Qui aurait cru que cet ingénieur inconnu du milieu financier jusqu'en 2009 tiendrait les cordons de la Bourse parisienne ?
Portrait : Dominique Cerutti, CEO, Euronext
Mardi 17 septembre à 10 heures, 39 rue Cambon dans le 1er arrondissement de Paris : rendez-vous est pris dans les locaux d’Euronext, à deux pas du palais Brongniart et de la Cour des Comptes. Mais plus pour très longtemps : l’opérateur boursier va bientôt changer d’air. Adieu la symbolique cloche qui sonnait l’ouverture de la Bourse de Paris du temps de la Société des Bourses françaises, l’ancètre d’Euronext. Direction La Défense ? « Peut-être », nous répond Dominique Cerutti. « C’est le premier centre d’affaires en Europe », avance-t-il avant d’ajouter que d’autres destinations sont aussi à l’étude. L’opération s’inscrit dans sa stratégie d’optimisation du groupe : réaliser soixante millions d’euros d’économies en trois ans. Ambitieux, mais pas impossible pour cet homme habitué à relever des défis.
Mathieu Marcinkiewicz
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L’inconnu
Qui aurait cru que cet ingénieur de formation originaire de Manosque dans les Alpes de Haute-Provence (04), au teint toujours hâlé, aurait pris la tête d’Euronext en 2009 ? Personne. Son nom était tout simplement inconnu du milieu des marchés bancaires et financiers. Ce qui ne l’a pas empêché de faire prendre un véritable virage stratégique à Euronext aux antipodes de son prédécesseur, l’énarque Jean-François Théodore. Le parcours de Dominique Cerutti chez IBM l’a propulsé dans les plus hautes sphères de la stratégie d’entreprise. Cela explique sans doute son énergie et sa motivation à vouloir toujours innover et emmener Euronext au plus haut.L’industriel stratège
Lorsqu’il évoque son ambition pour la place parisienne, l’homme n’hésite pas à prendre le général de Gaulle en exemple afin « que la France mène une véritable politique industrielle avec une vraie stratégie de place ». Il s’agit pour lui « de bâtir un ensemble industriel cohérent avec Clearnet, Euroclear, Euronext, Europlace et de saisir les bonnes opportunités ». Il enfonce le clou : « C’est typiquement le genre d’initiatives qui a manqué à la place de Paris dans les deux dernières décennies. » L’une d’elles, dont il est fier, est le lancement d’Enternext – la Bourse des PME –, qu’il a voulu et porté sur les fonds baptismaux d’Euronext courant 2013 : « Nous étions encore au sein du groupe Nyse-Euronext. Il a fallu que je me batte personnellement pour l'imposer », explique-t-il. Pari réussi, puisque cette Bourse des PME connaît aujourd’hui un grand succès.Le coureur de fond(s)
L’endurance de Dominique Cerutti s’explique sans doute par ses deux passions : le jogging et la plongée. Ses dix-huit derniers mois ont été occupés par des opérations lourdes : le rachat de Nyse -Euronext par ICE, la scission d’Euronext de Nyse, la préparation de l’IPO, le road-show à la recherche de fonds, la création d’un groupe de referantial holders… Tout cela – et même plus encore – en à peine dix-huit mois. « On travaillait jour et nuit » confie-t-il. Dominique Cerutti se souvient d’ailleurs du moment où, à Boston, il a compris que le book était couvert et que l’IPO d’Euronext allait être un succès : « C’était un peu comme un cycliste qui arrive au sommet de la montagne et qui s’apprête à savourer la descente », un sentiment de fierté unique du chemin parcouru. Ses journées aujourd’hui ne sont guère plus calmes. À notre arrivée, Dominique Cerutti rentrait d’un road-show de quinze jours pendant lesquels il a parcouru une douzaine de villes dans différent pays. Un vrai marathon ! Pour autant, il demeure proche de ses collaborateurs avec lesquels « il se réunit régulièrement », tout comme ses actionnaires avec qui il échange « sur la stratégie d’Euronext ». Sa devise – qu’il emprunte à Rudyard Kipling – marque sans doute le caractère déterminé de l’homme : « Si tu veux tracer ton sillon droit, accroche ta charrue à une étoile. » Elle reflète, selon lui, la différence entre une stratégie d’entreprise délibérée et une stratégie émergente. Avec Euronext entre ses mains, la route du succès est bien tracée.Mathieu Marcinkiewicz
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