Créé en 1996 par Christian Rey, Marseille Innovation est le plus grand centre européen d’entreprises et d’innovation (CEEI) de la région PACA. Il compte quatre pépinières et hôtels d’entreprises pour héberger et accompagner des start-up en phase de d’amorçage. Son fondateur et directeur revient sur l’ouverture de son dernier incubateur.

Décideurs. « Accélérateur de croissance » est votre slogan. Comment accompagnez-vous les start-up ?

Christian Rey. Marseille innovation cultive depuis toujours une double ambition : être à la fois accélérateur de croissance et attracteur de talents. Nous proposons ainsi un accompagnement et un coaching complet personnalisé pendant quatre ans, destiné à couvrir les phases clés des start-up innovantes, allant de la création au développement. Nous offrons un environnement, des locaux, des conseils... Ce n’est certes pas original, mais nous sommes désormais présents dans des lieux centraux. Marseille Innovation est né sur un technopôle tourné vers les sciences de l’ingénieur et a rapidement pris une dimension numérique avec l’évolution de la technologie. La dynamique que nous avons engagée depuis vingt ans sur les deux sites du technopôle de Château-Gombert (13e arrondissement de Marseille) a produit ses fruits et assure maintenant un tiers des emplois sur le secteur du numérique !

Quelles synergies espérez-vous créer ?

Nos programmes aident les grandes entreprises à se transformer. Cinq ans en arrière, les grands groupes et les start-up évoluaient dans deux mondes bien séparés et les gros mangeaient les petits. Aujourd’hui, ils cohabitent ensemble et s’apportent mutuellement une expertise et une expérience particulière. De plus, toutes les banques majeures ont pris conscience du violent impact du digital sur leurs activités. Elles se dotent alors d’espaces où elles peuvent expérimenter des concepts en lien avec la transformation numérique, ce qui passe par l’accueil de start-up. Elles ont une pression maximale et se rapprochent alors d’écosystèmes comme les nôtres afin de trouver une partie des solutions à leurs problèmes. C’est une situation « gagnant-gagnant » ! Les petites et jeunes entreprises grandissent plus vite et les grandes s’habituent à leur présence.

Comment se répartissent vos différentes pépinières ?

Marseille Innovation dispose maintenant de quatre lieux d’accélération pour start-up, favorisant l’échange et le partage entre jeunes entrepreneurs. L’Hôtel technologique s’axe sur le secteur du numérique et des sciences de l’ingénieur, l’Hôtel Technoptic sur celui des technologies de l’optique, de la photonique et des objets connectés, et le Pôle Média - la Belle de Mai est spécialisé dans le domaine multimédia et des contenus numériques. Enfin, notre quatrième pépinière, la Place de l’innovation, ouvrira mi-2018 et sera un lieu unique en plein centre de Marseille.

« Nous souhaitons créer des binômes avocat-informaticien pour lier les deux univers »

Justement, qu’est-ce qui différencie votre dernière pépinière de vos autres espaces ?

La Place de l’innovation est née de notre partenariat avec la banque CIC et sera notre première pépinière en plein centre-ville de Marseille. Elle sera dédiée au conseil ainsi qu’à l’accompagnement d’entreprises innovantes et mettra à disposition des start-up incubées un réseau d’affaires, les expertises métiers du groupes CIC et celles de l’écosystème entrepreneurial. Nous y proposerons ainsi plusieurs services : un hébergement, un réseau, un accompagnement et un financement. Ce sera un espace où se côtoieront start-up, grandes groupes, entreprises innovantes et étudiants souhaitant partager leur passion d’innover.

Notre ambition à terme est d’y accueillir une trentaine de start-up du numérique ou innovantes en phase d’amorçage. Nous souhaitons également travailler en binôme avec la pépinière de la Belle de Mai, spécialisée dans le domaine multimédia et des contenus numériques, qui se trouve à quelques rues de là.

Pourquoi vous être associé au CIC ?

Le CIC Lyonnaise de Banque n’était pas l’une de nos banques partenaires au moment où elle est venue nous proposer le projet, attirée par notre histoire et expérience ainsi que par notre statut d’outil public d’innovation sans logique de profits, contrairement aux accélérateurs privés ou les grands groupes. Le CIC a également la nécessité de se différencier de ses concurrents. Il s’agit donc d’une relation « gagnant-gagnant ». Nous sommes ravis d’ouvrir ce nouvel espace en plein cœur de la ville et avons hâte d’y accueillir nos premières start-up !

Qu’est-ce qui vous distingue des autres incubateurs de la région ?

Depuis plus de vingt ans, nous accompagnons des start-up dans leur croissance sur une durée moyenne de quatre ans, alors que les autres incubateurs proposent habituellement un an de suivi. Pour ce faire, nous disposons d’une équipe permanente de quinze personnes, de 25 experts sous contrat, de mentors, d’écoles, etc. Nous sommes conscients que les jeunes entreprises mettent du temps à structurer leurs équipes. Nous sommes donc sur des process allant jusqu’à la livraison de produits ou de services sur le marché au bout cinq à dix ans d’existence.

« L’enjeu est d’être "glocal", c’est-à-dire local et mondial à la fois ! »

Les avocats du barreau de Marseille ont lancé en mars 2017 leur incubateur d’innovation juridique. Qu’en pensez-vous ?

L’incubateur du barreau de Marseille a été créé sous l’impulsion de Madame le Bâtonnier Geneviève Maillet qui est également notre avocate depuis vingt ans. Il a pour mission principale de faciliter l’accès au droit en utilisant les nouvelles technologies, et ce dans le respect de la déontologie, bien entendu. L’innovation juridique est désormais incontournable et ne peut se faire sans tisser des relations avec les incubateurs régionaux. Nous sommes ainsi devenus partenaires de cette jeune structure pour dénicher de nouveaux talents sur ce secteur d’activité. Nous souhaitons également créer des binômes avocat-informaticien pour lier les deux univers et ainsi faire évoluer le milieu juridique vers le numérique.

Quel est votre prochain projet ?

Nous avons été récemment sollicités sur un projet très ambitieux sur le grand port maritime de Marseille. Notre objectif est d’y ouvrir une pépinière de technologie marine et numérique à l’horizon 2021. Nous sommes un petit partenaire sur ce dossier d’un consortium international  avec l’un de nos administrateurs historique, EDF, et avec qui nous travaillons beaucoup sur la transformation numérique et l’open-innovation. C’est un travail de longue haleine ! Nous ne sommes pas certains d’être retenus, mais le sujet est stratégique pour Marseille. Nous aurons la réponse en juin prochain.

Comment expliquez-vous le dynamisme de la région marseillaise ? 

Je remarque un certain attrait pour la ville de Marseille même si les centres décisionnels restent à Paris. Le développement de la métropole est un sujet structurant du territoire et une réalité qui se construit chaque jour. Sans elle, nous n’aurions pas eu une telle dynamique permettant de structurer le secteur du numérique dans la région. La French Tech Aix-Marseille, en passe de devenir un acteur de l’innovation incontournable sur le bassin méditerranéen, y contribue pour beaucoup. Marseille reste cependant une ville très axée sur le secteur tertiaire et entourée d’industries, notamment dans le secteur de l’énergie. Le port se développe également pour accueillir de nouvelles activités et compte bien devenir un espace de plus en plus attractif pour les grandes entreprises. L’enjeu est d’être « glocal », c’est-à-dire local et mondial à la fois !

Propos recueillis par Margaux Savarit-Cornali

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