Par Jean Estin, président. Estin & Co
Quelles stratégies gagnantes pour les activités sans croissance ?
Les activités sans croissance doivent générer des liquidités de façon significative et récurrente ou être vendues. Elles doivent être considérées de façon réaliste, en fonction de leur intérêt pour le groupe dans son ensemble et en motivant de façon adaptée les équipes. De nombreux leviers peuvent être actionnés pour y parvenir. Mais au final il faut maximiser les cash-flows.
Qu’est-ce qu’une «?vache à lait?» ? C’est une activité qui a crû fortement pendant dix à vingt ans, voire plus, en innovant régulièrement, en gagnant de nouveaux pays et segments de clientèle, en concentrant son marché et en y obtenant une position de leadership.
Elle ne croît plus aujourd’hui car le marché est mûr et concentré mais les équipes ont gardé leurs réflexes et ne peuvent accepter cette absence de croissance.
Les coûts induits augmentent au lieu de baisser, sans impacts correspondants sur les revenus. Les marges s’érodent alors qu’elles devraient être maximisées pour générer des cash-flows élevés et soutenir le développement d’autres activités du groupe dans des marchés à forts potentiels de croissance. Des petits concurrents se développent, plus simples et low costs, ou plus adaptés à certaines niches de clientèle, et reprennent des parts de marché.
Gérer une activité arrivée à maturité est donc complexe. L’enjeu est autant culturel et organisationnel que relevant de la simple rationalité économique et managériale.
Baisser les coûts
Dans des marchés mûrs et déjà fortement concentrés, il vaut mieux maximiser la génération de cash-flows pour pouvoir réinvestir ceux-ci dans d’autres activités en forte croissance plutôt que de tenter de gagner encore quelques points de parts de marché et/ou de relancer un marché qui structurellement ne peut plus l’être. Le rendement marginal de l’investissement est en effet fortement lié à la croissance du marché et à l’inverse de sa concentration.
Ceci exige de réduire au maximum tous les coûts et investissements qui contribuaient à la croissance de l’activité et de ne conserver que les coûts de croisière fortement optimisés. Selon les situations et industries, ces coûts de croissance représentent entre 5?% et 10?% du total des coûts. L’enjeu est donc critique.
Lorsque le leadership est clairement établi, il faut maintenir les parts de marché, et donc les barrières concurrentielles, mais pas au-delà. Toute ambition de croissance dans ces marchés, au-delà de leur croissance naturelle, entraîne une dilution de ressources.
L’analyse froide des «?coûts de croissance?» excédentaires et leur suppression au niveau de l’activité sont donc critiques.
Redéployer les ressources
Ces coûts et investissements de croissance ne doivent pas nécessairement être supprimés au niveau du groupe. Il faut les redéployer là où ils sont productifs et induisent de la croissance ; investissements de R&D, coûts de marketing, budgets publi-promotionnels, coûts commerciaux, Capex, baisses de prix et remises, développement des équipes dirigeantes… Tous ces coûts et investissements doivent être alloués en priorité aux activités en forte croissance.
Toutes choses égales par ailleurs, ils doivent représenter une part significativement plus faible des revenus dans des activités sans croissance alors que c’est la situation inverse qui prévaut aujourd’hui dans la plupart des grands groupes. Ceux-ci sous-investissent dans les activités de croissance parce qu’ils surinvestissent dans les activités sans croissance.
Réorganiser le groupe
Il est difficile d’optimiser les coûts des «?vaches à lait?» des grands groupes sans modifier profondément l’organisation de ceux-ci. Par exemple, la R&D est souvent logée dans l’activité ou le pays d’origine du groupe ou constituée d’équipes originaires de cette activité ou pays.
Il faut des départements ou équipes R&D ou marketing dédiés aux activités et marchés en forte croissance. Lorsqu’il y a une valeur à la concentration ou à la coordination de ces fonctions, celles-ci doivent être gérées à l’échelon du groupe mais localisées physiquement –?en grande partie?– dans les activités ou les marchés en forte croissance. S’il y a une valeur à maintenir des équipes de recherche dans des pays mûrs, il faut partiellement peupler ces fonctions d’équipes provenant des activités et marchés en croissance forte.
Différencier les objectifs du management
Une vache à lait doit être gérée par la rentabilité, les cash-flows nets (maximisation des cash-flows générés par l’exploitation, minimisation des investissements, minimisation du fonds de roulement) et la part de marché minimale à maintenir. Au contraire, une activité en forte croissance doit être gérée par la croissance, la rentabilité et les gains de part de marché. Il n’y a rien de plus destructeur pour la croissance et la rentabilité d’un groupe que la moyennisation des objectifs et l’homogénéisation des critères de performance.Les équipes d’une activité sans croissance doivent être valorisées car elles remplissent une mission critique pour le groupe : générer les cash-flows nécessaires au financement de sa croissance. Elles doivent pouvoir gagner autant et avoir les mêmes possibilités de promotion que celles d’une activité à forte croissance, sur la base d’objectifs structurellement différents.
Faire circuler les équipes
Une équipe dirigeante qui passe dix ans dans la même activité défend son activité. Elle ne défend plus le groupe. Elle peut difficilement appréhender qu’une activité doive contribuer différemment à la valeur d’un groupe à chaque étape de son cycle de vie.
Il est sain de faire tourner les équipes régulièrement à travers différentes activités, fonctions et géographies. Si ce n’est pas le cas, il faut au minimum remplacer les équipes dirigeantes d’une activité lorsque celle-ci mûrit et doit être gérée différemment, alors même qu’elles ont réussi et fait le succès de cette activité.
Relocaliser les directions générales
Les directions générales des grands groupes sont le plus souvent issues des activités et marchés qui ont fait le succès historique du groupe et s’en détachent difficilement. Mais pour bâtir le futur d’un groupe, il vaut mieux être proche physiquement sinon culturellement des nouveaux marchés, clients, équipes, dans lesquels le groupe investit. Qu’est-ce qui justifie rationnellement que la totalité de l’équipe dirigeante d’un grand groupe soit aujourd’hui localisée en Europe, au cœur de ses vaches à lait historiques, si plus de la moitié de ses revenus, clients, équipes, investissements (et progressivement actionnaires !) et la totalité de sa croissance se trouvent en Asie ?
Pour créer de la valeur, les coûts, les investissements et le management doivent précéder la croissance.
Chaque activité au sein d’un groupe doit être gérée en fonction de sa position au sein de son cycle de vie. De nombreux leviers peuvent être actionnés pour y parvenir. Mais au final il faut maximiser les cash-flows. Tout investissement dans une «?vache à lait?» est un sous-investissement symétrique dans une autre activité en forte croissance du groupe et par conséquent un frein à la croissance du groupe dans son ensemble. Dans les activités sans croissance, il faut baisser les coûts.
Qu’est-ce qu’une «?vache à lait?» ? C’est une activité qui a crû fortement pendant dix à vingt ans, voire plus, en innovant régulièrement, en gagnant de nouveaux pays et segments de clientèle, en concentrant son marché et en y obtenant une position de leadership.
Elle ne croît plus aujourd’hui car le marché est mûr et concentré mais les équipes ont gardé leurs réflexes et ne peuvent accepter cette absence de croissance.
Les coûts induits augmentent au lieu de baisser, sans impacts correspondants sur les revenus. Les marges s’érodent alors qu’elles devraient être maximisées pour générer des cash-flows élevés et soutenir le développement d’autres activités du groupe dans des marchés à forts potentiels de croissance. Des petits concurrents se développent, plus simples et low costs, ou plus adaptés à certaines niches de clientèle, et reprennent des parts de marché.
Gérer une activité arrivée à maturité est donc complexe. L’enjeu est autant culturel et organisationnel que relevant de la simple rationalité économique et managériale.
Baisser les coûts
Dans des marchés mûrs et déjà fortement concentrés, il vaut mieux maximiser la génération de cash-flows pour pouvoir réinvestir ceux-ci dans d’autres activités en forte croissance plutôt que de tenter de gagner encore quelques points de parts de marché et/ou de relancer un marché qui structurellement ne peut plus l’être. Le rendement marginal de l’investissement est en effet fortement lié à la croissance du marché et à l’inverse de sa concentration.
Ceci exige de réduire au maximum tous les coûts et investissements qui contribuaient à la croissance de l’activité et de ne conserver que les coûts de croisière fortement optimisés. Selon les situations et industries, ces coûts de croissance représentent entre 5?% et 10?% du total des coûts. L’enjeu est donc critique.
Lorsque le leadership est clairement établi, il faut maintenir les parts de marché, et donc les barrières concurrentielles, mais pas au-delà. Toute ambition de croissance dans ces marchés, au-delà de leur croissance naturelle, entraîne une dilution de ressources.
L’analyse froide des «?coûts de croissance?» excédentaires et leur suppression au niveau de l’activité sont donc critiques.
Redéployer les ressources
Ces coûts et investissements de croissance ne doivent pas nécessairement être supprimés au niveau du groupe. Il faut les redéployer là où ils sont productifs et induisent de la croissance ; investissements de R&D, coûts de marketing, budgets publi-promotionnels, coûts commerciaux, Capex, baisses de prix et remises, développement des équipes dirigeantes… Tous ces coûts et investissements doivent être alloués en priorité aux activités en forte croissance.
Toutes choses égales par ailleurs, ils doivent représenter une part significativement plus faible des revenus dans des activités sans croissance alors que c’est la situation inverse qui prévaut aujourd’hui dans la plupart des grands groupes. Ceux-ci sous-investissent dans les activités de croissance parce qu’ils surinvestissent dans les activités sans croissance.
Réorganiser le groupe
Il est difficile d’optimiser les coûts des «?vaches à lait?» des grands groupes sans modifier profondément l’organisation de ceux-ci. Par exemple, la R&D est souvent logée dans l’activité ou le pays d’origine du groupe ou constituée d’équipes originaires de cette activité ou pays.
Il faut des départements ou équipes R&D ou marketing dédiés aux activités et marchés en forte croissance. Lorsqu’il y a une valeur à la concentration ou à la coordination de ces fonctions, celles-ci doivent être gérées à l’échelon du groupe mais localisées physiquement –?en grande partie?– dans les activités ou les marchés en forte croissance. S’il y a une valeur à maintenir des équipes de recherche dans des pays mûrs, il faut partiellement peupler ces fonctions d’équipes provenant des activités et marchés en croissance forte.
Différencier les objectifs du management
Une vache à lait doit être gérée par la rentabilité, les cash-flows nets (maximisation des cash-flows générés par l’exploitation, minimisation des investissements, minimisation du fonds de roulement) et la part de marché minimale à maintenir. Au contraire, une activité en forte croissance doit être gérée par la croissance, la rentabilité et les gains de part de marché. Il n’y a rien de plus destructeur pour la croissance et la rentabilité d’un groupe que la moyennisation des objectifs et l’homogénéisation des critères de performance.Les équipes d’une activité sans croissance doivent être valorisées car elles remplissent une mission critique pour le groupe : générer les cash-flows nécessaires au financement de sa croissance. Elles doivent pouvoir gagner autant et avoir les mêmes possibilités de promotion que celles d’une activité à forte croissance, sur la base d’objectifs structurellement différents.
Faire circuler les équipes
Une équipe dirigeante qui passe dix ans dans la même activité défend son activité. Elle ne défend plus le groupe. Elle peut difficilement appréhender qu’une activité doive contribuer différemment à la valeur d’un groupe à chaque étape de son cycle de vie.
Il est sain de faire tourner les équipes régulièrement à travers différentes activités, fonctions et géographies. Si ce n’est pas le cas, il faut au minimum remplacer les équipes dirigeantes d’une activité lorsque celle-ci mûrit et doit être gérée différemment, alors même qu’elles ont réussi et fait le succès de cette activité.
Relocaliser les directions générales
Les directions générales des grands groupes sont le plus souvent issues des activités et marchés qui ont fait le succès historique du groupe et s’en détachent difficilement. Mais pour bâtir le futur d’un groupe, il vaut mieux être proche physiquement sinon culturellement des nouveaux marchés, clients, équipes, dans lesquels le groupe investit. Qu’est-ce qui justifie rationnellement que la totalité de l’équipe dirigeante d’un grand groupe soit aujourd’hui localisée en Europe, au cœur de ses vaches à lait historiques, si plus de la moitié de ses revenus, clients, équipes, investissements (et progressivement actionnaires !) et la totalité de sa croissance se trouvent en Asie ?
Pour créer de la valeur, les coûts, les investissements et le management doivent précéder la croissance.
Chaque activité au sein d’un groupe doit être gérée en fonction de sa position au sein de son cycle de vie. De nombreux leviers peuvent être actionnés pour y parvenir. Mais au final il faut maximiser les cash-flows. Tout investissement dans une «?vache à lait?» est un sous-investissement symétrique dans une autre activité en forte croissance du groupe et par conséquent un frein à la croissance du groupe dans son ensemble. Dans les activités sans croissance, il faut baisser les coûts.