Edoh Kossi Amenounvé (BRVM) : « En Afrique, la capitalisation boursière atteint 1090 milliards de dollars»

Décideurs. La BRVM fait partie des vingt-quatre places boursières africaines. Quel est son rôle dans le financement du développement des pays membres de l’UEMOA ?

Edoh Kossi Amenounvé. Au cours des vingt dernières années, les marchés boursiers africains ont évolué remarquablement, le nombre de bourses africaines est ainsi passé de quatorze en 1995 à vingt-quatre en 2015, avec une capitalisation atteignant plus de 1 090 milliards de dollars. En émettant des emprunts obligataires par appel public à l’épargne (APE), les États peuvent ainsi financer leurs projets d’infrastructures. Quant aux entreprises privées, la Bourse peut leur permettre de renforcer leur structure financière et assurer le financement de leur croissance par l’émission de titres de dettes comme les emprunts obligataires et/ou de titres de capital sur le marché des actions. En seize années d’activités, 3 887,1 milliards de francs CFA ont été levés sur le marché primaire dont 83 % en emprunt obligataire, soit 3 243 milliards - 68 % par les États pour le financement de leurs projets d’infrastructures et le secteur privé à hauteur de 15 %. La BRVM, qui occupe actuellement la sixième place sur les vingt-quatre Bourses africaines, joue également un rôle important dans la mobilisation de l’épargne longue disponible pour l’orienter vers des investissements productifs.

Décideurs. On observe depuis quelques années un net regain d’intérêt des entreprises africaines pour les fonds de private equity au détriment d’une introduction en Bourse. Quelle est la stratégie de la BRVM pour inciter de nouvelles entreprises à la rejoindre ?

E. K. A. Dans le cadre d’une intervention en Bourse, tout investisseur est principalement guidé par les notions de rentabilité et de liquidité du marché. Il y a deux catégories de fonds d’investissement qui opèrent dans la sous-région [UEMOA] : ceux qui interviennent sur la BRVM et ceux qui investissent directement dans les entreprises non cotées. À fin 2013, la première catégorie représentait 47 % de la valeur des transactions. Par ailleurs, nous démarchons des émetteurs potentiels et échangeons en permanence avec les comités de privatisation des États de l’Union pour l’intégration de la Bourse dans les programmes de privatisation.

Décideurs. Vous avez amorcé un processus de rapprochement avec les autres Bourses des pays de la Cedeao ? À quelle stratégie obéit ce schéma ?

E. K. A. Les autorités de la Cedeao envisagent, à l’horizon 2020, l’intégration de cet espace tant sur le volet économique que sur celui des marchés de capitaux. À cet effet, les régulateurs des marchés financiers, les Bourses et les dépositaires centraux ont signé une convention portant création du Conseil de l’intégration des marchés de capitaux ouest-africains (West African Capital Markets Integration Council-Wacmic) à Abuja (Nigéria) le 18 janvier 2013. Le Wacmic a pour mission de piloter et de mener à son terme et à bonne date, l’intégration des marchés financiers de la Cedeao. Ce rapprochement des places va sans nul doute contribuer à améliorer la liquidité des places boursières de notre espace communautaire.

Décideurs. En tant qu’instrument de financement de long terme, la BRVM souhaite également accompagner l’introduction en Bourse des PME/PMI. Comment comptez-vous vous y prendre ?

E. K. A. En effet, la BRVM envisage de contribuer au financement à long terme des PME/PMI. Cela se fera par l’ouverture d’un troisième compartiment sur le marché des actions qui leur sera dédié ainsi qu’aux entreprises à fort potentiel de croissance.

Ce compartiment bénéficiera, au-delà de mesures fiscales incitatives, de dispositions d’accompagnement, dont l’accès à deux fonds, l’un servant à préparer les émetteurs potentiels en vue d’une cotation et l’autre préfinançant tous les frais liés à leur introduction et leur maintien à la cote pour une certaine durée.

Propos receuillis par André-Franck Ahoyo & Elodie Sigaux