« S’afficher comme un émetteur en catégorie spéculative n’est plus un tabou. »
Entretien avec Carol Sirou, présidente, Standard & Poor’s France
Décideurs. Peut-on s’attendre à un retour prochain de la titrisation ?
Carol Sirou. Le secteur des financements structurés se porte relativement bien en Europe. Même en 2008, nous n’avons pas vu de chutes sensibles de l’activité de titrisation en France. Ce caractère résilient tient à la nature même de la finance structurée européenne constituée principalement d’Asset Back Securities (ABS), notamment adossé à des prêts à l’habitat, des financements automobiles, des emprunts publics, etc. Il y a six mois, le mot titrisation semblait encore banni sine die. Le sujet est évoqué aujourd’hui et l’on pourrait observer une relance de la titrisation dès 2013 grâce à plusieurs évolutions majeures. Il y a eu quelques opérations fin 2012, mais pour que la titrisation devienne un vrai moteur de financement de l’économie, il faut trouver des moyens pour qu’elle soit moins pénalisante en fonds propres pour les banques. L’accès à ce marché est vital pour de nombreuses entreprises et plusieurs initiatives sont en cours.
Par exemple, le projet Prime Collateralised Securities vise à promouvoir un standard de titrisation suffisamment transparent pour comprendre la nature des prêts et encourager le régulateur à faire en sorte que les opérations qui ont ce label puissent disposer d’un traitement réglementaire moins pénalisant. L’engagement mutuel des parties, opérateurs et régulateurs, est une condition sine qua non à la reprise d’un marché de la titrisation comme véhicule de financement suffisamment liquide et profond.
Décideurs. Pendant ce temps, le marché de la dette reste très (trop ?) bon marché.
C. S. Le mur de la dette, qui est le besoin de refinancement obligataire de certaines opérations de financement d’entreprises, a été décalé de dix-huit mois grâce à des conditions de financement très favorables. L’activité est notamment restée très forte sur le marché du high-yield. Récemment, on a assisté à des situations où des émissions de dettes dans la catégorie CCC se sont placées avec succès à 11 % voire 12 %. Le taux de défaut à cinq ans des émetteurs notés BB+ (note la plus élevée de la catégorie high-yield) est à 5 %... Elles représentent un quart des émissions réalisées en Europe. Quand certains évoquent une « bulle du high-yield », on sous-entend les effets négatifs que peut provoquer un accès à des capitaux très bon marché par rapport au risque de crédit de ces emprunteurs.
Décideurs. Assiste-on à un changement dans la perception des notes attribuées ?
C. S. Beaucoup d’émetteurs viennent sur le marché parce qu’ils considèrent que c’est le bon moment pour diversifier leurs sources de financement. Il s’agit de l’un des impacts de Bâle III puisque les banques se financent trop cher pour offrir des financements attractifs. Les entreprises préfèrent aller sur les marchés pour se financer et on voit donc de nouveaux émetteurs et de nouvelles notes. S’afficher comme un émetteur en catégorie spéculative n’est plus un tabou aujourd’hui et le nombre d’émetteurs la catégorie BB est en train de croître rapidement. Il y a vingt ans, tout le monde voulait être noté AAA, il y a dix ans – A. Aujourd’hui, les entreprises sont heureuses lorsqu’elles sont notées BBB. D’ailleurs, tout le monde n’essaie pas d’être noté AAA. Cela dépend de la stratégie financière de l’entreprise et du profil de risque que le management souhaite se donner. Avant, la France se caractérisait par un nombre assez élevé de BBB, et moins de notes en catégorie spéculative. Cette situation est actuellement en train de s’inverser de par l’augmentation prononcée du nombre d’entreprises notées, et non pas à cause d’une dégradation généralisée du risque des entreprises françaises.
Carol Sirou. Le secteur des financements structurés se porte relativement bien en Europe. Même en 2008, nous n’avons pas vu de chutes sensibles de l’activité de titrisation en France. Ce caractère résilient tient à la nature même de la finance structurée européenne constituée principalement d’Asset Back Securities (ABS), notamment adossé à des prêts à l’habitat, des financements automobiles, des emprunts publics, etc. Il y a six mois, le mot titrisation semblait encore banni sine die. Le sujet est évoqué aujourd’hui et l’on pourrait observer une relance de la titrisation dès 2013 grâce à plusieurs évolutions majeures. Il y a eu quelques opérations fin 2012, mais pour que la titrisation devienne un vrai moteur de financement de l’économie, il faut trouver des moyens pour qu’elle soit moins pénalisante en fonds propres pour les banques. L’accès à ce marché est vital pour de nombreuses entreprises et plusieurs initiatives sont en cours.
Par exemple, le projet Prime Collateralised Securities vise à promouvoir un standard de titrisation suffisamment transparent pour comprendre la nature des prêts et encourager le régulateur à faire en sorte que les opérations qui ont ce label puissent disposer d’un traitement réglementaire moins pénalisant. L’engagement mutuel des parties, opérateurs et régulateurs, est une condition sine qua non à la reprise d’un marché de la titrisation comme véhicule de financement suffisamment liquide et profond.
Décideurs. Pendant ce temps, le marché de la dette reste très (trop ?) bon marché.
C. S. Le mur de la dette, qui est le besoin de refinancement obligataire de certaines opérations de financement d’entreprises, a été décalé de dix-huit mois grâce à des conditions de financement très favorables. L’activité est notamment restée très forte sur le marché du high-yield. Récemment, on a assisté à des situations où des émissions de dettes dans la catégorie CCC se sont placées avec succès à 11 % voire 12 %. Le taux de défaut à cinq ans des émetteurs notés BB+ (note la plus élevée de la catégorie high-yield) est à 5 %... Elles représentent un quart des émissions réalisées en Europe. Quand certains évoquent une « bulle du high-yield », on sous-entend les effets négatifs que peut provoquer un accès à des capitaux très bon marché par rapport au risque de crédit de ces emprunteurs.
Décideurs. Assiste-on à un changement dans la perception des notes attribuées ?
C. S. Beaucoup d’émetteurs viennent sur le marché parce qu’ils considèrent que c’est le bon moment pour diversifier leurs sources de financement. Il s’agit de l’un des impacts de Bâle III puisque les banques se financent trop cher pour offrir des financements attractifs. Les entreprises préfèrent aller sur les marchés pour se financer et on voit donc de nouveaux émetteurs et de nouvelles notes. S’afficher comme un émetteur en catégorie spéculative n’est plus un tabou aujourd’hui et le nombre d’émetteurs la catégorie BB est en train de croître rapidement. Il y a vingt ans, tout le monde voulait être noté AAA, il y a dix ans – A. Aujourd’hui, les entreprises sont heureuses lorsqu’elles sont notées BBB. D’ailleurs, tout le monde n’essaie pas d’être noté AAA. Cela dépend de la stratégie financière de l’entreprise et du profil de risque que le management souhaite se donner. Avant, la France se caractérisait par un nombre assez élevé de BBB, et moins de notes en catégorie spéculative. Cette situation est actuellement en train de s’inverser de par l’augmentation prononcée du nombre d’entreprises notées, et non pas à cause d’une dégradation généralisée du risque des entreprises françaises.