Dix ans après la crise de 2007, le capital-investissement retrouve toutes ses couleurs. Portées par des performances retrouvées, des taux faibles et des liquidités abondantes, les levées de fonds atteignent des sommets.

Sans aucun doute, le cru 2017 restera dans les mémoires du private equity. Depuis le début de l’année, les records ne cessent de tomber. Le fonds américain Apollo, deuxième gérant mondial, a ainsi réalisé la plus grande levée de l'histoire du capital-investissement : en sept mois, la société a récolté 24,6 milliards de dollars, soit 115 millions de dollars par jour. Blackstone, le numéro un du secteur qui détenait ce record depuis 2007 avec un véhicule de 21,7 milliards de dollars n’est pas à plaindre puisque la masse de ses capitaux gérés a atteint un nouveau plus haut à 371 milliards de dollars sous gestion. Quant aux fonds européens, ils ne sont pas reste. Le Britannique CVC a réuni dix-huit milliards de dollars en juin dernier et les fonds français ont connu eux aussi une année record avec trois opérations supérieures à deux milliards d’euros. Ardian a bouclé trois véhicules d'investissement de plus d'un milliard d'euros, dont un méga-fonds de fonds de 10,8 milliards. Antin Infrastructures Partners a de son côté clôturé son troisième véhicule d'un montant de 3,6 milliards d'euros en décembre dernier. Enfin, Astorg (cf. entretien) a levé 2,1 milliards d'euros.

Mieux qu’en 2007

Sur les six premiers de l’année, 295 milliards de dollars ont été au total levés d’après Preqin. Si le marché continue sur cette lancée au second semestre, il battra sans doute le record de 2007 et ses 423 milliards de dollars récoltés. Tous les voyants sont au vert pour y parvenir. Les taux bas et les liquidités abondantes induits par les politiques monétaires expansionnistes mises en place par la Banque centrale européenne (BCE) et la Réserve américaine (Fed) ont incité les investisseurs à se tourner vers le capital-investissement. L’Asie fait également une percée remarquée sur un marché longtemps réservé aux Américains et aux Européens. Sur les dix plus gros fonds en cours de levée, sept sont asiatiques et briguent au total près de 200 milliards de dollars. À lui seul, le japonais SoftBank est en passe de boucler une levée de 100 milliards de dollars dans le capital-risque. De quoi pulvériser le record établi par Apollo.

Ce renouveau est aussi dû aux réformes structurelles que les fonds ont adoptés depuis la crise de 2007 : les General Partners (GPs) doivent engager des efforts conséquents pour créer de la valeur par l’alpha dans les sociétés de leurs portefeuilles ; ils formalisent leurs meilleures pratiques de sorties en documentant en détail la séquence des actions qui ont permis de maximiser la valeur de chaque investissement sur plusieurs années ; et la durée de détention a notamment augmenté, passant à cinq ans en moyenne, contre 3,5 avant la crise. Des changements qui se répercutent sur des sorties en baisse de 23 % en valeur et de 19 % en volume. Une diminution qui n’est pas due à un environnement défavorable mais à un retour à la normale du calendrier des sorties. Les fonds ont enfin réussi à digérer les millésimes exceptionnels 2006 et 2007. Avec 984 transactions et un marché consolidé à 328 milliards de dollars, 2016 restera même comme la quatrième meilleure année de l’histoire du secteur.

9,7 % de rendement sur dix ans

Résultat, le private equity surperforme les autres classes d’actifs à moyen et long terme. Entre 2006 et 2016, le rendement moyen des fonds s’élevait à 9,7 %, selon l’étude mondiale réalisée par Bain, alors que dans le même temps le marché obligataire affichait un taux de 4 % et celui l’immobilier de 5,2 %. La volatilité sur les actions a également contribué à attirer les investisseurs institutionnels à se concentrer sur le private equity. D’autant plus que les performances de long terme ne sont pas au rendez-vous. Entre 2006 et 2016, le CAC 40 n’a progressé que de 3 %, contre 8,7 % pour le private equity français. Mieux encore, le ratio de distribution sur contribution des Limited Partners au secteur du private equity est supérieur à 1 depuis 2011, selon Bain. L’an dernier, il s’élevait même à deux, contre seulement 0,4 après la crise de 2007. De quoi restaurer la confiance et forger une relation sereine pour le futur. Fin 2015, le private equity disposait de 1 500 milliards de dollars en capital souscrit non investi, dont 534 milliards pour le LBO. CLes fonds ont de quoi faire parler d’eux au cours des prochains mois.

Vincent Paes

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