Le rapport France 2025, que vient de remettre Jean Pisani-Ferry au gouvernement, oscille entre déjà-vu et imprécations. Utile ?
La France ira-t-elle mieux dans dix ans ?
Si la France veut tirer son épingle du jeu et répondre aux défis de 2025, le gouvernement va devoir redoubler d’effort, d’autant que le rapport France 2025 constate un net décrochage de l’économie française. C’est le message de Jean Pisani-Ferry qui tire la sonnette d’alarme dans son rapport intitulé « Quelle France dans dix ans ? »
Si l’on s’en tient au tableau et aux préconisations du commissaire général à la stratégie et à la prospective, la France de 2025 serait l’un des dix pays où il fait bon vivre selon les critères de l’OCDE.
Le chômage serait un problème résolu grâce au soutien à l’innovation impulsé par un gouvernement soucieux d’échanger avec ses concitoyens à travers le crowdsourcing, transformé en outil favori des administrations publiques pour améliorer leurs prestations. En 2025, obsédé par la nécessité de s’investir dans la prévention des risques, l’État providence ferait également son grand retour avec pour leitmotiv « mieux vaut prévenir que guérir ».
En dix ans, trois gouvernements seraient venus à bout de plusieurs décennies d’augmentation de la dette publique, accomplissant l’exploit de ramener celle-ci à 75 % du PIB contre 93,6 % au premier semestre 2014. Passées sous la barre des 50 % du PIB, les dépenses publiques ne plomberaient plus le pays, permettant aux dirigeants de surfer sur une vague de crédibilité auprès des Français. À décrypter les ambitions de ce rapport, nul doute, Jean Pisani-Ferry a vu grand. Trop peut-être… au regard des efforts à fournir.
Estimé à 1 % par Bercy, le taux de croissance du PIB pour 2014 a été réévalué en juin dernier par l’Insee à 0,7 %. Même scepticisme du côté de la Commission européenne qui met à mal les chiffres du chômage annoncés par le gouvernement Valls. Dix pour-cent des actifs pointent à Pôle emploi, et l’inversion de la courbe du chômage n’est en fait pas prévue avant 2015. Quant à la dette publique, il suffit de rembobiner le film et de revenir ne serait-ce qu’en 2004. Cette année-là, le déficit atteignait les mille milliards d’euros, ce que les experts alarmistes qualifiaient de « niveau pharaonique ». Une décennie plus tard, l’état d’urgence est à nouveau déclaré alors que la dette publique s’apprête à franchir le palier des 2 000 milliards d’euros. Le chef de l’État et ses ministres sont au plus bas dans les sondages avec une cote de popularité de François Hollande en berne et des prévisions gouvernementales sans cesse revues à la baisse. Une situation peu propice à l’adhésion réformatrice.
Aux mêmes problèmes, les mêmes solutions ?
Il était attendu au tournant. Mais Jean Pisani-Ferry ne fait pas preuve d’une grande originalité dans les leviers identifiés pour redresser la France à horizon 2025. Certaines solutions proposées dans le rapport ont déjà été mises en place. Le non-cumul des mandats par exemple, censé « revivifier la démocratie locale », faisait partie des promesses du parti socialiste il y a deux ans et la loi vient d’être votée par le Parlement.
Si l’on veut compter dans le peloton de tête de l’Union européenne, il faudrait par ailleurs perdre trois à six points de chômage. Pour cela, pas de recettes miracles explorées : il s’agit d’investir dans l’éducation et la formation continue, lutter contre les discriminations à l’embauche, construire une économie plus ouverte et innovante... Dans cette perspective, le rapport incite à porter à 50 % la part des PME innovantes grâce au soutien des acteurs privés et préconise d’augmenter le nombre d’entreprises de taille intermédiaire. Ici encore, les mesures ont déjà été votées. Dès le mois de juillet, la première incitation fiscale pour le corporate venture devrait être appliquée.
Suivre les indications du rapport se résume donc à ce fameux exercice d’équilibriste entre désengagement progressif et investissement massif de la puissance publique, dont le rôle consisterait surtout à garder un œil sur le compteur des dépenses qui ne devraient excéder 0,5 % de croissance par an en volume. En 2013, ce dernier affichait, après serrage de ceinture, 1,7 % de croissance des dépenses.
La ritournelle des partenaires sociaux
Au-delà de proposer quelques solutions nouvelles, ce rapport signe-t-il une énième injonction à se mettre au travail ? Mais comme le rappellent le bras de fer avec le haut patronat, la grève des cheminots ou la guerre d’usure avec les intermittents du spectacle et les marins de la SNCM, il semblerait que le problème français ne soit pas tant le manque d’idées que l’impossible consensus entre et avec les différents corps de métiers. La conférence sociale du 7 juillet, avec son lot de boycotts et autres menaces brandies par les organisations professionnelles, illustre les points de blocage qui freinent toute tentative de réforme, alors que le rapport souligne la nécessité de réformes d’envergure synonymes de stabilité. Le rapport de Jean Pisani-Ferry parle en effet de la nécessaire réévaluation du rôle de « quasi-législateur » des partenaires sociaux alors que leur légitimité est en baisse dans l’opinion. Il n’explique pas quelle place ces organismes représentatifs devraient occuper dans le système de la démocratie participative proposée, ni comment faire adopter ces mesures. Quand on sait que 80 % de la population se sent exclue des décisions politiques, rêver d’une « démocratie revivifiée » d’ici à dix ans relèverait presque de l’utopie.
Si l’on s’en tient au tableau et aux préconisations du commissaire général à la stratégie et à la prospective, la France de 2025 serait l’un des dix pays où il fait bon vivre selon les critères de l’OCDE.
Le chômage serait un problème résolu grâce au soutien à l’innovation impulsé par un gouvernement soucieux d’échanger avec ses concitoyens à travers le crowdsourcing, transformé en outil favori des administrations publiques pour améliorer leurs prestations. En 2025, obsédé par la nécessité de s’investir dans la prévention des risques, l’État providence ferait également son grand retour avec pour leitmotiv « mieux vaut prévenir que guérir ».
En dix ans, trois gouvernements seraient venus à bout de plusieurs décennies d’augmentation de la dette publique, accomplissant l’exploit de ramener celle-ci à 75 % du PIB contre 93,6 % au premier semestre 2014. Passées sous la barre des 50 % du PIB, les dépenses publiques ne plomberaient plus le pays, permettant aux dirigeants de surfer sur une vague de crédibilité auprès des Français. À décrypter les ambitions de ce rapport, nul doute, Jean Pisani-Ferry a vu grand. Trop peut-être… au regard des efforts à fournir.
Estimé à 1 % par Bercy, le taux de croissance du PIB pour 2014 a été réévalué en juin dernier par l’Insee à 0,7 %. Même scepticisme du côté de la Commission européenne qui met à mal les chiffres du chômage annoncés par le gouvernement Valls. Dix pour-cent des actifs pointent à Pôle emploi, et l’inversion de la courbe du chômage n’est en fait pas prévue avant 2015. Quant à la dette publique, il suffit de rembobiner le film et de revenir ne serait-ce qu’en 2004. Cette année-là, le déficit atteignait les mille milliards d’euros, ce que les experts alarmistes qualifiaient de « niveau pharaonique ». Une décennie plus tard, l’état d’urgence est à nouveau déclaré alors que la dette publique s’apprête à franchir le palier des 2 000 milliards d’euros. Le chef de l’État et ses ministres sont au plus bas dans les sondages avec une cote de popularité de François Hollande en berne et des prévisions gouvernementales sans cesse revues à la baisse. Une situation peu propice à l’adhésion réformatrice.
Aux mêmes problèmes, les mêmes solutions ?
Il était attendu au tournant. Mais Jean Pisani-Ferry ne fait pas preuve d’une grande originalité dans les leviers identifiés pour redresser la France à horizon 2025. Certaines solutions proposées dans le rapport ont déjà été mises en place. Le non-cumul des mandats par exemple, censé « revivifier la démocratie locale », faisait partie des promesses du parti socialiste il y a deux ans et la loi vient d’être votée par le Parlement.
Si l’on veut compter dans le peloton de tête de l’Union européenne, il faudrait par ailleurs perdre trois à six points de chômage. Pour cela, pas de recettes miracles explorées : il s’agit d’investir dans l’éducation et la formation continue, lutter contre les discriminations à l’embauche, construire une économie plus ouverte et innovante... Dans cette perspective, le rapport incite à porter à 50 % la part des PME innovantes grâce au soutien des acteurs privés et préconise d’augmenter le nombre d’entreprises de taille intermédiaire. Ici encore, les mesures ont déjà été votées. Dès le mois de juillet, la première incitation fiscale pour le corporate venture devrait être appliquée.
Suivre les indications du rapport se résume donc à ce fameux exercice d’équilibriste entre désengagement progressif et investissement massif de la puissance publique, dont le rôle consisterait surtout à garder un œil sur le compteur des dépenses qui ne devraient excéder 0,5 % de croissance par an en volume. En 2013, ce dernier affichait, après serrage de ceinture, 1,7 % de croissance des dépenses.
La ritournelle des partenaires sociaux
Au-delà de proposer quelques solutions nouvelles, ce rapport signe-t-il une énième injonction à se mettre au travail ? Mais comme le rappellent le bras de fer avec le haut patronat, la grève des cheminots ou la guerre d’usure avec les intermittents du spectacle et les marins de la SNCM, il semblerait que le problème français ne soit pas tant le manque d’idées que l’impossible consensus entre et avec les différents corps de métiers. La conférence sociale du 7 juillet, avec son lot de boycotts et autres menaces brandies par les organisations professionnelles, illustre les points de blocage qui freinent toute tentative de réforme, alors que le rapport souligne la nécessité de réformes d’envergure synonymes de stabilité. Le rapport de Jean Pisani-Ferry parle en effet de la nécessaire réévaluation du rôle de « quasi-législateur » des partenaires sociaux alors que leur légitimité est en baisse dans l’opinion. Il n’explique pas quelle place ces organismes représentatifs devraient occuper dans le système de la démocratie participative proposée, ni comment faire adopter ces mesures. Quand on sait que 80 % de la population se sent exclue des décisions politiques, rêver d’une « démocratie revivifiée » d’ici à dix ans relèverait presque de l’utopie.