Le groupe minier Eramet a conclu en juin dernier l’Eramet Global Care, un accord mondial pour la mise en place d’un socle commun de protection sociale applicable à l’ensemble des filiales du groupe, partout à travers le monde. Mireille Randretsa, directrice des relations sociales et HRBP pour l’Océanie et Élise Pialot, analyste compensation & benefits, précédemment chargée des relations sociales internationales, sont revenues sur cet accord historique.
Mireille Randretsa et Élise Pialot (Eramet) : "Nous avons formé les représentants du personnel au dialogue social transnational"
Décideurs RH. Eramet a créé en 2023 l’Eramet Global Forum, une instance transnationale de représentation du personnel. Dans quel but ?
Mireille Randretsa. Il y a deux ans, nous nous sommes rendu compte que nos deux instances centrales, le Comité de groupe France et le Comité d’entreprise européen, n’étaient pas représentatives de la cartographie réelle du groupe, puisque 80 % de nos effectifs sont basés hors Europe. Nous avons donc souhaité ouvrir le dialogue social à l’international pour nous assurer que toutes les voix du Groupe et notamment celles des équipes du Gabon, du Sénégal, de l’Argentine et de la Nouvelle-Calédonie soient entendues. Le comité d’entreprise européen a ainsi été élargi à l’échelle internationale, et c’est comme cela qu’est né l’Eramet Global Forum.
Nous avons ensuite réalisé un audit interne ainsi qu’une analyse des bonnes pratiques externes en matière de protection sociale. Cela nous a servi de base pour la négociation, et ce avec le soutien du Comex et de l’ensemble de la direction d’Eramet.
Quelles sont les principales mesures de l’accord ?
Élise Pialot. La négociation a été découpée en trois parties : couverture décès, maternité et conditions d’accueil des femmes, santé et prévention. Concernant la couverture décès, l’accord a instauré une indemnité de douze mois de salaire pour la famille du défunt, alors que près de la moitié des salariés du groupe n’en bénéficiait pas. C’est particulièrement novateur et impactant pour nos deux filiales du Gabon et du Sénégal.
L’ensemble de nos collaboratrices pourront par ailleurs profiter d’un congé maternité de seize semaines rémunérées à 100%, ainsi que de dispositions visant à améliorer leurs conditions de travail : sanitaires et vestiaires féminins, équipements de protection individuelle adaptés. Les femmes souhaitant allaiter bénéficient également d’une heure réservée par jour, et ce jusqu’aux six mois de leur enfant.
"L’accord a instauré une indemnité de douze mois de salaire en cas de décès, alors que près de la moitié des salariés du groupe n’en bénéficiait pas"
Nous avons aussi souhaité garantir l’évolution de carrière et la progression salariale des femmes au retour de leur congé maternité. Nous sommes particulièrement attentifs aux parcours des salariées ayant des niveaux de performance élevés. À titre d’exemple, le rattrapage salarial imposé par la loi française prévoit qu’à son retour de congé maternité, la collaboratrice bénéficie des mêmes augmentations que celles qui ont été accordées, durant son absence, aux autres salariés appartenant à la même catégorie professionnelle. Néanmoins, cette disposition légale ne permet pas d’éviter de casser la courbe d’évolution salariale des femmes qui surperforment et dont la rémunération est supérieure au salaire moyen de leur catégorie. C’est pour cela que l’accord prévoit le maintien de l’écart de salaire à leur retour de congé maternité.
La couverture santé assume quant à elle les frais d’hospitalisation, les soins courants ou soins d’urgence et assure la mise en place, dans chaque filiale, d’au moins deux opérations de prévention par an, qui seront adaptées aux priorités de chaque entité.
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Quelle stratégie a été privilégiée pour assurer un dialogue social constructif à l’échelle mondiale ?
M. R. Les salariés basés en Europe bénéficiaient déjà d’avantages sociaux de bon niveau en matière de protection sociale. La solidarité et l’équité ont été privilégiés tout au long du processus de négociation pour permettre à ceux qui n’y avaient pas accès d’obtenir ces garanties essentielles. Nous avons formé les représentants du personnel au dialogue social transnational, ce qui a permis des échanges de qualité. Les équipes européennes ont fait part de leur expérience en la matière, des difficultés rencontrées, et ont été force de proposition. D’autres négociations vont avoir lieu qui pourront porter par exemple sur la parentalité, les droits humains, la diversité et l’inclusion.
Propos recueillis par Caroline de Senneville
Crédit photo: Eramet