Diplômé de l’Académie militaire de Saint-Cyr, titulaire d’un MBA de l’Université de Georgetown : rien ne prédestinait Geoffrey Fournier à devenir DRH.
Geoffrey Fournier : l'équilibre
Ce qui le motivait avant tout, c’était le goût de l’aventure et du travail en équipe, qui l’a conduit à s’engager dans la Légion étrangère pendant plus de 20 ans et à intégrer les sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). Son intérêt pour l’humain et ses qualités de stratège l’ont amené, à la naissance de son premier enfant, à “calmer sa fougue” et à entamer une carrière de DRH. “En tant qu’officier, j’ai pu observer de près que les ressources humaines sont la clé du succès de toute organisation ”, explique-t-il.
L’efficience
Les militaires en reconversion vers les métiers des ressources humaines ne sont pas si rares. Leur connaissance des situations sociales tendues et leur aptitude à gérer des crises les dotent de compétences essentielles dans le secteur des RH. En l’occurrence, c’est son envie de “développer collectivement l’humain au cœur des transformations d’entreprise » qui a poussé l’ex-légionnaire à accepter ces nouvelles missions. De l’armée, Geoffrey Fournier a retenu de précieuses leçons de management, la première lui ayant été transmise par le colonel Guillaume de Sercey : “La bienveillance sans exigence, c’est de la complaisance, et l’exigence sans bienveillance, c’est de la maltraitance.” Exit donc la démagogie dans la gestion des équipes : le manager doit avoir le courage de diriger et prendre des décisions tout en respectant les engagements de chacun. “Hard with business, sweet with people”, comme disent les Anglo-Saxons.
“La suppression de la période d’essai pour environ 50 % de nos effectifs est un risque mesuré. Nous y gagnons en attractivité et en rétention des talents”
L’efficience n’est pas seulement un trait de caractère militaire, mais aussi une méthode de gestion du capital humain. “Je cherche toujours à atteindre 'l’effet majeur' : obtenir un résultat précis sur le terrain, à un moment donné, qui conditionnera le succès futur.” Son esprit tacticien lui permet de mobiliser efficacement les ressources, en reconnaissant le rôle clé de chacun au sein de l’entreprise.
C’est avec ce même souhait d’efficience qu’il a supprimé la période d’essai pour les techniciens chez Securitas Technology : “Il est inutile de maintenir les individus dans une situation de précarité ou d’insécurité économique. La suppression de la période d’essai pour environ 50 % de nos effectifs est un risque mesuré. Nous y gagnons en attractivité et en rétention des talents.”
L’endurance
En 20 ans de Légion, Geoffrey Fournier a développé son endurance. Aujourd’hui, il la met aussi bien à profit dans sa vie professionnelle que personnelle. Marié à une femme haut gradée, il a su mettre sa carrière en retrait : “J’ai su prendre de la distance avec ma vie professionnelle pour gérer notre vie familiale, permettant ainsi à ma compagne de s’épanouir dans sa carrière.” Une sensibilité que reflète sa politique RH. Après sa nomination, l’une de ses premières mesures fut d’allonger la durée des congés de paternité, de maternité et d’adoption d’un mois chacun. “Si l’on veut concilier vie personnelle et professionnelle, il faut parfois savoir passer le relais, et choisir un autre tempo professionnel.”
Cette distinction entre vie privée et vie professionnelle est sa pierre angulaire : il souligne combien, en période de crise, il est essentiel de préserver un ancrage personnel solide. “Mieux vaut être un cheval de trait qu’un cheval de course, dit-on à l’armée”, rappelle-t-il, surtout dans un contexte où les carrières s’allongent.
“Contrairement aux idées reçues, j’ai constaté bien plus de cas de discrimination dans le civil que dans l’armée. Le racisme et la misogynie y sont très rares et, lorsqu’ils surviennent, ils sont traités avec la plus grande fermeté”.
L’esprit de corps
“Contrairement aux idées reçues, j’ai constaté bien plus de cas de discrimination dans le civil que dans l’armée. Le racisme et la misogynie y sont très rares et, lorsqu’ils surviennent, ils sont traités avec la plus grande fermeté.” Pour lui, le sens de l’engagement prime, et il se souvient de l’esprit de corps qui fédérait des individus très différents autour d’une même cause. “Les réflexions se font collectivement, mais les décisions sont individuelles.” L’engagement crée le groupe : si les collaborateurs croient au projet de l’entreprise, celui-ci se décline naturellement en objectifs individuels.
Geoffrey Fournier veille à adapter cet esprit à ses fonctions actuelles. Chaque matin, en endossant son rôle de DRH, il se rappelle que son objectif est d’améliorer les organisations de travail et, à travers elles, la société. Parmi ses priorités chez Securitas Technology figurent l’emploi des seniors, l’inclusion des personnes en situation de handicap et la valorisation des collaborateurs comme ambassadeurs de la marque employeur. L’une des grandes questions de demain, selon lui, sera de savoir gérer la charge de travail et les moments de déconnexion pour offrir une plus grande souplesse.
Convaincu et déterminé, Geoffrey Fournier partage régulièrement sa démarche lors de débats télévisés ou au sein d’associations. Il rappelle sans cesse l’impact sociétal de la fonction RH. Leader sur le terrain, il ne manque pas d’aiguiser ses compétences et de comparer les bonnes pratiques du secteur. La maîtrise du long terme est l’une de ses forces, et il reste convaincu que l’avenir des entreprises passe par une gestion humaine éclairée. “Soldats, visez juste ! Visez le cœur”, ainsi que le disait le maréchal Ney.
Elsa Guérin