Le président du Cegid évoque la croissance de son groupe et l'évolution de son modèle économique.
Jean-Michel Aulas, Cegid (2/2) : «Notre principe : l'indépendance financière !»
Décideurs. Vous avez vous-même dû faire face à des échecs ?
J.-M.? A. En 1987, lorsque nous avons tenté de racheter CCMX, notre principal concurrent, en réalisant une offre publique d’échange (OPE), Cegid était alors six fois plus petit que cette entreprise. Mais nous avions un modèle économique qui nous permettait de générer beaucoup de cash-flow. Hélas, un certain nombre d’acteurs économiques se sont drapés dans leur frilosité traditionnelle et ont considéré que cette opération était vouée à l’échec. L’histoire ne leur a finalement pas donné raison puisqu’en 2004 nous avons pris le contrôle de CCMX en finançant ce rachat par nos fonds propres. À d’autres moments aussi, les banques ont refusé de nous accompagner dans nos projets de croissance externe ou nos opérations de développement.
Décideurs. Existe-t-il des recettes ou tout du moins des techniques éprouvées que vous appliquez pour pérenniser les activités de votre entreprise ?
J.-M.?A. Arnaud Montebourg, ministre de l'Économie, du Redressement productif et du Numérique, soulignait récemment à l’occasion d’un forum sur le financement que «?les banquiers étaient des gens qui prêtaient leurs parapluies quand il faisait très beau et qui vous les reprenaient lorsque la pluie commençait à tomber?». Il est vrai que l’un de nos principes a toujours été de ne pas avoir à demander de l’argent aux établissements bancaires lorsque nous en avions besoin, mais de leur demander lorsque ce n’était pas le cas. Autrement dit, nous avons essayé d’anticiper au mieux nos besoins. Aujourd’hui, lorsqu’un chef d’entreprise souhaite bénéficier de l’appui des banques, il doit donner en garantie un équivalent de ce qu’il demande. Ce constat est très dommageable car les emplois de demain sont liés à la capacité d’innovation et de prise de risques des jeunes entrepreneurs et a fortiori à la capacité des structures financières à les accompagner.
Décideurs. Comment avez-vous financé le développement de Cegid ?
J.-M.?A. Dès le lancement de Cegid, nous avions fait appel à l’épargne de proximité, et ce, sous toutes ses formes. Des clients, mais également des sociétés de développement régional et des actionnaires de proximité nous ont ainsi apporté leur soutien financier. Durant nos trois premières années, nous avons, en outre, bénéficié d’un dispositif fiscal remarquable qui ouvrait droit aux sociétés en création à une défiscalisation de leurs résultats.
Je crois que beaucoup font l’erreur de partir du postulat que toute société en création doit faire des pertes. Or, il me semble qu’il faut partir du principe inverse : tout modèle doit trouver rapidement sa finalité d’autofinancement.
Grâce à cet avantage fiscal, l’État assure aux entreprises une capacité d’autofinancement. Et si, à l’instar de Cegid, les entreprises prospèrent, le retour sur investissement devient alors considérable. Si l’on calcule l’ensemble des impôts et des cotisations sociales payés par notre groupe en trente ans, je pense pouvoir dire, sans trop m’avancer, que le résultat serait très important ! Sans compter ce qui, au fond, compte le plus, la création et la pérennisation de plus de 2 000 emplois dans le numérique.
Après trois ans d’existence, nous avons ensuite fait le choix d’introduire le groupe en Bourse. Une stratégie qui s’est révélée payante, car cela nous a donné les moyens de poursuivre notre développement, par croissance externe notamment. À ce titre, j’ai la conviction que les marchés financiers restent un outil formidable d’accélérateur de croissance pouvant venir pallier, en partie, le retrait des établissements prêteurs.
Décideurs. Comment la société a-t-elle préparé le virage de la révolution numérique ?
J.-M.?A. À sa création, Cegid était une entreprise de service globale, puis nous sommes revenus à une stratégie de pure player du progiciel. Avec l’apparition du cloud, nous entrons dans une nouvelle phase dans laquelle nous avons déjà défini une stratégie de développement technologique en partenariat avec un leader, en l’occurrence IBM.
Dans ce cadre, nous avons pris le parti de nous occuper de logiciels délivrés sous forme de services (Software as a Service – SaaS) en nous appuyant sur IBM pour la réalisation d’une centrale numérique (cloud) dédiée à Cegid. Et les résultats n’ont pas tardé à se faire sentir, car nous sommes devenus l’un des leaders en matière de cloud et de Web services avec une croissance solide et de bonnes perspectives. Ce changement de modèle n’était pourtant pas si évident que cela. En pratique, lorsqu’hier nous vendions 100 de logiciel, aujourd’hui nous enregistrons le chiffre d’affaires SaaS sur la durée du contrat (36 à 48 mois). Notre modèle de vente qui était donc ponctuel est devenu un modèle fortement récurrent.
Retrouvez la première partie de cette interview en cliquant ici
Propos recueillis par Aurélien Florin
J.-M.? A. En 1987, lorsque nous avons tenté de racheter CCMX, notre principal concurrent, en réalisant une offre publique d’échange (OPE), Cegid était alors six fois plus petit que cette entreprise. Mais nous avions un modèle économique qui nous permettait de générer beaucoup de cash-flow. Hélas, un certain nombre d’acteurs économiques se sont drapés dans leur frilosité traditionnelle et ont considéré que cette opération était vouée à l’échec. L’histoire ne leur a finalement pas donné raison puisqu’en 2004 nous avons pris le contrôle de CCMX en finançant ce rachat par nos fonds propres. À d’autres moments aussi, les banques ont refusé de nous accompagner dans nos projets de croissance externe ou nos opérations de développement.
Décideurs. Existe-t-il des recettes ou tout du moins des techniques éprouvées que vous appliquez pour pérenniser les activités de votre entreprise ?
J.-M.?A. Arnaud Montebourg, ministre de l'Économie, du Redressement productif et du Numérique, soulignait récemment à l’occasion d’un forum sur le financement que «?les banquiers étaient des gens qui prêtaient leurs parapluies quand il faisait très beau et qui vous les reprenaient lorsque la pluie commençait à tomber?». Il est vrai que l’un de nos principes a toujours été de ne pas avoir à demander de l’argent aux établissements bancaires lorsque nous en avions besoin, mais de leur demander lorsque ce n’était pas le cas. Autrement dit, nous avons essayé d’anticiper au mieux nos besoins. Aujourd’hui, lorsqu’un chef d’entreprise souhaite bénéficier de l’appui des banques, il doit donner en garantie un équivalent de ce qu’il demande. Ce constat est très dommageable car les emplois de demain sont liés à la capacité d’innovation et de prise de risques des jeunes entrepreneurs et a fortiori à la capacité des structures financières à les accompagner.
Décideurs. Comment avez-vous financé le développement de Cegid ?
J.-M.?A. Dès le lancement de Cegid, nous avions fait appel à l’épargne de proximité, et ce, sous toutes ses formes. Des clients, mais également des sociétés de développement régional et des actionnaires de proximité nous ont ainsi apporté leur soutien financier. Durant nos trois premières années, nous avons, en outre, bénéficié d’un dispositif fiscal remarquable qui ouvrait droit aux sociétés en création à une défiscalisation de leurs résultats.
Je crois que beaucoup font l’erreur de partir du postulat que toute société en création doit faire des pertes. Or, il me semble qu’il faut partir du principe inverse : tout modèle doit trouver rapidement sa finalité d’autofinancement.
Grâce à cet avantage fiscal, l’État assure aux entreprises une capacité d’autofinancement. Et si, à l’instar de Cegid, les entreprises prospèrent, le retour sur investissement devient alors considérable. Si l’on calcule l’ensemble des impôts et des cotisations sociales payés par notre groupe en trente ans, je pense pouvoir dire, sans trop m’avancer, que le résultat serait très important ! Sans compter ce qui, au fond, compte le plus, la création et la pérennisation de plus de 2 000 emplois dans le numérique.
Après trois ans d’existence, nous avons ensuite fait le choix d’introduire le groupe en Bourse. Une stratégie qui s’est révélée payante, car cela nous a donné les moyens de poursuivre notre développement, par croissance externe notamment. À ce titre, j’ai la conviction que les marchés financiers restent un outil formidable d’accélérateur de croissance pouvant venir pallier, en partie, le retrait des établissements prêteurs.
Décideurs. Comment la société a-t-elle préparé le virage de la révolution numérique ?
J.-M.?A. À sa création, Cegid était une entreprise de service globale, puis nous sommes revenus à une stratégie de pure player du progiciel. Avec l’apparition du cloud, nous entrons dans une nouvelle phase dans laquelle nous avons déjà défini une stratégie de développement technologique en partenariat avec un leader, en l’occurrence IBM.
Dans ce cadre, nous avons pris le parti de nous occuper de logiciels délivrés sous forme de services (Software as a Service – SaaS) en nous appuyant sur IBM pour la réalisation d’une centrale numérique (cloud) dédiée à Cegid. Et les résultats n’ont pas tardé à se faire sentir, car nous sommes devenus l’un des leaders en matière de cloud et de Web services avec une croissance solide et de bonnes perspectives. Ce changement de modèle n’était pourtant pas si évident que cela. En pratique, lorsqu’hier nous vendions 100 de logiciel, aujourd’hui nous enregistrons le chiffre d’affaires SaaS sur la durée du contrat (36 à 48 mois). Notre modèle de vente qui était donc ponctuel est devenu un modèle fortement récurrent.
Retrouvez la première partie de cette interview en cliquant ici
Propos recueillis par Aurélien Florin