La due diligence parie sur l’intelligence artificielle
Passage obligé des opérations de cession, d’acquisition ou de fusion, les due diligences connaissent une profonde mutation. « Elles sont de plus en plus considérées comme des travaux à valeur ajoutée restreinte, confirme Christine Blaise-Engel, associée chez Fidal. Cela milite en faveur de data-rooms fonctionnelles qui nous permettent de gagner du temps. » L’avocat se concentre ainsi sur des tâches plus stratégiques, et le client ne se voit pas facturer du temps passé à trier des milliers d’informations. Car une data-room peut actuellement totaliser jusqu’à 45 000 pages de documents juridiques, statuts et autres liasses comptables, contre près de dix fois moins il y a cinq ans. « Les contrats sont de plus en plus longs et calqués sur des contrats anglo-saxons, même entre sociétés françaises », ajoute l’avocate. La réforme du droit des obligations a également fait peser sur le vendeur une obligation renforcée d’information, qui ne fait qu’aggraver le phénomène.
Modernisation
En parallèle, les délais se sont considérablement raccourcis. Si l’arrivée de data-rooms électroniques a simplifié le travail de l’ensemble des acteurs du secteur, une question demeure : comment trier des documents certes plus accessibles mais dont la quantité continue à grossir de façon exponentielle ? Pour Alexandre Grellier, fondateur de Drooms, la réponse se trouve du côté de l’intelligence artificielle : « Les algorithmes existent depuis les années 1970. Ce qui change aujourd’hui, c’est que nous avons énormément de données. » Créée en 2001, l’entreprise qui proposait à ses débuts une data-room électronique classique a commencé à développer des outils. Pour cela, elle a noué un partenariat stratégique avec Fidal, le plus grand cabinet d’avocats de France avec 2 450 avocats répartis dans 90 bureaux. Avec un but ultime : « Que le rapport de due diligence soit généré automatiquement et que l’avocat n’ait plus qu’à le vérifier », affirme Alexandre Grellier.
Résultats déjà probants
La technologie ne va pas encore aussi loin, mais des résultats intéressants ont déjà été obtenus par le couple Drooms-Fidal, qui a réalisé un premier test sur les clauses de changement de contrôle de contrats domestiques. « L’idée est que la machine se nourrisse de milliers de contrats afin d’identifier ces clauses qui peuvent être des freins à la réalisation d’une transaction », explique Christine Blaise-Engel. Un autre chantier a également été mené par Drooms : celui de la traduction des documents en plusieurs langues afin de faciliter les deals cross-border sans que les documents ne sortent de la data-room, et donc en préservant leur caractère confidentiel. « À terme, notre outil permettra d’établir des listes de risques et d’opportunités, classifiées en fonction de leur importance et de leur impact potentiel sur le deal », détaille Alexandre Grellier. Dans ces évolutions, le client joue véritablement le rôle de facilitateur, car Drooms affine ses outils au fur et à mesure des remontées. Un éventail de possibles qui pourrait bien donner un nouveau visage aux opérations de fusions-acquisitions.