L’OCDE juge la fiscalité française (toujours) trop complexe
« L’économie française a de nombreux atouts, mais doit aussi faire face à des défis importants. » Voilà, en substance, le résumé du rapport de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) présenté le 14 septembre. Côté bonnes nouvelles, la révision à la hausse des prévisions d'une croissance dorénavant estimée à 1,6 % pour 2018. De de quoi satisfaire l’exécutif, même si ce chiffre demeure inférieur à la moyenne de la zone euro. En revanche, le poids de la dette publique est toujours pointé du doigt. Il faut dire qu’en la matière le pays occupe la place peu envieuse de champion. « Une médaille d’or » dont la France se passerait volontiers. D’autant que malgré les efforts consentis depuis plusieurs années, « la dette publique reste sur une trajectoire ascendante », analyse Peter Jarrett, chef de division de l’OCDE.
Simplifier pour gagner en efficacité
Derrière le constat, point de fatalisme. L’organisation formule ainsi un certain nombre de préconisations pour redresser la barre. Une fois encore, il s’agit de mieux cibler les postes de dépenses publiques tout en pérennisant et en élargissant la base des rentrées alimentant les caisses de l’État. Sur ce dernier point, les projets de réformes fiscales ne semblent pas satisfaire l’OCDE. « La fiscalité française est trop forte, trop lourde, trop complexe », assène Peter Jarrett. Niches, exonérations et réductions d’impôts, tous ces régimes qui émaillent le système français plombent la lisibilité de l’impôt et surtout son efficacité. En fiscalité comme ailleurs, le diable est dans les détails. L’instabilité de la réglementation n’aide évidemment pas. « Cela renchérit le coût déjà élevé de la discipline fiscale et du recouvrement de l’impôt », confirme l’OCDE. Le mot d’ordre demeure donc la simplification. Comment ? « En supprimant certains impôts, en abaissant les taux et en élargissant les bases d’imposition. »
Cotisations sociales dans le viseur
En ce qui concerne les entreprises, le bilan est sans appel : avec un taux effectif moyen d’imposition supérieur à 30 %, la France s’illustre comme l’un des pays les plus pesants, en deuxième position derrière les États-Unis. Plus inquiétant, les recettes de l’impôt sur les sociétés ne sont pas à la hauteur, la France se situant dans le peloton de queue en la matière. Cette équation n’est cependant pas insoluble. Peter Jarrett préconise une nouvelle fois de « réduire le taux d’IS et d’élargir la base imposable ». À ce titre, la réforme annoncée par Emmanuel Macron de ramener le taux de 33,3 % à 25 % est une avancée saluée par l’OCDE. Autre point d’accord avec l’exécutif : la nécessité d’imposer les géants du Web en France. Enfin, les économistes restent dubitatifs quant à l’efficacité des crédits d’impôt, particulièrement coûteux, faute d’études poussées sur le sujet. Plus généralement, ce sont les taxes sur le travail qui concentrent les critiques. Si les cotisations sociales constituent une manne financière pour l’État (elles représentent plus d’un tiers des recettes fiscales françaises), elles limitent drastiquement les incitations à l’embauche.
Taux faible, assiette large
La fiscalité personnelle n’est pas épargnée non plus par l'OCDE. L’impôt sur le revenu des personnes physiques ne contribue que peu aux recettes fiscales dont il représente 18,9 % contre 24 % en moyenne dans l’OCDE. L’une des explications avancées par Peter Jarrett réside dans son assiette : « Seuls 42,8 % des Français s’acquittent de l’impôt sur les revenus », déplore-t-il. Sans surprise, les économistes préconisent à nouveau de généraliser cet impôt en élargissant son assiette. L’une des solutions avancées consisterait à créer une tranche supplémentaire d’imposition avec un taux faible. À plus long terme, l'idée demeurant de « mettre en place un impôt sur le revenu unique, simple et progressif », comme c’est déjà le cas dans la plupart des pays de l’OCDE. D’ailleurs, « le passage au prélèvement à la source en 2019 facilitera la mise en œuvre d’un tel changement », souligne le rapport. Enfin, le projet de flax tax est une initiative saluée. « L’institution d’un taux forfaitaire unique de 30 % sur les revenus du capital est utile, à la condition d’éliminer certains des nombreux allègements fiscaux liés aux livrets d’épargne spécifiques », prévient Peter Jarrett.
Autant de propositions qui pourraient nourrir la réflexion du gouvernement qui doit préciser les limites des différentes réformes fiscales annoncées d’ici au 31 décembre, dans sa loi de finances.
Sybille Vié