Brice Anger (M&G) : « La gestion active crée de la performance et de la valeur ajoutée dans la durée. »
Décideurs. Quels sont les grands défis que doivent relever les sociétés de gestion, et comment M&G réussit-elle à tirer son épingle du jeu ?
Brice Anger. Le premier challenge est celui de l’évolution liée à la technologie qui a permis de voir de nouveaux acteurs prendre une grande part du marché de la gestion d’actifs au travers de la gestion dite « passive ». Je pense notamment au développement des ETF. L’enjeu pour des acteurs comme M&G, est de parvenir à exister sur ce marché et montrer toutes les vertus d’une gestion active. Celle-ci ne peut pas toujours être reproduite par un modèle informatique car elle fait appel à un savoir-faire lié à des prises de position qui sont fonction des marchés et de la finance comportementale. La gestion active doit pouvoir créer de la performance et de la valeur ajoutée dans la durée. Le deuxième défi auquel nous sommes confrontés concerne la réglementation. Les règles de transparence nécessitent de mettre en place une grande quantité de documents partagée avec les clients. Avec la hausse des coûts il devient essentiel d’atteindre une taille suffisamment grande pour réaliser des économies d’échelle. Un autre défi est lié au Brexit. Nous nous attendons à ce que les produits de droit anglais ne puissent plus bénéficier du passeport européen. Nous avons donc pris l’initiative, depuis le jour du référendum (23 juin 2016), de créer une SICAV luxembourgeoise de manière à ce que tous nos clients investis sur des fonds de droit anglais soient progressivement investis sur des fonds de droit luxembourgeois. Enfin, l’autre enjeu crucial concerne la préparation à la retraite. En France, nous composions avec des produits assurantiels comme le fonds en euro qui assurait une bonne rentabilité et une garantie en capital. Aujourd’hui, avec des taux très bas, le fonds en euro est nettement moins intéressant. Il est donc nécessaire de prendre plus de risques pour être performant dans la durée. L’objectif de notre industrie est de développer une véritable pédagogie à l’égard des épargnants pour les inciter à s’intéresser à des produits plus risqués mais qui peuvent offrir un rendement en phase avec leurs attentes.
Il n’est donc plus possible d’avoir des rendements sans prendre de risques. Quelles sont les solutions que vous proposez aux investisseurs qui doivent changer leurs habitudes ?
Les clients doivent progressivement investir sur autre chose que les fonds en euro. Une société comme M&G a développé un savoir-faire dans le monde de la gestion flexible, avec différents profils de risque qui répondent à des clients qui ont eux-mêmes des profils divers. Par exemple, pour la gestion patrimoniale avec un horizon de placement de trois à cinq ans, le fonds que nous préconisons le plus s’appelle M&G Dynamic Allocation. Il s’agit d’un produit patrimonial équilibré avec une position investie en action située entre 20% et 60%. Plus récemment, avec un modèle de gestion comparable, nous avons créé un produit qui s’appelle M&G Global Target Return, destiné à des clients souhaitant prendre très peu de risques. Cela montre que pour différentes typologies de clients, nous avons différents profils de gestion, mais avec une expertise qui fait ses preuves depuis plus de vingt ans, avec des encours de près de 20 milliards d’euros. Dès lors que le client sort du fonds en euro, il faut lui offrir quelque chose qui ressemble au mandat de gestion que peut offrir une banque privée. Avec cette gestion flexible, nous formons une alternative aux fonds en euro et aux mandats de gestion proposés par les banques privées.
On parle souvent des personnes physiques, mais le milieu de l’asset management a tendance à omettre le dirigeant d’entreprise. Qu’en dites-vous ?
Nous avons pris la décision de nous adresser à cette clientèle qui, au travers de sa trésorerie d’entreprise ou de sa holding familiale souhaite une gestion très peu risquée. Pour répondre à cette attente, nous avons lancé récemment une stratégie de gestion visant une performance de 2 % à 3 % nette par an avec un processus de gestion extrêmement rigoureux. Cette stratégie devrait intéresser des personnes morales au travers des holdings familiales ou des trésoreries d’entreprises.
Propos recueillis par Yacine Kadri