En charge des fonctions support et de la finance au sein d’Ipsos dont elle est directeur général délégué, Laurence Stoclet décrypte la transformation que le groupe a menée à bien l’année dernière. Elle revient sur les dernières opérations de croissance externe du numéro trois mondial du secteur et détaille les ambitions du groupe en matière de mixité.

Décideurs : Quelles sont vos missions au sein d’Ipsos ?

Laurence Stoclet. Je suis directrice générale déléguée du groupe Ipsos, et occupe un poste d’administrateur de la société mère, Ipsos SA, qui est cotée à la Bourse de Paris depuis le 1er juillet 1999. À ce titre, ma mission est de m’assurer que la direction financière et l’ensemble des fonctions support dans le monde (qui comprennent plus de 2 000 collaborateurs) répondent bien à l’ensemble des enjeux corporate auxquels Ipsos fait face, sur un marché qui évolue rapidement avec la digitalisation et qui nécessite une agilité renforcée, que ce soit dans le domaine de la technologie, des achats ou du juridique, avec l’introduction de la nouvelle réglementation sur les données personnelles. Par ailleurs, dans un métier de prestation intellectuelle et de services professionnels dans lequel l’information est sourcée, la protection et la promotion de la marque Ipsos fait aussi partie de mes activités quotidiennes. Enfin, en tant que société cotée comptant plus de 80 % d’actionnariat public, l’organisation du conseil d’administration représente également une part importante de mes responsabilités.

Ipsos a entrepris un large plan de transformation en 2018. Quel est-il ?

Ipsos est le numéro trois dans son marché au plan mondial, avec une présence dans 90 pays. L’objectif de cette transformation était triple. Premièrement, nous souhaitions présenter une offre clarifiée et plus spécialisée. Pour cela, nous avons revu l’ensemble de notre portefeuille d’activités – Ipsos a un seul métier, les études de marché et les sondages –, mais gère environ 60 000 projets d’étude par an pour plus de 5 000 clients, entreprises de tout secteur et institutions. Cette revue détaillée de nos activités nous a permis d’identifier 75 services, qui ont été regroupés dans 17 lignes distinctes. Réaligner l’ensemble des équipes de nos cinq divisions historiques à cette nouvelle organisation a nécessité la mutation de plus de 2 000 salariés sur 18 000 salariés environ. C’est grâce aux équipes support – finance, ressources humaines, DSI – que la transformation a pu se faire aussi rapidement, entre juillet et décembre 2018. Les deux autres objectifs du projet étaient, d’une part, de renforcer nos relations commerciales avec nos clients, et, d’autre part, de rendre la gouvernance de l’entreprise plus agile.

« Le rachat de Synthesio faisait partie d’une stratégie de croissance externe bien établie. L’acquisition de GfK était une opportunité que nous n’avons pas laissée passer »

Quel a été votre rôle dans cette transformation ?

J’ai personnellement dirigé certains groupes de travail qui ont permis cette transformation, notamment concernant la gestion de nos partenariats technologiques dont l’importance est grandissante au regard des évolutions du domaine de la recherche, ainsi que les aspects de marketing et de communication sur la marque. Il a bien sûr également fallu accompagner ces changements en matière de reporting financier et de mise à jour de notre ERP (Entreprise Ressource Planning). Il s’agissait d’une transformation fondamentale au sein d’Ipsos : au total, plus de deux cents collaborateurs seniors de l’entreprise ont été impliqués dans la conception du projet de transformation et la dizaine de groupes de travail depuis l’été 2017.

Parallèlement à ce projet, Ipsos a également mené plusieurs acquisitions stratégiques en 2018 : celle d’une partie des activités de GfK, et de Synthesio. Comment s’est passée la gestion de front de ces deux chantiers ?

Ces deux acquisitions ont été réalisées dans des contextes bien différents. Le rachat de Synthesio faisait partie d’une stratégie de croissance externe bien établie. Nous souhaitions nous renforcer dans le domaine du « social intelligence analytics » et cette start-up, spécialisée dans le suivi des réseaux sociaux, correspondait parfaitement à notre souhait de nous positionner sur ce marché. L’acquisition de GfK était une opportunité très intéressante que nous avons choisie de ne pas laisser passer.

Environ 1 000 salariés ont été intégrés à Ipsos suite à cette acquisition. Comment avez-vous géré le processus d’intégration ?

Le closing de l’opération GfK Research a été réalisé au mois d’octobre, alors que notre plan de transformation avait commencé à être implémenté dès le 1er juillet. Cela nous a permis d’intégrer directement les salariés à la nouvelle organisation du groupe. Ce processus fut une réussite et nous profitons aujourd’hui des expertises spécifiques apportés par des équipes talentueuses, que ce soit dans le domaine de « user exprience » ou sur certaines technologies dans 26 pays.

« Sur les 300 principaux cadres d’Ipsos, seuls 35 % sont des femmes. Notre objectif est d’atteindre progressivement les 50 % »

Dans quel cadre privilégiez-vous la croissance externe à la croissance organique ?

Nous ne nous interdisons rien. Mais généralement, si nous estimons qu’il nous faudra plus de cinq ans pour arriver à un modèle déjà existant, nous achetons. L’acquisition est avant tout un moyen rapide d’accéder à certaines technologies ou à un certain savoir-faire dans une discipline ou un secteur d’industrie.

Le conseil d’administration d’Ipsos compte 60 % de femmes. Quelle est l’approche de l’entreprise en matière de parité ?

Nous avons commencé à promouvoir la mixité il y a plusieurs années déjà, cela fait partie des sujets importants pour le président directeur général du groupe. Ce que nous avons réussi à faire aujourd’hui dans notre conseil d’administration (nous avons gagné en 2018 le prix de la Mixité dans le secteur des Services), nous voulons le répliquer au sein de l’ensemble des organes de décision d’Ipsos : le comité de direction mais aussi le top management de manière plus globale. Sur les 300 principaux cadres d’Ipsos, seuls 35 % sont des femmes. Notre objectif est d’atteindre progressivement les 50 %.

La mixité est-elle selon vous source de performance pour l’entreprise ?

Oui et de façon plus large, la richesse provient de la diversité, et pas seulement de l’équilibre hommes/femmes : la diversité d’âge, de parcours et de culture. Cela est particulièrement important dans notre métier qui consiste à être la voix de l’ensemble des consommateurs et des citoyens dans tous les pays dans lesquels nous sommes installés.  Les entreprises comme les institutions qui nous font confiance ont besoin d'un vrai savoir issu de données pertinentes, précises, holistiques mais surtout, transformées en connaissance et leviers d’action. Cette connaissance doit s’appuyer sur une compréhension fine des individus, de leurs besoins, de leurs aspirations mais aussi, de la société dans son ensemble et de ses dynamiques d’opinion qui ont une influence sur les décisions et actes d'achat des consommateurs.

Propos recueillis par Camille Prigent

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