À droite comme à gauche, nombreuses sont les réactions à la troisième conférence de presse de François Hollande.
À bien des égards, l’allocution à la presse du 14 janvier dernier du président de la République apparaît comme la conférence de la dernière chance. François Hollande a tenté le tout pour le tout et le développement de son projet de pacte de responsabilité, abordé précédemment lors de ses vœux aux Français, ne manque pas de décontenancer l’opposition. L’homme du consensus socialiste est apparu comme le social-démocrate dont il n’osait jusque-là pas revêtir les habits.

« Il s’agit d’aller plus vite, d’aller plus loin, d’accélérer, d’approfondir », lance François Hollande dans son allocution liminaire. « C’est pourquoi j’ai proposé le pacte de responsabilité : alléger les charges des entreprises, réduire leurs contraintes sur leurs activités ; et en contrepartie permettre plus d’embauches et davantage de dialogue social. (…) Le temps est venu de régler le principal problème de la France : sa production. (…) Il nous faut produire plus, il nous faut produire mieux. C’est donc sur l’offre qu’il faut agir. »

Plébiscités par les Français
Près de sept Français sur dix (69 %) considèrent que ce pacte de responsabilité est une bonne solution pour lutter contre le chômage, selon le dernier sondage CSA pour Les Échos, Radio Classique et l’Institut Montaigne.
À gauche, 81 % des sympathisants de gauche se disent favorables, dont 75 % des proches du Front de gauche. Même engouement au centre, où au Modem, ils sont 79 % à approuver le projet et 76 % à l’UDI.
À droite, « si les sympathisants de l’UMP et du FN se montrent un peu plus souvent réticents à cette annonce – respectivement 37 % et 42 % estiment que c’est une mauvaise idée –, une majorité d’entre eux reste tout de même convaincue par celle-ci (59 % et 55 %) », analyse Nicolas Fert, du pôle Opinion – corporate de CSA.

« Satisfaite », « dans le bon sens », « belle réponse »…
La Confédération général des petites et moyennes entreprises (CGPME), pourtant peu encline à soutenir la pensée économique socialiste, annonce « être prête à relever le gant ».

« En phase avec les besoins de notre pays »
Nous citoyens, le think tank (magazine Décideurs n°154) entrepreneurial et pro-libéral de Denis Payre (ancien président de Croissance Plus) dont on parle beaucoup en ce moment, se félicite également du « nouveau travail de pédagogie qu'il faut mener sur la réduction des dépenses publiques, la redéfinition des missions de l'État ou l'allégement des charges pour les entreprises ». Il s’engage à « encourager et [à] accompagner dans ce travail de pédagogie vital pour l'avenir de notre pays. »

« Enfin...! »
S’adressant aux journalistes le lendemain de l’allocution présidentielle, Pierre Gattaz, le patron des patrons se dit : « favorable à ce discours qui montre une inflexion forte dans la direction de retrouver la compétitivité de nos entreprises pour la création d'emplois ». La veille, sur Tweeter, son prédécesseur s’exclamait : « Fin des cotisations familiales d'ici 2017. Enfin...! ». Depuis quelques jours, du côté de l’avenue Bosquet, on se pince pour y croire. Il faut dire que la baisse annoncée du coût du travail – avec la fin en 2017 du financement de la protection famille par les entreprises, évaluée entre 30 et 35 milliards d'euros – a de quoi ravir le syndicat qui réclamait la mesure depuis des années. Reste à savoir « quelle est l'ampleur des réformes structurelles annoncées ». Pierre Gattaz exige des clarifications, « car nous ne savons pas si nous sommes partis pour monter l'Everest, à 8 800 mètres d'altitude, ou si c'est seulement la Butte aux cailles, à 63 mètres. »

« Sur les principes, rien à dire »

Dans les think tanks aussi, l’idée d’un allégement des charges des entreprises fait son chemin. À la fondation Ifrap, sa directrice Agnès Verdier-Molinié semble satisfaite : « Sur les principes, rien à dire », mais temporise : « sur la mise en œuvre et la réalité de l'inflexion de la politique du gouvernement, restent encore beaucoup de non-dits »… Parmi lesquels, pêle-mêle : le remplacement du CICE, le dialogue social, le niveau des contreparties, l'identification des cinquante milliards annoncés, la fusion des communes, départements et régions, l’Éducation nationale ou les dépenses de santé.

« Qui peut le croire ? »
Plus circonspects, les cadres de l’opposition adoptent une ligne critique vis-à-vis des annonces du président. Des annonces qui d’emblée ont provoqué l’ire de l’UMP. Son président, Jean-François Copé, dénonce « des vœux pieux, du flou, des usines à gaz, des restes de vieille doctrine socialiste derrière des mots destinés à rassurer les entrepreneurs français déboussolés. » Franck Allisio, président et secrétaire national des Jeunes Actifs du parti fustige : « François Hollande se moque une fois de plus des Français en racontant une nouvelle fable afin de gagner du temps et de limiter la casse aux municipales ? Assurément ! » De son côté, Jonas Haddad, secrétaire national, déplore le « temps perdu et le désespoir créé chez les jeunes. » Pour lui, « François Hollande doit prendre un véritable tournant. Revaloriser l'entrepreneuriat des jeunes, l'apprentissage et l'alternance sont les seules solutions efficaces ! ». Même tonalité chez Roger Karoutchi, sénateur UMP des Hauts-de-Seine, qui rappelle que le 30 janvier 2012, à Brest, François Hollande s’interrogeait : « Qui peut croire qu'en diminuant les cotisations sociales de 12 ou 13 milliards d'euros, d'un seul coup les entreprises françaises pourront exporter, que les consommateurs importeraient moins et que nous aurions immédiatement des créations d'emplois ? » Enfin, pour Valérie Debord, déléguée générale adjointe de l'UMP : « cet acte II du quinquennat signe l'absolu échec de l'acte I et est un terrible aveu de l'inefficacité de l'action du chef de l'État au cours des vingt mois qui viennent de s'écouler... »
À gauche de la gauche, Jean-Luc Mélenchon fustige ce « programme de droite » et en appelle à « une large opposition de gauche au Parlement et dans la rue ».

« Banco »
Faisant preuve de plus de tolérance, le centre, en la personne de François Bayrou, salue le discours de l’Élysée, comme le « tournant réformiste que la situation de la France exige ». L’ancien Premier ministre François Fillon se dit quasi prêt à « prendre au mot » le chef de l'État. Jean-Pierre Raffarin n’exclut pas de voter la confiance au gouvernement : « Moi, j'ai été très critique sur ce qui a été fait pendant dix-huit mois, mais le Président nous dit : maintenant, je vais faire différemment. (…) Jusqu'à maintenant, il nous a dit : c'est l'impôt la solution. Et maintenant il nous dit : ce n'est pas l'impôt, c'est la réforme. Moi je dis banco ! »

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