Donald Trump : la victoire du protectionnisme
Après le Brexit, l’élection du républicain Donald Trump sonne comme une nouvelle victoire pour le protectionnisme. Depuis la crise financière et économique de 2008, les bienfaits de la mondialisation ont disparu. Classes moyennes et populaires ne voient plus dans la globalisation que les suppressions d’emplois. Ainsi, pour la grande partie des électeurs américains, le reste du monde est responsable de la dégradation économique du pays, tendance que Donald Trump n’a pas hésité à exploiter. Durant sa campagne, ce dernier n’a cessé de mettre en avant des mesures anti-commerce international.
Ainsi, il a indiqué qu’il comptait remettre en cause l’Alena, une zone de libre-échange entre les États-Unis, le Canada et le Mexique. Quant aux traités commerciaux en cours de négociation avec l’Asie hors Chine (TPP) et avec l’Europe (TIPP), Donald Trump a laissé entendre qu’ils n’avaient que peu de chance d’aboutir. M. Trump est même allé plus loin en indiquant qu’il réfléchissait à la mise en place de droits de douane de 45 % sur les produits chinois. Il a profité de l’occasion pour accuser la Chine de manipuler le cours de sa devise. En tant que nouveau président, il devrait également en profiter pour porter plainte devant l’Organisation mondiale du commerce sur ces pratiques. Une institution qu’il souhaite par ailleurs quitter afin d’appliquer librement ses mesures.
Au niveau politique, cet élan protectionniste se traduirait par l’expulsion des trois millions d’immigrants sans-papiers qui vivent actuellement sur le sol américain. Enfin, l’ancien magnat de l’immobilier compte réduire ses engagements vis-à-vis du reste du monde. Il a évoqué la volonté de faire sortir les États-Unis de l’ONU, une institution qui, selon lui, coûte beaucoup mais n’apporte rien pour le peuple américain.
Conséquences économiques
Au vu de la puissance économique américaine, une telle politique aura bien entendu des conséquences planétaires. Si Donald Trump applique son programme, d’autres puissances économiques seront tentées d’en faire autant, Chine en tête. Un réel risque d'escalade de la guerre tarifaire existe, et aucun gagnant ne sortira de cette bataille. La baisse des échanges internationaux entraînera automatiquement un ralentissement de la croissance mondiale dans laquelle les États-Unis ont beaucoup à perdre. Avec la Chine, la balance penche largement en faveur de cette dernière. Alors que les exportations vers la deuxième puissance mondiale ne représentent que 110 milliards de dollars, les importations se chiffrent à 480 milliards. Une hausse des droits de douane entraînerait automatiquement une hausse des prix. Sans compter la baisse de la devise américaine et la hausse du coût du travail liée aux restrictions sur l’immigration.
Et les conséquences pourraient être encore plus catastrophiques. Car, pour relancer l’économie, Donald Trump souhaite dans le même temps, mettre en place un choc fiscal sans précédent. Le think tank américain Tax Foundation estime que le programme économique du nouveau président pourrait coûter 10 à 12 000 milliards, soit plus de 55 % de la dette des États-Unis. Cette hausse du déficit budgétaire risque de réveiller les craintes autour de la soutenabilité de la dette, ce qui contribuera à augmenter les taux des obligations américaines.
Mais là où le programme de Donald Trump est le plus dangereux est qu’il se mord la queue. La baisse des impôts promise se traduira par une hausse significative des importations. Car l’appareil productif américain n’est pas en mesure de répondre à ce surplus de demande. Résultat, l’objectif premier qui est de doper le revenu des Américains et d’améliorer leurs dépenses ne pourra durer bien longtemps. Car les prix vont rapidement augmenter par deux leviers : la baisse de la devise américaine et la hausse des droits douaniers.
Malgré ces risques, le protectionnisme risque de faire des émules, particulièrement en France et en Allemagne où des élections majeures auront lieu l’année prochaine. Jusqu’à présent pro-mondialisation, le parti socialiste et Les Républicains seront tentés de prendre des positions protectionnistes pour couper l'herbe sous le pied des partis populistes.
Vincent Paes