«Les banquiers centraux vendent une forward guidance qui n’est que du vieux vin dans une nouvelle bouteille»
Entretien avec Andreas Höfert, chef économiste wealth management Europe, UBS
Décideurs. Avez-vous été surpris par le choix de Ben Bernanke de maintenir la politique ultra-accommodante initiée par la Fed depuis le début de l’année ?
Andreas Höfert. Certes l’économie américaine a connu des jours meilleurs mais tous les voyants sont aujourd’hui au vert pâle, la croissance oscille entre 2 % et 2,5 %... Il serait donc temps de réduire l’expansion monétaire. La Fed a néanmoins pris le parti de maintenir le cap. Plusieurs raisons expliquent cela. Premièrement, la banque centrale américaine a certainement voulu anticiper la confrontation parlementaire qui a eu lieu en octobre et qui était annoncée depuis mars. Deuxièmement, la réaction des marchés a été telle qu’il n’y avait pas besoin de faire quoi que ce soit. Reste à savoir quand la Fed osera infléchir sa politique de soutien à la reprise économique. Car aujourd’hui, les banquiers centraux vendent une forward guidance qui n’est que du vieux vin dans une nouvelle bouteille.
Décideurs. Quelles évolutions prévoyez-vous pour la zone euro dans les prochains mois ?
A. H. Même si les grands déséquilibres ont commencé à se réduire en zone euro, il persiste toujours un problème de gestion des finances publiques, auquel s’ajoute un problème de compétitivité. La balance commerciale de l’Espagne est à l’équilibre, ce qui est un point plutôt très positif. Dans certains pays comme l’Italie, le Portugal et l’Espagne, les coûts unitaires du travail ont diminué significativement. À terme, la France pourrait avoir un problème de compétitivité si elle ne se réforme pas très prochainement.
Décideurs. Le modèle français ne fonctionne plus selon vous ?
A. H. Le modèle économique marche bien en vase clos, mais face à la mondialisation celui-ci est plus difficilement défendable. Le modèle français est tourné vers la qualité de vie, contrairement à la plupart des pays où il y a un réel nivellement vers le bas. Aujourd’hui, l’objectif de ces derniers, c’est travailler plus pour consommer plus.
Mais le problème majeur en France se situe au niveau de la fiscalité. Non pas que cette dernière soit trop élevée mais les Français ont surtout le sentiment de ne rien recevoir en retour.
Décideurs. En Europe, l’année 2014 est-elle encore celle de tous les dangers ?
A. H. Certes l’Europe sort de la récession mais elle reste fragile. La crise de l’euro est loin d’être terminée et des tensions restent très présentes. En 2014, les risques seront nombreux. Il plane un danger lié à l’instabilité forte des pays du Sud. Il faudra faire preuve de vigilance et être attentif aux résultats des élections européennes qui se tiendront l’année prochaine. La seconde inconnue est celle inhérente aux taux d’intérêt des banques en Europe. Ces derniers ont remonté après l’annonce du tapering aux États-Unis. Il faudra que la BCE réagisse si les taux d’intérêt des banques en Europe continuent à augmenter durant l’année 2014.
Enfin, la croissance des pays européens ne repose pas aujourd’hui sur l’expansion du crédit mais sur l’exportation. Par conséquent, cette dernière ne va pas perdurer sur le long terme car elle est fortement tributaire de ce qui se passe sur les marchés américain et émergents.
Emilie Vidaud
Andreas Höfert. Certes l’économie américaine a connu des jours meilleurs mais tous les voyants sont aujourd’hui au vert pâle, la croissance oscille entre 2 % et 2,5 %... Il serait donc temps de réduire l’expansion monétaire. La Fed a néanmoins pris le parti de maintenir le cap. Plusieurs raisons expliquent cela. Premièrement, la banque centrale américaine a certainement voulu anticiper la confrontation parlementaire qui a eu lieu en octobre et qui était annoncée depuis mars. Deuxièmement, la réaction des marchés a été telle qu’il n’y avait pas besoin de faire quoi que ce soit. Reste à savoir quand la Fed osera infléchir sa politique de soutien à la reprise économique. Car aujourd’hui, les banquiers centraux vendent une forward guidance qui n’est que du vieux vin dans une nouvelle bouteille.
Décideurs. Quelles évolutions prévoyez-vous pour la zone euro dans les prochains mois ?
A. H. Même si les grands déséquilibres ont commencé à se réduire en zone euro, il persiste toujours un problème de gestion des finances publiques, auquel s’ajoute un problème de compétitivité. La balance commerciale de l’Espagne est à l’équilibre, ce qui est un point plutôt très positif. Dans certains pays comme l’Italie, le Portugal et l’Espagne, les coûts unitaires du travail ont diminué significativement. À terme, la France pourrait avoir un problème de compétitivité si elle ne se réforme pas très prochainement.
Décideurs. Le modèle français ne fonctionne plus selon vous ?
A. H. Le modèle économique marche bien en vase clos, mais face à la mondialisation celui-ci est plus difficilement défendable. Le modèle français est tourné vers la qualité de vie, contrairement à la plupart des pays où il y a un réel nivellement vers le bas. Aujourd’hui, l’objectif de ces derniers, c’est travailler plus pour consommer plus.
Mais le problème majeur en France se situe au niveau de la fiscalité. Non pas que cette dernière soit trop élevée mais les Français ont surtout le sentiment de ne rien recevoir en retour.
Décideurs. En Europe, l’année 2014 est-elle encore celle de tous les dangers ?
A. H. Certes l’Europe sort de la récession mais elle reste fragile. La crise de l’euro est loin d’être terminée et des tensions restent très présentes. En 2014, les risques seront nombreux. Il plane un danger lié à l’instabilité forte des pays du Sud. Il faudra faire preuve de vigilance et être attentif aux résultats des élections européennes qui se tiendront l’année prochaine. La seconde inconnue est celle inhérente aux taux d’intérêt des banques en Europe. Ces derniers ont remonté après l’annonce du tapering aux États-Unis. Il faudra que la BCE réagisse si les taux d’intérêt des banques en Europe continuent à augmenter durant l’année 2014.
Enfin, la croissance des pays européens ne repose pas aujourd’hui sur l’expansion du crédit mais sur l’exportation. Par conséquent, cette dernière ne va pas perdurer sur le long terme car elle est fortement tributaire de ce qui se passe sur les marchés américain et émergents.
Emilie Vidaud