David Humbert (Endrix) : "La facturation électronique percute le modèle historique de l’expertise comptable"

Décideurs. Pouvez-vous revenir sur l’évolution d’Endrix ?

David Humbert. Endrix est à l’origine un groupe d’experts-comptables. Il accompagne les dirigeants de PME et ETI bien au-delà de son expertise dans tous leurs enjeux de croissance, de pilotage de la performance et de responsabilité. Le groupe réalisait un chiffre d’affaires de 8 millions d’euros en 2008 et employait 90 collaborateurs. Aujourd’hui, nous atteignons 63 millions d’euros de chiffre d’affaires et nous comptons plus de 650 collaborateurs partout en France. La croissance de ces dernières années a été exponentielle.

Comment expliquez-vous cette progression ?

Après avoir commencé ma carrière au sein d’Endrix en 2000, j’en ai pris la présidence en 2008. Dès lors, ma feuille de route a été d’œuvrer à sa croissance. Très vite, nous avons tenu à le diversifier, à la fois en termes d’expertises et de zones géographiques. Nous avons commencé par développer une offre de gestion de patrimoine ; pour des experts comptables, il y a 15 ans, c’était inédit. Et nous avons progressivement développé de nouvelles expertises en matière de conseil financier et extra-financier. Originaire de Lyon, le groupe s’est également étendu à d’autres zones du territoire, en s’installant à Paris puis partout sur l’axe Nord-Sud. En 2018, nous avons fait entrer Bpifrance au capital, à hauteur d’une prise de participation minoritaire de 5 millions d’euros.

"le fait d’avoir Bpifrance au capital d’Endrix nous a permis de gagner en notoriété"

Pourquoi avoir choisi de faire entrer Bpifrance au capital ?

Le caractère public et institutionnel de Bpifrance nous convenait au regard de l’indépendance que l’on souhaitait garder. L’investissement s’est réalisé sans cash out des dirigeants. Le fonds a apporté 5 millions d’euros – 10 % du capital du groupe à l’époque – un levier idéal pour notre développement. Par ailleurs, le fait d’avoir Bpifrance au capital d’Endrix nous a permis de gagner en notoriété, en plus d’une crédibilité considérable pour le groupe. Cet investissement a permis de donner de l’ampleur à notre stratégie de diversification.

Vers quelles activités vous êtes-vous diversifiées ?

Nous faisons partie des rares cabinets qui ont très tôt pris conscience que le modèle de l’expertise comptable changeait. Dès 2008, nous avons œuvré à cette transformation. À ce titre, Endrix a opéré une diversification sur plusieurs axes. Le premier a consisté à développer des bureaux sur tout l’axe Nord-Sud de la France, avec l’ouverture d’une antenne à Paris, dans les Hauts-de-France et en Bourgogne, notamment. Le second a été de se diversifier en termes d’activités avec le développement d’une branche conseil stratégique et opérationnel notamment en matière de recrutement et de RSE, la création d’un cabinet d’avocats et, l’année dernière, l’acquisition du cabinet de conseil Zalis. Nous avons également ouvert d’autres portes vers de nouveaux clients en développant une offre dédiée aux ETI, en plus du segment des PME sur lequel Endrix est historiquement très actif. Enfin, parce qu’il est essentiel d’intégrer la transformation numérique dans notre modèle, grâce à la donnée dont nous disposons en tant qu’expert-comptable, une plateforme d’analyses prédictives, Impulse data, a été co-créée il y a un an en collaboration avec d’autres acteurs. Avec cet outil, nous pouvons désormais fournir à nos clients, en plus de leurs propres chiffres, un benchmark de données sectorielles basé sur un segment de plusieurs dizaines de sociétés comparables. Nous disposons d’un panel de plus de 400 000 sociétés, de quoi établir des baromètres nationaux.

"Nous faisons partie des rares cabinets qui ont très tôt pris conscience que le modèle de l’expertise comptable changeait."

La généralisation de la facture électronique influence-t-elle le déploiement de votre feuille de route ?

La facturation électronique percute le modèle historique de l’expertise comptable. La fonction a construit son activité sur une mission réglementaire et légale à destination des entreprises, pour aider le dirigeant à tenir sa comptabilité et son bilan. Avec la facturation électronique, c’est le dernier volet d’activité de l’entreprise qui se dématérialise. En définitive, cette activité d’assistance à la tenue comptable va se paupériser, voire disparaitre. L’expert-comptable a donc tout intérêt à faire évoluer son modèle pour monter en gamme sur le conseil, en apportant une nouvelle valeur ajoutée aux chefs d’entreprises. De fait, utiliser les données dont on dispose, en tant qu’acteur historique de l’expertise comptable, pour les mettre en commun au service de nos clients, est une stratégie qui profitera à tous.
L’alliance Impulse Data qui fédère des acteurs majeurs de la profession autour d’un datalake commun, s’inscrit d’ailleurs dans la droite ligne de ces sujets de transformation. À l’inverse, les acteurs qui ne verront pas le point de bascule de la profession et qui n’agissent pas, risquent de s’éteindre.

Quelle est la prochaine étape pour Endrix ? Croissance externe ? Nouveaux fonds au capital ?

Ces 3 derniers mois, nous avons fait évoluer notre gouvernance pour l’adapter aux nouveaux enjeux du secteur et à la taille actuelle du groupe. Notre comité de pilotage compte 7 membres et un conseil d’administration de 5 personnes, où siègent Bpifrance et Emmanuel Millard, notre secrétaire général. Une composition diversifiée qui ressemble à ce qu’est devenu Endrix. Quant à l’arrivée d’autres fonds, la présence de Bpifrance au capital est un pilier qui convient parfaitement à l’évolution du groupe. Pour les opérations de croissance externe, quand bien même les opportunités sont nombreuses, nous avons appris à écouter les signaux faibles. Le cas échéant, je n’hésite pas à fermer un dossier.
Aujourd’hui, nous avons de nouvelles opérations qui se profilent pour poursuivre notre développement.

 

Propos recueillis par Céline Toni