Le Conseil d’État va à l’encontre de l’administration fiscale dans l’affaire Soreal-Ilou, filiale du groupe Alone & Co soupçonnée d’avoir procédé à un acte anormal de gestion en cédant 100 270 actions Soreal-Ilou au dirigeant salarié à un prix inférieur à sa valeur vénale.

La frontière entre acte de gestion anormal ou non est fine et difficile à gérer pour les chefs d’entreprise qui se voient assaillis par l’administration fiscale de contrôles de plus en plus fréquents. Après avoir joué la carte de la pédagogie, l’administration fiscale intervient et les jugements tombent. Ce fut le cas pour la holding Alone & Co, dirigée par le Breton Gilles Bocabeille et maison mère de la filiale Soreal-Ilou. En pratique, le groupe a consenti à un dirigeant salarié de sa filiale une promesse de vente d’actions à un prix faible. Or, d’après le fisc, cela s’apparente à un intéressement salarial. Cependant, ce n’est pas la filiale qui a payé mais bien la société holding. La cession faite dans ce cas à un prix plus faible que sa valeur vénale de 3,838 euros constitue-t-elle un acte anormal de gestion ? C’est ce que semble penser l’administration fiscale qui, estimant la vente à un prix "anormalement bas", somme la société Alone & Co de réintégrer à ses bénéfices imposables les gains perdus si la vente avait été faite au prix de la valeur vénale. Or, le Conseil d’État n’est pas du même avis.

Management package déguisé ?

Le cas Alone & Co est particulier, car cette cession d’actions ressemble à un management package déguisé. "L’administration fiscale a considéré qu’il y avait une libéralité constitutive d’un acte anormal de gestion parce que la promesse de vente des actions à prix minoré bénéficiait non pas à un salarié de la société mais au salarié d’une de ses filiales", explique Amélie Lièvre-Gravereaux, associée chez Acacia Legal. Mais qui dit libéralité dit donation. Et cela voudrait alors dire que la société holding a fait une donation à une tierce personne. Dans ce cas, c’est alors au bénéficiaire que revient la taxation de 60 % et non à l’entreprise. "Pour le Conseil d’État, la seule circonstance que le bénéficiaire de la promesse ne soit pas salarié de la société n’est pas déterminant dès lors qu’elle en tire un intérêt." La décision rendue le 11 mars libère Alone & Co de son redressement fiscal. Le Conseil d’État a déclaré que la société avait un réel intérêt au niveau de l’entreprise de le faire, à savoir la valorisation de ses titres.

Marine Fleury

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