Le taux de divorce en France est d’environ 45 %, le nombre de familles recomposées ne cesse de croître et les situations en cas de décès peuvent entraîner des situations patrimoniales délicates, voire conflictuelles.
Lorsqu’on évoque la situation du "survivant", il faut systématiquement faire la distinction entre la situation du conjoint survivant, du partenaire de PACS et du concubin car les règles civiles et fiscales en matière successorale sont très différentes selon le régime matrimonial effectif.
 
Le régime du mariage
Commençons par le régime le plus protecteur qu’est le mariage. En effet, le mariage offre une protection du conjoint survivant tant sur le volet civil que sur le volet fiscal même en présence d’enfants non communs. Fiscalement, le conjoint survivant bénéficie d’une exonération totale de droits de succession depuis l’entrée en vigueur de la Loi TEPA en 2007, qu’on soit en présence d’enfants communs ou non. Civilement, dans l’hypothèse d’enfants communs, le conjoint survivant a le choix entre l’intégralité du patrimoine en usufruit ou ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit. Cependant, en présence d’enfants non communs, le conjoint survivant ne dispose pas de ce choix-là et se voit attribuer automatiquement ¼ du patrimoine du défunt en pleine propriété. Cette attribution en présence d’enfants non communs peut engendrer des situations d’indivision délicates. Prenons l’exemple, du couple qui a chacun deux enfants d’une première union et ensemble, lors de leur seconde union, ont fait l’acquisition de leur résidence principale dont ils détiennent chacun la moitié en pleine propriété. En cas de décès de l’un des époux, le conjoint survivant disposera de 5/8 en pleine propriété de la résidence principale et les deux enfants du défunt disposeront de 3/8 en pleine propriété de cette résidence principale. Si le conjoint survivant décide de vendre la résidence principale, il ne pourra le faire qu’avec l’accord des enfants du défunt. Étant dans une situation d’indivision, il suffit qu’un seul des enfant soit opposé à la cession et le conjoint survivant ne pourra procéder à la vente.
 
En présence d’enfants non communs, si la volonté est de se protéger et d’accroître les droits du conjoint survivant, il est judicieux de procéder à la mise en place d’une donation au dernier vivant permettant au conjoint survivant de pouvoir choisir entre l’intégralité en usufruit, ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit ou l’intégralité de la quotité disponible en pleine propriété. A contrario et notamment pour éviter les situations d’indivision, il est possible de restreindre les droits du conjoint survivant car ce dernier n’est pas considéré comme héritier réservataire. Les droits du conjoint survivant peuvent être restreints voir anéantis dans le cadre de la rédaction d’un testament. Cela peut s’avérer pertinent notamment dans le cadre de la transmission d’entreprise afin d’éviter que le conjoint survivant soit détenteur de titres d’une société familiale en le privant de ses droits sur les titres de la société dans le cadre d’un testament. 

 

Seul droit octroyé au conjoint survivant qualifié d’ordre public est le droit temporaire d’un an sur le logement familial

Seul droit octroyé au conjoint survivant qualifié d’ordre public est le droit temporaire d’un an sur le logement familial. Ce droit temporaire d’un an est à distinguer du droit viager d’usage et d’habitation dont dispose également le conjoint survivant sur le logement familial dès lors que ce dernier appartient aux deux époux ou dépend de la succession. Il est possible de priver le conjoint survivant du droit viager d’usage et d’habitation dans le cadre d’un testament authentique mais en toute hypothèse le conjoint survivant conserve son droit temporaire d’un an sur le logement familial.
 
Le régime du PACS
Continuons par le régime du PACS qui est fiscalement identique à celui du mariage puisque le partenaire de PACS est exonéré de droits de succession. Cependant, le partenaire de PACS n’a pas la qualité d’héritier et la seule possibilité pour ce dernier d’être gratifié est l’attribution d’un legs dans le cadre d’un testament. Legs qui sera cantonné à concurrence de la quotité disponible en présence d’enfants (communs ou non communs). Le partenaire de PACS est privé du droit viager d’usage et d’habitation sur le logement familial, il peut seulement prétendre au droit temporaire d’un an ou à une attribution préférentielle du bien qui dans ce dernier cas a vocation à s’appliquer si le logement familial avait été acheté en indivision par les partenaires. Ces droits n’étant pas d’ordre public, il est possible d’y déroger dans le cadre d’un testament. Concrètement, la situation du partenaire survivant est fragile en matière successorale, que l’on soit en présence d’enfants communs ou non. Si on reprend l’exemple ci-dessus, du couple qui est (cette fois-ci) pacsé avec chacun deux enfants non communs et propriétaire indivis du logement familial. En cas de décès d’un des partenaires, le survivant n’aura droit à rien dans la succession du défunt et sera en indivision sur le logement familial avec les enfants du défunt qui disposeront de la moitié de ce bien en pleine propriété. La rédaction d’un testament est donc impérative si on souhaite attribuer des droits au partenaire survivant ou ne serait-ce que l’usufruit du logement familial afin d’assurer au survivant de pouvoir jouir gratuitement du logement familial jusqu’à son décès.
 
Le régime du concubinage
Finissons par le régime le moins protecteur tant civilement que fiscalement qu’est le concubinage. Le concubin survivant n’est pas considéré comme héritier, il n’a donc aucun droit dans la succession du défunt. Seul un legs dans le cadre d’un testament, lui permettra d’obtenir des droits dans la succession. Legs cantonné à la quotité disponible dès lors que l’on est en présence d’enfants (communs ou non).  Fiscalement, le régime du concubinage est confiscatoire en matière successorale. En effet, le concubin survivant est considéré comme n’ayant aucun lien de parenté avec le défunt.

 

Fiscalement, le régime du concubinage est confiscatoire en matière successorale

Le legs sera taxé à 60 % après application d’un abattement de 1 594 euros. La seule optimisation fiscale envisageable lorsque l’on souhaite gratifier un concubin et qu’on dispose de liquidités est l’utilisation du contrat d’assurance-vie. En effet, dès lors que les sommes sont versées avant les 70 ans, le bénéficiaire du contrat d’assurance-vie dispose des capitaux après application d’un abattement de 152 500 euros suivi d’une taxation forfaitaire à 20 % jusqu’à 700 000 euros et 31,25 % au-delà et cela peu importe le lien de parenté entre le souscripteur de l’assurance-vie et le bénéficiaire. À défaut de disposer de liquidités, mieux vaut envisager un pacs avec testament ou le mariage afin de protéger le "survivant".
 

Le mariage est certes le régime le plus protecteur pour le "survivant" tant civilement que fiscalement, cependant, en présence d’enfants communs et sans dispositions prises, il peut engendrer des situations d’indivision délicates. D’autant plus que selon le Code civil "nul n’est censé rester en indivision". Peu importe le régime matrimonial en vigueur, il est opportun de déterminer les objectifs patrimoniaux des époux afin de protéger au mieux les intérêts de tous notamment grâce à la rédaction d’un testament. 

 
Charlène Nespoulous, Présidente de Nespoulous Gestion Privée 
 

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