Patrice Poirier, CEO et fondateur de SIGMA-RH, révolutionne la gestion des ressources humaines avec un nouvel outil SIRH intégrant l’intelligence artificielle générative. Dans cette interview, il explique comment cette innovation promet des gains de productivité majeurs, tout en préservant le rôle central de l’humain. Il revient également sur les nouvelles fonctionnalités de l’outil, son impact sur l’expérience collaborateur et ses ambitions pour le marché.
Patrice Poirier (SIGMA-RH) : "L’IA générative s’impose comme un incontournable dans les solutions de gestion RH"
Décideurs RH. Vous lancez un nouveau produit SIRH intégrant l’IA, en le présentant comme le "nouveau standard de la productivité RH". Pouvez-vous donner quelques précisions ?
Patrice Poirier. L’IA générative s’impose comme un incontournable dans les solutions de gestion RH, passant d’une option à une nécessité pour gagner en efficacité et en pertinence. En découlent des gains de productivité considérables. Les logiciels ainsi étendus dans leurs fonctionnalités s’adaptent infiniment mieux à notre travail.
Pouvez-vous donner quelques exemples sur la manière dont l’IA "augmente" les fonctionnalités SIRH ?
Prenons un exemple concret : la gestion de la documentation administrative, comme les contrats de travail ou les décisions de la CPAM, qui oblige souvent les RH à ressaisir manuellement des informations. Avec notre outil, un simple glisser-déposer suffit pour que l’IA fasse l’extraction automatique des données pertinentes, éliminant ainsi une tâche sans valeur ajoutée tout en réduisant les risques d’erreurs.
De plus, il est possible de demander à l’IA de vérifier l’alignement de la stratégie avec les actions projetées. Par exemple, les objectifs des collaborateurs doivent respecter des critères SMART (spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporels), mais les systèmes actuels sont incapables de vérifier leur conformité. Avec notre IA, cette vérification se fait en temps réel, dès la saisie, pour garantir leur cohérence avec la stratégie globale et la qualité de vie au travail. Cet apport ajoute une brique de contrainte essentielle pour s’assurer que tout soit en ligne, aussi bien sur le plan du cadre qualitatif humain que sur l’aspect business.
Dans cette même veine mais dans un contexte différent, dans le cadre d’une déclaration d’accident de travail, l’IA est capable de vérifier automatiquement si la description respecte les critères légaux français, tels que le caractère imprévu et soudain de l’accident. Cela renforce la conformité des documents soumis.
Lors de la publication d’une offre d’emploi, l’IA vérifie sa conformité avec les critères légaux de non-discrimination, bloquant automatiquement toute annonce susceptible d’entraîner une sanction juridique. Cela garantit un respect systématique des règles en vigueur.
Ce ne sont que des exemples, mais tout cela représente un gain de temps considérable pour tout le monde, et a aussi pour vertu d’éduquer les équipes au droit, tout en rappelant la direction dans laquelle va l’organisation.
"L’IA permet de réduire jusqu’à 80 % le temps nécessaire à la saisie des données"
Concrètement, quels sont les gains de productivité auxquels peuvent s’attendre les services RH en utilisant cet outil ?
Les gains de productivité sont particulièrement visibles dans la saisie de données, où l’IA permet de réduire jusqu’à 80 % le temps nécessaire à ces tâches répétitives. Pour le reste, tout dépend de la façon dont l’IA est utilisée : plus on y est acculturé, plus le gain de temps et de qualité est important sur la donnée stockée dans le SIRH. Le fait que le logiciel propose des pistes à même d’améliorer la donnée et l’expérience finale est aussi une manière intéressante de former les collaborateurs.
SIGMA-RH est-il compatible avec d’autres briques d’outils SIRH ?
Chaque solution RH n’ayant accès qu’aux données qu’elle intègre, l’utilisation simultanée de plusieurs logiciels RH expose à un risque de fragmentation des données et de l’IA entre différents systèmes. Cette dispersion complique l’analyse globale des informations, empêchant les services RH d’obtenir une vue d’ensemble cohérente et transverse de l’organisation. En conséquence, il devient difficile de croiser les données, de produire des analyses pertinentes et de prendre des décisions éclairées.
Y avez-vous intégré des éléments permettant l’évaluation et le reporting, dans le cadre de la CSRD ?
Actuellement non, mais ce développement aura lieu dans les prochains mois.
Quelle est la place de l’humain dans cet outil ?
L’humain reste au centre. L’IA est présente pour accélérer son travail mais ne prend aucune décision à sa place. Elle propose, mais la validation reste toujours entre les mains de l’humain. Cela évite tout biais potentiel, et nous met en ligne avec la loi européenne sur l’IA.
Quelle sera l’expérience côté collaborateurs, par rapport à un SIRH "classique" ?
L’interaction avec le collaborateur évoluera avec l’IA. Nous avons un chatbot pour répondre à l’ensemble des questions récurrentes. Très bientôt, nous intégrerons l’interaction vocale – par exemple, avec une commande comme "Je souhaite prendre des vacances de tel jour à tel jour" – afin de simplifier l’expérience. C’est un changement important dans l’interface utilisateur.
Le chatbot est un spécialiste RH au fait de toutes les lois du travail françaises, et peut rendre disponible et mieux lisible l’information sur les politiques de l’entreprise pour donner les bonnes réponses aux collaborateurs.
Nous ne conservons aucune donnée des échanges avec les salariés, qui sont donc protégés s’ils sont amenés à poser des questions délicates sur leur vie personnelle. Néanmoins, si le collaborateur l’utilise, au cas par cas, il peut choisir de transmettre un échange précis pour améliorer l’outil et son niveau de réponse.
Quand sort ce produit et quelles sont vos ambitions ?
Nous commencerons à le déployer fin janvier. Nous l’utilisons déjà chez SIGMA, qui compte 160 collaborateurs, en bêta-test. C’est passionnant de voir l’apport concret de cet outil et l’intérêt des scénarios que nous avons développés. Notre ambition est claire : devenir les leaders et les précurseurs du marché des SIRH, en redéfinissant les standards de performance et d’innovation.
Propos recueillis par Judith Aquien