Nouveau président du Medef et maître de cérémonie de sa 20e université d’été, Geoffroy Roux de Bézieux a appelé entreprises et politiques à se projeter dans l’avenir et à bâtir ensemble le monde qui vient.

Mardi 28 août s’ouvrait la vingtième université d’été du Medef. De quoi conférer à cette nouvelle édition un caractère « un peu exceptionnel », a estimé son nouveau président Geoffroy Roux de Bézieux qui, succédant à Pierre Gattaz en maître de cérémonie, a appelé chacun à profiter de cette date anniversaire pour se livrer, deux jours durant, à un exercice de prospective. Objectif : se projeter dans les vingt années à venir pour construire le futur. Celui de l’Europe, de la France et de ses entreprises.

 « Regarder loin »

Car, a-t-il insisté, les mutations en cours sont telles – questionnement de nos institutions, raréfaction des ressources, accélération des nouvelles technologies, défis écologiques... – qu’elles nous obligent « à regarder loin ». « Elles questionnent nos rapports à l’entreprise, à la démocratie, à la planète » a résumé le nouveau président du Medef en rappelant que, à la création du syndicat, il y a vingt ans, « le destin du monde semblait tout tracé : toujours plus de croissance, de démocratie, de richesses… c’était l’époque de la mondialisation heureuse ». Une mondialisation qui a tenu ses promesses sur le plan économique mais aboutit à la disparition du « rêve européen, évanoui dans les sables des replis identitaires ». « L’accélération des échanges et des opportunités a aussi créé des angoisses et des fractures, a poursuivi Geoffroy Roux de Bézieux, évoquant un écart croissant entre « ceux qui ont tout et les autres, pour qui ces opportunités apparaissent comme des menaces » et dont les peurs viennent nourrir les populismes.

Reconstruire l’Europe

Face à cette réalité, Geoffroy Roux de Bézieux en est convaincu : il est de la responsabilité des entrepreneurs de contribuer à la relance européenne. « Face à l’isolationnisme américain, au capitalisme d’État chinois, à ces nouvelles puissances économiques pour qui la démocratie est seulement une option, les entrepreneurs doivent contribuer à reconstruire l’Europe, la rendre plus compétitive, plus protectrice, selon un modèle qui ne soit ni lÉtat providence, ni une jungle sans foi ni loi.» Une Europe qui redonne de l’espoir? a conclu le président du Medef en insistant sur le rôle des entrepreneurs dans cette démarche. « Nous devons convaincre nos concitoyens, sans arrogance, sans suffisance, que l’Europe est notre avenir et que, même si elle doit être améliorée, elle a apporté confiance et opportunités à nos entreprises », a-t-il affirmé avant d’ajouter : « Nous allons témoigner, expliquer, décrypter, convaincre nos concitoyens que l’Europe est le meilleur rempart contre ce qu’ils perçoivent comme les dangers de l’époque . »

« Dans vingt ans, l’entreprise aura une vocation beaucoup plus large ; c’est pourquoi il faut accepter le débat sur sa raison d’être »

L’entreprise, premier acteur du changement

Poursuivant son exercice de projection, Geoffroy Roux de Bézieux a ensuite évoqué ce que serait l’entreprise dans vingt ans, elle qui, au cours des deux dernières décennies, est devenue « un acteur incontournable de mutation, technologique mais aussi sociétale », initiant des progrès décisifs dans le domaine spatial, médical, biotechnologique… et, ce faisant, accédant à un niveau de « liberté » qui, a-t-il insisté, ne peut aller sans une nouvelle forme de responsabilité. « Nos concitoyens l’ont compris, c’est pourquoi ils attendent des entreprises qu’elles apportent des solutions ; pas seulement au chômage mais aussi aux questions de société, puisqu’elles sont perçues comme les acteurs les plus efficaces et les plus légitimes du changement. » D’où cette conviction : « Dans vingt ans, l’entreprise aura une vocation beaucoup plus large et c’est pourquoi il faut accepter le débat sur sa raison d’être ». Raison d’être qui, désormais, ne saurait se limiter à la quête du profit. « Son rôle va plus loin. C’est pourquoi, si l’on demande aux entrepreneurs de s’engager plus, ils doivent être encouragés. L’écosystème du pays doit se mettre à leur service car ce sont eux qui osent, qui innovent, qui prennent tous les risques. »

Faire de la France une « start-up nation »

Rappelant les nombreux atouts de la France - son territoire, la stabilité de ses institutions, ses grands groupes, ses ETI, ses PME… - le patron du Medef en a enfin appelé à la nécessité, pour le pays, de se transformer pour « suivre le rythme du monde ». « L’histoire de l’économie n’est pas jouée, a-t-il martelé. Les monopoles qui nous dominent aujourd’hui peuvent être remis en cause ; la France doit redevenir une start-up nation, une terre d’innovation et de technologie. Le génie français existe toujours ! » Reste, pour lui permettre de livrer tout son potentiel, à « rattraper le retard pris au cours des vingt dernières années ». Un défi que le gouvernement a commencé à relever en redonnant confiance aux entreprises, a-t-il poursuivi en évoquant les réformes récentes du code du travail, de la taxation du capital… Aux entreprises désormais d’en faire des outils au service de demain. « Nous devons nous saisir de ces réformes pour renvoyer la balle, pour investir dans l’entreprise, pour déployer l’intéressement dans les PME et, ainsi, contribuer à la relance du pays. » À condition, a insisté le président du Medef, que ne soit pas franchie la « ligne rouge » qui consisterait à alourdir les charges des entreprises. Un message clair à l’adresse du Premier ministre, Édouard Philippe, assis au premier rang de l’assemblée, et un rappel de ce que le successeur de Pierre Gattaz considère rester la priorité du syndicat, à savoir : le combat. Un combat « acharné, ingrat, souvent solitaire », a-t-il conclu, mais qui vise à « assurer aux entreprises la compétitivité permettant la création de richesse essentielle pour elles et pour le pays. »

Caroline Castets

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