À l’heure où l’environnement sociétal et concurrentiel des mutuelles est profondément touché par la révolution numérique, Nicolas Gomart, directeur général du groupe Matmut, nous fait part des nombreux défis à venir et des transformations en cours.

Décideurs : Votre cœur de métier est l’assurance dommages des particuliers. Le groupe a pourtant annoncé vouloir accentuer son développement vers le marché des professionnels. Quelle est la stratégie adoptée ?

Nicolas Gomart. Le marché des professionnels n’est pas un champ d’investigation nouveau puisque dès 1975 la Matmut créait un contrat d’assurance des risques professionnels. C’est aujourd’hui un axe stratégique, un relais de croissance. Le marché des professionnels a représenté près de 8 % de notre chiffre d’affaires en 2016, contre 4 % l’année précédente. Notre stratégie consiste à consolider nos acquis auprès des professions traditionnelles du commerce et de l’industrie, mais aussi à nous adapter à la mutation des métiers et aux nouveaux risques, comme par exemple les cyber-risques.

Devenu très concurrentiel, le secteur de l’assurance semble s’être lancé dans une course à l’innovation. Comment la Matmut tire-t-elle son épingle du jeu ?

En ne renonçant pas à la qualité des services rendus à nos sociétaires. Notre métier épouse les évolutions sociétales. Innover consiste à faire évoluer en permanence nos offres afin de coller aux besoins réels de nos concitoyens. Pour le volet technologique, notre approche est pragmatique, collaborative : travail avec des start-up, création de labs, traitement des données et digitalisation… Notre participation au projet Rouen Normandy Autonomous Lab est emblématique. La voiture autonome est un enjeu d’avenir et nous accompagnons cette expérimentation, une première européenne sur routes ouvertes.

« Un phénomène de concentration est à l’œuvre dans l’univers mutualiste »

Cela fait maintenant deux ans que le groupe a lancé son projet d’entreprise #Ambition Matmut, axé sur l’amélioration de l’expérience client. Quel bilan pouvez-vous en tirer ?

Tout n’est pas finalisé, mais de nombreux objectifs sont atteints. Pour le grand public, le plus visible est notre nouveau positionnement marketing, articulé autour de la notion de « complice de vies », mais le groupe s’est transformé en profondeur. Ma principale satisfaction est que nous avons relevé le défi de la révolution digitale en accompagnant aussi bien nos sociétaires que nos collaborateurs. Notre travail est de poser les bases d'un nouveau projet d’entreprise.

Vous multipliez les partenariats, notamment avec d’autres mutuelles. L’heure est-elle à la concentration du marché mutualiste ?

Contexte réglementaire oblige, un phénomène de concentration est à l’œuvre dans l’univers mutualiste. Notre stratégie partenariale, elle, a pour objectif de renforcer la solidité de notre groupe et de favoriser son développement. Nous avons intégré la mutuelle Ociane, devenue Ociane Groupe Matmut, tandis que nos liens avec Mutlog, spécialiste de l’assurance emprunteur, et le groupe Solimut Mutuelles de France ne cessent de se renforcer. Hors du champ mutualiste, le lancement prochain d’une filiale avec BNP Paribas est une reconnaissance de notre savoir-faire.

Quel est le principal défi auquel le groupe, et plus largement le monde des mutuelles, va être confronté dans les prochaines années ?

Les défis des mutuelles sont semblables à ceux des sociétés de capitaux, car nous évoluons sur les mêmes marchés. Le principal consiste à accompagner les changements des modes de vie de nos concitoyens. C’est encore plus vrai pour les structures mutualistes car il s’agit d’une exigence qui est au fondement même de leur création. Quelques exemples de ces changements profonds : la bascule de la propriété des biens à leur seul usage ; une approche « mobilité globale » et moins « automobile » ; la prise en compte des impacts de nos modes de vie sur notre santé ; les problématiques posées par l'ère de la donnée dans laquelle nos sociétés sont entrées… Ces évolutions affectent la demande de nos marchés, leur structuration et transforment les acteurs qui les animent.

 

Propos recueillis par Marion Robert (@Marion_Rbrt)

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