presse mais ils ont été salutaires pour l’entreprise en nous permettant de rester indépendants, de conquérir une envergure internationale, de passer de 250 à plus de 800 salariés et de faire passer notre chiffre d’affaires de 25 à 100 millions d’euros. C’est une formidable histoire.
Propos recueillis par Cécile Chevré